Bien que l'Agence internationale de l'énergie voie une fenêtre d'opportunité dans ce contexte exceptionnel pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, elle redoute une reprise sans grand changement et un retour des émissions à la hausse.
L'AIE a établi 2 scénarios dans le World Energy Outlook 2009 publié le 10 novembre : un scénario de référence décrivant l'évolution des marchés mondiaux de l'énergie business as usual (hors crise), et un scénario 450 dans lequel les pouvoirs publics engagent une action collective pour limiter les concentrations de gaz à effet de serre à 450 ppm. Pour parvenir à ce résultat, l'AIE mise avant tout sur les technologies : nucléaire, énergies renouvelables, captage et stockage de CO2, véhicules décarbonnés sont les solutions préconisées. Sur ces bases, l'agence estime les investissements nécessaires, au niveau mondial et d'ici 2030, à plus de 10.500 milliards de dollars pour les infrastructures énergétiques et les biens d'équipement liés à l'énergie.
Un scénario de référence alarmiste
La consommation énergétique mondiale devrait diminuer en 2009 du fait de la crise financière et économique. Mais selon l'AIE, compte tenu des politiques actuelles, celle-ci devrait repartir rapidement à la hausse sur le long terme une fois la reprise économique amorcée.
Dans le scénario de référence de l'AIE, la demande mondiale d'énergie primaire croît de 1,5 % par an entre 2007 et 2030, soit une hausse totale de 40 %. Les pays en développement (Asie, Moyen-Orient) sont les principaux responsables de cette croissance. Les combustibles fossiles restent les sources d'énergie primaire prédominantes dans le monde, représentant plus des trois quarts de l'augmentation totale de la consommation énergétique. Le charbon connaît la plus forte croissance, suivi du gaz et du pétrole. La demande mondiale d'électricité devrait croître à un taux annuel de 2,5 % d'ici à 2030, principal moteur de la demande de charbon et de gaz.
Les technologies renouvelables (éolien, solaire, géothermie, énergie des marées et des vagues, bio-énergie) affichent la croissance la plus rapide, due à la production d'électricité. Leur part dans la production électrique totale passerait de 2,5 % en 2007 à 8,6 % en 2030. L'éolien progresse le plus et la consommation de biocarburants dans les transports augmente considérablement. La part de l'hydroélectricité, en revanche, passe de 16 % à 14 %.
Une baisse inquiétante des investissements
Les investissements dans le secteur énergétique se sont effondrés en 2008. Dans le secteur du pétrole et du gaz, la plupart des entreprises ont annoncé des réductions de leurs plans d'investissements ainsi que des retards et des annulations des projets, en raison de la baisse de flux de trésorerie. Selon l'AIE, l'investissement dans les énergies renouvelables pourrait chuter de près d'un cinquième en 2009. Une baisse ''limitée'' par les plans de relance nationaux.
L'AIE craint des conséquences considérables pour la sécurité énergétique, le changement climatique et la pauvreté énergétique. L'insuffisance de l'offre pourrait également compromettre la viabilité de la reprise économique.
Si cette tendance se confirme, elle entraînera probablement une dépendance croissante aux combustibles fossiles, et donc une hausse rapide des émissions de GES. L'agence estime que celles-ci pourraient passer de 28,8 Gt en 2007 à 34,5 Gt en 2020 et 40,2 Gt en 2030. Cela mènerait, à long terme, à une concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère supérieure à 1.000 ppm qui provoquerait une hausse de la température moyenne mondiale jusqu'à 6° C.
Scénario 2 : vers une décarbonisation de l'énergie
Un deuxième scénario fixe une voie à emprunter pour limiter à 2°C la hausse des températures. Dans ce scénario, les émissions mondiales de CO2 liées à l'énergie culminent à 30,9 Gt en 2020, pour redescendre à 26,4 Gt en 2030, soit 2,4 Gt en dessous du niveau de 2007.
Selon l'AIE, ''dans les pays non membres de l'OCDE, les politiques nationales actuellement à l'étude et les approches sectorielles adoptées dans les transports et l'industrie donnent lieu à une diminution des émissions de 1,6 Gt. Mais ce recul ne se produira pas sans cadre international adapté''.
La Chine, avec des politiques nationales de réduction des émissions, devrait contribuer à une réduction de 1 Gt. ''Le reste de la réduction nécessaire à l'horizon 2020 est le fait des pays OCDE+, grâce à l'instauration d'un plafond d'émissions dans le secteur électrique et l'industrie, à l'adoption de politiques nationales et au financement par le marché du carbone d'autres mesures de réduction dans les pays non membres de l'OCDE''.
Le scénario 450 prévoit une hausse la demande d'énergie primaire de 20 % entre 2007 et 2030 (+ 0,8 % en moyenne par an, contre 1,5 % dans le scénario de référence). L'efficacité énergétique contribue le plus, en 2030, à la réduction des émissions de CO2. La part des énergies non fossiles dans le bouquet des énergies primaires passe de 19 % en 2007 à 32 % en 2030. A l'exception du charbon, la demande de tous les combustibles est plus élevée en 2030 qu'en 2007.
Le scénario prévoit une réduction de moitié de la production électrique à partir de charbon par rapport au scénario de référence, les parts du nucléaire et des énergies renouvelables quant à elles augmentent considérablement. Dans le scénario, l'utilisation des technologies de capture et stockage du carbone (CSC) dans le secteur électrique et dans l'industrie permet d'éviter 10 % des émissions à l'horizon 2030. Dans le secteur des transports l'utilisation de biocarburants devrait augmenter ainsi que les nouvelles technologies automobiles (véhicules hybrides et électriques).
L'AIE estime à 10.500 milliards de dollars d'ici 2030 l'investissement dans les infrastructures énergétiques et les biens d'équipement liés à l'énergie pour parvenir à l'objectif de 450 ppm.