La Directive établie un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, et a été adoptée le 23 octobre 2000 et publiée au Journal officiel des Communautés Européennes du 22 décembre 2000. Elle fixe comme principales échéances dans chacun de ces districts hydrographiques, l'élaboration d'un état des lieux d'ici fin 2004, et d'un plan de gestion d'ici 2009 qui fixera notamment les objectifs à atteindre pour 2015. En France, le plan de gestion consistera en une modification du SDAGE (schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux) et d'un programme de mesures à définir d'ici 2009.
Or selon un rapport sur la qualité de l'eau du Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), rendu public, lundi 6 juin, réalisé sous la direction de Jean-Claude Lefeuvre, professeur émérite au Muséum, et président du comité scientifique du WWF, la France aura beaucoup de mal à se mettre en conformité à cette directive.
L'étude s'est appuyée sur les résultats des analyses effectuées par les agences de l'eau sur six grands bassins : Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée-Corse et Seine-Normandie. Ces données ont été analysées et complétées par les scientifiques du MNHN et de l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD).
Ce premier état des lieux montre que, dans l'hypothèse la plus optimiste, moins de 50% % des masses d'eau (de surface et souterraines) pourront atteindre le bon état écologique d'ici 2015 et seulement 25 % dans l'hypothèse la plus pessimiste.
50 % à 75 % des masses d'eau de surface et souterraines sont gravement dégradées, souligne le rapport.
25 % des masses d'eau sont dans un bon état probable, 25 % sont à risque, 23 % présente un doute et 27 % sont des eaux artificielles ou fortement modifiées. Les eaux artificielles qui ont été fortement modifiées par l'homme ne pourront jamais atteindre l'objectif, précise le rapport.
Le rapport indique encore que les eaux du bassin Artois-Picardie sont polluées à 38 %, celles de Loire-Bretagne à 35 % et celles de Rhin-Meuse à 45 %. Si l'on considère uniquement les eaux souterraines, le bassin de Seine-Normandie est pollué à 83 % et celui de Rhin-Meuse à 69 %.
Certains résultats s'avèrent particulièrement inquiétants comme en Artois-Picardie, où, du fait de l'infiltration de polluants d'origine agricole et industrielle, 100% des eaux souterraines sont classées à risque. Ces eaux sont utilisées entre autres pour l'alimentation en eau potable.
Alors que ces résultats sont plutôt négatifs, ils ne prennent en compte que les micropolluants les plus connus, à savoir nitrates et pesticides. Les micropolluants émergents et les polluants d'origine microbiologique dont les impacts sur la santé humaine, les populations animales et les écosystèmes sont avérés. ont été exclus de l'état des lieux faute de moyens.
Parmi les micropolluants émergents, on peut mentionner les produits pharmaceutiques qui se retrouvent dans les eaux usées par le biais des urines et des effluents hospitaliers ou agricoles, les phtalates (dans les plastiques), les retardateurs de flammes bromés employés dans les équipements électriques et électroniques, les molécules de substitution de pesticides et les dioxines qui proviennent du processus de combustion.
Parmi les polluants d'origine microbiologique, on peut citer les micro algues qui émettent des toxines nuisibles aux organismes aquatiques. Les cyanobactéries (algues bleues vertes ou cyanophycées) sont des micro-organismes photo-autotrophes qui colonisent la majorité des écosystèmes terrestres et aquatiques. Bien qu'elles aient normalement une existence planctonique, les cyanobactéries peuvent former des agrégats vert olive à la surface de l'eau (fleurs d'eau).
En juillet 1998, en Bretagne du Nord, l'estuaire de la Rance a été fermé à la pêche à cause de la présence d'une de ces micro-algues : l'Alexandrium.
Plus récemment, la présence persistante des dinophysis, une micro algue toxique a conduit à interdire pendant 5 semaines la vente des huîtres du bassin d'Arcachon.
Le gouvernement a présenté la nouvelle Loi sur l'eau début avril au parlement, en vue d'atteindre un bon état écologique en 2015. La Directive européenne établissant un cadre communautaire pour la gestion de l'eau avait été transposée en droit français le 21 avril 2004 et associait les citoyens aux décisions à prendre. Dans ce contexte, une consultation nationale sur l'état des lieux et les grands enjeux des cours d'eau, des plans d'eau, des nappes souterraines et des eaux littorales se déroule jusqu'au 2 novembre 2005.