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La France mal préparée aux risques liés à l'activité tellurique

Les 7 et 8 juillet derniers, l'OPECST a organisé deux auditions publiques liées à la préparation et à la gestion de crise de deux risques naturels majeurs rares en France : le tremblement de terre et l'éruption d'un volcan. États des lieux.

Risques  |    |  C. Saïsset
   
La France mal préparée aux risques liés à l'activité tellurique
Panache de cendres et de vapeur d'eau vu du Sud. Eyjafjöll. Islande, 10 mai 2010
© Patrick Marcel / Association Volcanologique Européenne
   
Le socle français est soumis à une activité sismique de magnitude 1 à 2 maximum 6 par siècle en métropole, de magnitude 1 maximum 8 tous les 200 ans et de 1 maximum 7 tous les 20 ans aux Antilles. Et il y a près de deux siècles que le ciel européen, traversé aujourd'hui par un trafic aérien très dense, n'avait été parcouru par les émissions d'une éruption aussi majeure que celle du « glacier des montagnes des îles » islandaises, le volcan Eyafjöll.

Lors de deux récentes auditions publiques, l'Office Parlementaire d'Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) s'est penché sur ces deux risques naturels majeurs rares. La première de ces auditions a réuni tous les acteurs majeurs de la gestion anticipée du risque de tremblement de terre et de la situation de crise autour de Roland Courteau, sénateur de l'Aude. Il s'agissait de faire un point sur l'état de la préparation de la France face à un tel risque l'année de clôture du premier Plan Séisme (2005-2010), trois ans après la publication du rapport du sénateur : « Tsunamis sur les côtes françaises : un risque certain, une impréparation manifeste ». La seconde de ces auditions a réuni les acteurs concernés par la gestion de crise mi-avril lors de l'alerte Eyafjöll, autour de Christian Kert, député des Bouches-du-Rhône, président du Conseil d'Orientation pour la Prévention des Risques Naturels Majeurs (COPRNM) et de l'Association Française pour la Prévention des Catastrophes Naturelles (AFPCN). Il s'agissait de tirer les leçons de cette crise, onze ans après la publication du rapport du député « Les techniques de prévision et de prévention des risques naturels en France » ; deuxième et dernier rapport de l'OPECST sur la situation de la prévention des catastrophes naturelles en France.

La France face à un tremblement de terre

Le sénateur Roland Courteau retient de l'audition : ''d'une façon générale et malgré le Plan Séisme, la France n'est pas très bien préparée à un tremblement de terre. La population demeure assez indifférente au risque et les constructions restent vulnérables. La sécurité civile est prête, même si des faiblesses subsistent, comme le manque de vecteurs de projections : avions, véhicules de terrain''. La connaissance scientifique du risque sismique est acquise. La réglementation parasismique est quasi-adaptée à la réglementation européenne EC8 (Euro-Code 8) : le nouveau zonage de sismicité du territoire, le décret et les arrêtés d'application indispensables à la mise en oeuvre des Plans de Prévention des Risques Sismiques (PPRs) communaux se font attendre depuis cinq ans. Une interrogation demeure : qui contrôle le respect des constructions contraintes aux normes parasismiques ? ''Le rôle du Contrôleur Technique d'une construction est de contribuer à la prévention des aléas techniques, et non pas de garantir la conformité de l'ouvrage réalisé'', rappelle Marc Granier, directeur technique pour la construction de Bureau Veritas.
Avec le plan séisme Antilles démarré en 2007, le renforcement des bâtiments publics existants a commencé, sur 12 des 500 écoles primaires de Martinique. Le coût de ce programme est estimé à 5 Mds €. ''Ce qui ne veut pas dire que nous ayons reçu cette somme, et la Métropole rien !'', s'exclame Claude Lise, sénateur de la Martinique. Celui-ci tient à souligner l'importance de l'intégration régionale face au risque sismique dans les Antilles et, dans ce cadre, la compétence reconnue des services techniques du CG de la Martinique qu'il préside. ''En Martinique, les gens ont la connaissance du risque, mais il reste beaucoup à faire pour qu'ils s'approprient les recommandations d'action en cas d'alerte'', souligne Ludvina Colbeau-Justin, chercheuse et consultante en gestion sociale des risques. Donner à chacun les moyens de se protéger demande du temps : selon l'évaluation des journées de sensibilisation au risque sismique REPLIK organisées ces cinq dernières années en Martinique, l'amélioration du comportement n'est que de 7%, et les comportements adéquats en cas de crise que de 27%.
Dans son rapport, le sénateur recommandait que la capacité d'auto-contrôle de chacun s'acquière dès la scolarité, dans une approche multi-risques. Il recommandait aussi un centre d'alerte au risque sismique en Méditerranée. Selon les ministères de l'intérieur et du MEEDDM, il verra le jour en mai 2012. ''Mais si l'alerte montante est importante, l'alerte descendante depuis les instances décisionnaires jusqu'aux populations l'est toute autant et qui plus est, doit être concomitante à la première ! '', souligne le sénateur R. Courteau. L'an prochain, le démonstrateur de recherche sur le risque sismique transfrontalier des Pyrénées orientales, déjà opérationnel en Espagne, devrait l'être en France. ''Un des objectifs du programme de recherche ISARD (Information Sismique Automatique Régionale de Dommages) est de produire une note d'information cohérente aux dommages sur le parc immobilier dans le quart d'heure suivant l'alerte. Une première ! '', se réjouit le sénateur.

