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Data centers : réduire la facture énergétique pour rester compétitifs

Energie : l'usine du futur sera efficiente ou ne sera pas Actu-Environnement.com - Publié le 07/09/2015

L'énergie représente 30 à 50% des coûts d'exploitation des data centers. La question de l'efficacité énergétique est prégnante pour les opérateurs qui font la chasse au gaspillage, tout en garantissant le volume croissant de données à traiter.

Energie : l'usine du futur sera...  |    |  Chapitre 6 / 6
Environnement & Technique N°350 Ce dossier a été publié dans la revue Environnement & Technique n°350
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Avec l'explosion du nombre de données numériques en circulation chaque jour (recherches, mails, vidéos, photos, etc.), les centres chargés de les traiter et de les stocker - responsables au niveau mondial de 1,5% de la consommation énergétique et de 2% des émissions carbone - ne cessent de se développer. Ce sont des milliards de données informatiques, provenant de milliers de serveurs qui sont hébergées dans ces data centers : les plus énergivores peuvent atteindre les 100 mégawatts (MW) de puissance. Un data center de 10.000 m2 consommerait ainsi autant qu'une ville de 50.000 habitants, selon le Syndicat des entreprises du numérique en France (Syntec). Avec l'essor du Cloud computing (l'informatique dans les nuages), qui permet de stocker davantage de documents en ligne, le marché mondial des data centers devrait progresser de 15 à 25% par an, chiffrait en 2012 le cabinet d'études Xerfi. Et leur consommation électrique avec.

 
Un appel à projets pour optimiser les techniques de refroidissement L'appel à projets "Nouvelles Technologies Emergentes 2015", lancé en novembre 2014 par l'Ademe, vise des solutions de rafraîchissement des data centers par geo-cooling, c'est-à-dire l'utilisation directe de la température du sous-sol. La conception énergétique, le free-cooling et "l'efficacité des éléments actifs" sont "privilégiés" avant d'envisager une récupération de chaleur ou un traitement actif de froid, selon le cahier des charges. Cet appel à projets s'est clôturé le 17 juillet 2015.
 
En France, les 130 data centers, principalement situés en région parisienne, absorberaient aujourd'hui 9% de l'électricité du pays. "En moyenne, un data center utilise aujourd'hui en permanence environ 2 kilowatts par mètre carré. Sur 500 m2, c'est 1 MW consommé en continu, soit annuellement l'équivalent de l'énergie électrique utilisée par plus de 1.000 foyers", précise Ghislain Colom, directeur Data Center Solutions de Cofely Services, filiale du groupe Engie.

Les grandes entreprises, y compris les gestionnaires de salles informatiques, auront l'obligation de réaliser un premier audit énergétique avant le 5 décembre 2015 visant à diminuer leur consommation, conformément à la directive européenne du 25 octobre 2012. Les entreprises certifiées ISO 50001 (management de l'énergie) à l'instar de Cofely Services et de TelecityGroup France sont exemptées de cette obligation. L'énergie représente "50% des coûts d'exploitation d'un data center. Un acteur qui consomme 30% d'énergie en plus, c'est l'équivalent de 15% de coûts supplémentaires. La plupart des acteurs n'ont pas attendu les obligations réglementaires pour réduire ces coûts qui ont un impact sur leur rentabilité et leur compétitivité", souligne M. Colom.

Selon Stéphane Duproz, directeur général de TelecityGroup France, opérateur de data centers neutres, ils seraient "95% des opérateurs" à améliorer leur efficacité énergétique pour ces questions d'argent. "Ces gains, on peut les partager avec nos clients. C'est un avantage concurrentiel. Mais le jour où la réglementation change, ce n'est pas sûr qu'en terme de design, ces opérateurs pourront s'adapter", prévient-il. M. Duproz "attend une législation" qui encadre les limites de température d'air froid soufflé à l'intérieur des data centers.

