Excès de pouvoir
Dans cet avis, l'Afsset recommandait de ne plus installer ou d'aménager d'établissements accueillant des personnes sensibles (hôpitaux, écoles, crèches…) à moins de 100 mètres de lignes à très haute tension (THT), ni d'installer de tels lignes à proximité de ces établissements existants. Or, l'agence avait été saisie par les deux ministères pour évaluer les effets sanitaires des champs électromagnétiques extrêmement basses fréquences, rappellent les auteurs de la lettre ouverte. Ils estiment donc que ces recommandations relèvent d'un ''excès de pouvoir''.
''La direction de l'Afsset non seulement n'a pas respecté son contrat en se focalisant sur les seules lignes à haute tension, mais elle est sortie de ses prérogatives en formulant des recommandations de gestion du risque, sans hésiter pour ce faire à contredire l'avis des experts rédacteurs du rapport''. Celui-ci précise en effet, paradoxalement, que ''les preuves scientifiques d'un possible effet sanitaire à long terme sont insuffisantes pour justifier une modification des valeurs limites d'exposition actuelles''.
En outre, les lignes de transport d'électricité ne représentent que 20% des expositions les plus élevées aux CEM-EBF. L'Afsset aurait d'autant moins dû se ''focaliser'' sur ce thème que la saisine portait sur ''la contribution des différents équipements et situations à l'exposition''.
Rapport introuvable
La lettre ouverte est aussi très critique sur la forme. Ainsi, la publication de l'avis du 6 avril a précédé de deux semaines la publication du rapport d'experts. Ce ''rapport introuvable est une première dans l'histoire de la communication scientifique'', assurent les 8 experts. Ils reprochent à l'Afsset de les avoir ''instrumentalisés comme de simples cautions scientifiques'' et dénoncent ce ''déni de la science'' contribuant ''à inquiéter inutilement les 300.000 riverains des lignes de transport de l'électricité''.
C'est la deuxième fois en quelques mois que l'agence est sous le feu de telles critiques. En décembre 2009, l'Académie nationale de médecine, l'Académie des sciences et l'Académie des technologies avaient dénoncé le rapport de l'Afsset sur les radiofréquences publié en octobre 2009.
Dans un communiqué du jeudi 20 mai, l'agence indique avoir respecté ''scrupuleusement les principes fondamentaux de l'expertise transparente, indépendante et pluridisciplinaire''.
Cette polémique intervient alors que la fusion entre l'Afsset et l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) sera effective d'ici quelques semaines.
* François GAUDAIRE, Anne PERRIN, Marc POUMADERE et Catherine YARDIN, corédacteurs du rapport 2009 sur les radiofréquences ; Henri BRUGERE et Isabelle LAGROYE, corédacteurs du rapport 2010 sur les CM-EBF ; Jean-Claude DEBOUZY et Paolo VECCHIA, corédacteurs de ces deux rapports.