La France face à un nuage chargé

Hasard du calendrier, l'audition sur « Les leçons de l'éruption du volcan Eyafjöll » s'est tenue le jour de la remise des conclusions sur les conséquences de la tempête Xynthia. Les échanges entre les différents intervenants laissent entendre que la manière dont cette crise a été gérée mériterait, elle aussi, une mission d'enquête parlementaire. Le député Christian Kert retient de cette audition : ''Il y a un manque de dialogue entre les scientifiques, les météorologues, les industriels de l'aéronautique et l'aviation civile, qui ont chacun leurs propres codes et ne se comprennent pas. Il n'y a pas de cohérence entre le besoin d'évaluer le « risque acceptable » exprimé par la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) chargée de la régulation du transport aérien, et la démarche d'appréciation du « risque réel » par les scientifiques et les météorologues''. Quant à l'origine de la valeur seuil (2 μg/m3) de concentration de cendres dans l'air, qui a entraîné la décision de fermer la totalité de l'espace aérien européen le 15 avril, et de l'autre valeur seuil (2 mg/m3) qui a permis un zonage du risque et la réouverture progressive de l'espace aérien ? ''Je ne sais pas d'où elles viennent...'', confie le député en fin de séance. Qui plus est, cette valeur seuil n'a pas été corrélée au temps d'exposition, difficile alors d'évaluer l'aléa du risque...
Pour les industriels de l'aéronautique (Airbus, Snecma), cette valeur est ''sans rapport avec ce que les moteurs d'avion peuvent supporter''. Dans ce contexte, difficile ''d'imaginer un nouveau point de certification des moteurs d'avions de ligne'', comme le leur demande Patrick Gandil, directeur de la DGAC. Et les émissions d'un volcan (cendres, gaz toxique) sont susceptibles de dégrader non seulement les moteurs des avions, mais aussi les pistons, pare-brises, conditionnements d'air et de pressurisation. En outre, s'il existe une check-list « nuage volcanique » de consignes de vol, il n'existe aucun équipement de bord permettant d'en identifier la présence. ''Or pour repérer un nuage volcanique dans un ciel bleu, l'oeil ne sert à rien ! '', rapelle Jocelyn Smykowski, président du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL). Les pilotes de ligne regrettent de ne pas avoir été conviés aux réunions décisionnaires de cette gestion de crise, alors qu'ils sont en première ligne pour assurer la sécurité du transport aérien des passagers. Ils regrettent également que les vols tests effectués pour la DGAC l'aient été par des avions d'Air France. Le crash non expliqué du mirage F1 une semaine avant la crise du nuage de l'Eyafjöll aurait-il un lien avec la discrétion de la Défense ?
''Je suis très inquiet pour la prochaine éruption'', confie Louis Jobard, président du SNPL Air France ALPA. Cet homme préconise de s'inspirer de la structure de surveillance et d'alerte coordonnée, conduite dans un souci d'interaction horizontale y compris des décideurs locaux, et déjà opérationnelle depuis 2004 dans la région très volcanique de l'Alaska. Beaucoup espèrent dans la coordination européenne, tandis qu'une nouvelle éruption menace le ciel européen : celle du volcan islandais Helka connu pour suivre l'Eyafjöll dans les 6 mois à deux ans.

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