Optimiser la climatisation et valoriser la chaleur

Fonctionnant 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, les data centers abritent les serveurs de calcul et de stockage qui produisent en effet de la chaleur et nécessitent d'importantes ressources énergétiques pour alimenter les systèmes de climatisation en charge de les refroidir. La clim' représenterait de 40% à 55% de la consommation énergétique d'un data center "standard à l'ancienne", indique Stéphane Duproz. Dans un centre de données traditionnel, pour un kilowatt dépensé pour un serveur, un autre kilowatt serait nécessaire pour le refroidir avec pour objectif une température visant les 22°C en intérieur. "Beaucoup d'efforts pour réduire les consommations d'énergie portent sur la production de froid et l'optimisation de son utilisation", précise M. Duproz, via la technique du free-cooling qui limite le recours à la climatisation artificielle par l'utilisation de l'air frais extérieur. "Le free-cooling a permis de faire passer les 55% d'énergie consommée par les climatiseurs à 18%. En gros, depuis trois-quatre ans, la consommation des nouveaux data centers, en dehors des serveurs, a été divisée par trois", souligne-t-il.

Des allées chaudes et froides (couloirs thermiques) sont mises en place pour refroidir spécifiquement les baies informatiques via une optimisation du débit d'air. "L'air froid est injecté dans les allées froides au moyen de dalles perforées dans le faux-plancher. Le retour d'air chaud est ensuite évacué vers le plafond du local du serveur", ajoute M. Duproz. Le froid est distribué de manière efficace au plus près des besoins et où les flux d'air chaud et froid ne se rencontrent jamais. Selon lui, 80% des data centers en France "anciens et privés" seraient en revanche toujours équipés de climatiseurs "qui se contentent de transformer l'énergie électrique en froid".

L'association américaine des ingénieurs du chauffage, de la climatisation et de l'air conditionné (ASHRAE) recommande de faire fonctionner les équipements informatiques jusqu'à 27°C sans risque de panne, ce qui se traduirait par une économie globale d'énergie de 4% du data center, selon le site d'informations GreenIT.fr. Par conséquent, il ne faut pas que l'air soit ni trop froid ni trop chaud : "Nous avons augmenté la température de l'air fourni à nos serveurs de 60% en dix ans, soit dix degrés", précise le directeur général de TelecityGroup France.

Les opérateurs valorisent davantage la chaleur dégagée par les groupes de froid à l'intérieur des salles pour chauffer des bureaux, des logements, des serres ou des piscines. Les calories rejetées par les groupes froids sont en effet récupérées par des échangeurs thermiques puis distribuées via un réseau de chaleur. Dans les gros data centers de près de 10.000 m2, la chaleur rejetée peut atteindre les 2 à 2,5 kW par m2. Au Val d'Europe, en Seine-et-Marne, l'usine numérique de Natixis permet ainsi de chauffer le centre aquatique et une pépinière d'entreprises. Le centre de données de TelecityGroup France basé à Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, abrite également depuis 2010 une serre végétale chauffée grâce à l'air chaud produit par ses salles informatiques. La start-up française Qarnot Computing a par ailleurs déposé dès 2009 son brevet protégeant "ses radiateurs de calculs" destinés à chauffer les habitations.

Mutualiser les serveurs

Les gestionnaires de data centers mutualisent également les serveurs loués à plusieurs clients dans un seul espace, permettant d'optimiser leur efficacité énergétique. "On mutualise sur une seule machine plusieurs serveurs, leur alimentation électrique, et leur dissipation de chaleur. Le refroidissement, le routage et l'accès au réseau sont alors réduits", explique le Syntec. "Héberger les serveurs de 300 clients dans nos trois data centers en région parisienne [représentant une surface totale d'environ 7.000 m2, ndlr] divise leur consommation totale par deux", a fait valoir M. Duproz. "Le fait que les clients viennent chez nous est un gain en impact carbone colossal. Un kilowatt consommé dans un data center, c'est environ 4 à 5 kilowatts qui ne sont pas consommés ailleurs !", affirme-t-il.

En plus de la maintenance, "nous réalisons, au jour le jour, les meilleurs réglages pour avoir la meilleure performance de l'installation. En complément, nous pouvons proposer des opérations de modification ou de rénovation. Nous sommes ainsicapables de faire réaliser 10% d'économies d'énergie voire plus sur une installation, selon son ancienneté et le niveau d'investissement du client", ajoute de son côté Ghislain Colom de Cofely Services. Le groupe exploite 70 data centers en France, représentant près de 140.000 m2 (partie informatique) soit un quart du marché français, et 500.000 m2 en Europe. Il a acquis en juillet dernier Apis Engineering, un bureau d'études techniques spécialisé dans la conception et la rénovation des centres informatiques.

Une intensité énergétique qui progresse

L'indicateur le plus utilisé pour mesurer l'efficacité énergétique d'un data center est le PUE (Power Usage Effectiveness). Il consiste à évaluer sur un an la quantité d'énergie totale consommée par le site, par rapport à la quantité d'énergie nécessaire au fonctionnement des équipements informatiques (disques, serveurs, stockage…). Plus le résultat du PUE est proche du chiffre 1, moins le data center consomme d'énergie. "Il y a trois ou quatre ans, le PUE moyen d'un data center en France atteignait 2,5, autrement dit pour 1 kWh consommé par le serveur, 1,5 kWh étaient consommés par le data center", souligne Stéphane Duproz. "Aujourd'hui, les plus performants sont inférieurs à 1,5. Pour le 1 kWh consommé par le serveur, le data center n'en consomme donc que 0,5 kWh, soit trois fois moins".

Une empreinte carbone qui s'améliore

Sopra Steria, spécialiste européen de la transformation numérique, a également réduit l'impact carbone de ses 37 data centers (dont cinq en France) utilisés par le groupe et ses clients à hauteur de "8.221 tonnes eq.CO2 en 2014, via la concentration et l'optimisation des serveurs, la virtualisation et le recours aux énergies renouvelables", explique Siva Niranjan, responsable groupe du programme Environnement durable. "57% de l'électricité utilisée pour alimenter nos data centers proviennent de sources renouvelables : éolien offshore, énergie hydraulique… Ils sont neutres en carbone, ce qui est un avantage concurrentiel indéniable", a-t-il ajouté. Le groupe a obtenu en mai dernier la certification CarbonNeutral® délivrée par The CarbonNeutral Company, pour la réduction des émissions et la compensation carbone de ses data centers et de ses déplacements professionnels.

En région parisienne, les fournisseurs d'hébergements numériques Equinix France qui exploite quatre data centers (représentant plus de 26.000 m2 au total d'espace) et Interxion France mettent également en avant leur contrat signé avec EDF, leur garantissant que 100% de l'énergie qui leur est livrée provient de sources renouvelables (hydraulique, solaire, éolien…) via les certificats Equilibre d'EDF. "Pour chaque certificat Equilibre acheté, EDF s'engage à injecter sur le réseau 1 MWh d'électricité certifiée d'origine renouvelable", explique Fabrice Coquio, président d'Interxion France, pour ses sept data centers franciliens représentant 17.800 m2 d'espace.

Si les géants du Net, Google, Apple ou Facebook, ont aussi augmenté leur recours aux ENR, les data centers nécessitent un approvisionnement en continu d'électricité. Ce qui sous-entend de prévoir une seconde source d'alimentation sur le réseau d'approvisionnement. "Aujourd'hui, les consommations énergétiques sont telles que les énergies renouvelables décentralisées n'y répondent pas", pointe Ghislain Colom. L'enjeu étant de "garantir en permanence la fiabilité de l'installation", rappelle-t-il. "Un certain nombre d'études chiffre l'heure de coupure d'un data center à plus de 350.000 euros. Ces coupures ont des impacts majeurs sur l'économie !".

Rachida Boughriet

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Reproduction interdite sauf accord de l'Éditeur.

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