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Agriculture bio : les défis à relever face à la croissance

Construire une agriculture biologique qui a du sens pour les consommateurs, qui rémunère ses producteurs et accentuer l'effort de recherche et d'innovation. Tels sont les défis que doit relever le secteur pour s'inscrire dans une croissance durable.

La bio est à la croisée des chemins. Aujourd'hui, l'ensemble des signaux sont au vert : consommation, production, conversions. Mais si les acteurs se laissent griser par ce succès, ils risquent de rater une étape essentielle : la consolidation du marché bio, prérequis à une croissance durable. C'est le message qu'a tenu à faire passer Stéphane Le Foll, lors des assises nationales de l'agriculture biologique, organisées le 14 novembre par l'Agence bio.

"Le débat qui se déroule actuellement à l'échelle européenne me frappe : si on est juste sur une logique de conquête de marché, on perd le sens de la bio. Vouloir labelliser en bio des élevages sans lien avec le sol et l'herbe pose question. Ils vont nous faire de la bio en boîte !", a insisté le ministre de l'Agriculture, faisant référence à un projet de tour maraîchère à New-York.

Les discussions autour de la révision du règlement bio opposent en effet deux visions de cette agriculture. La première, révélée par une consultation publique menée par la Commission européenne auprès des consommateurs, plaide pour un retour aux fondamentaux et des critères stricts. La deuxième défend une ouverture de la bio à l'agriculture hors sol, aux exploitations produisant à la fois du bio et du conventionnel… "Ce choix est stratégique" et conditionnera l'avenir de l'agriculture biologique, prévient Stéphane Le Foll. A trop chercher de nouvelles parts de marché, la bio risque de se perdre, a-t-il martelé. Un point de vue partagé par une majorité des participants à cette matinée d'échange. "La bio est aussi une philosophie, pas seulement un marché", a résumé Florent Guhl, directeur de l'Agence bio.

Les œufs bio, l'exemple à ne pas suivre

Le contre-exemple, c'est le marché des œufs bio qui a connu une croissance de 15% en 2015. Produit d'appel de la grande distribution, il séduit de nombreux consommateurs. "Mais les agriculteurs ont du mal à vivre de cette production, les prix sont trop bas aujourd'hui, malgré une sous-production par rapport à la demande", alerte Bernard Devoucoux, agriculteur dans l'Allier et président de la commission bio du Syndicat des labels avicoles de France (Synalaf). Le problème : l'arrivée d'élevages hors normes sur ce marché. "Il n'y a pas de limitation de la taille des élevages dans la réglementation européenne. Pourtant, ce qui se développe aujourd'hui ne correspond pas à l'image que l'on se fait de la bio", souligne cet exploitant.

Ce qui se produit dans l'aviculture bio pourrait bien se produire ailleurs… Quelle que soit la filière, l'agriculture biologique enregistre en effet de nombreuses conversions. Les acteurs historiques du bio craignent que l'arrivée massive de nouveaux acteurs, séduits par la croissance à deux chiffres de ce marché, ne vienne trahir l'esprit du bio. "Il ne faut pas que ça se limite à une opportunité à un moment donné parce que, par exemple, le secteur laitier est en crise. Il faut que ces conversions s'inscrivent dans la durée", estime Stéphane Le Foll.

Construire des débouchés durables

Selon les représentants des différentes filières, pour transformer ces essais en réussites durables, il faut construire les filières amont et aval. Cela passe notamment par le développement de débouchés, à un niveau de prix rémunérateur.

"Au cours du premier semestre 2016, il y a eu beaucoup de conversions débutées. Les produits arriveront sur le marché d'ici deux-trois ans, il faut donc viser une adéquation de l'offre et de la demande", analyse Caroline Le Poultier, directrice générale du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (CNIEL). Cela passe par le développement de nouveaux segments, et notamment celui des fromages. Même problématique pour le porc bio : "Il faut anticiper la production de demain et construire tous les maillons de la chaîne au niveau de la transformation" et, par exemple, la charcuterie.

La forte hausse des conversions en grandes cultures devrait conduire à l'autosuffisance en céréales bio en 2018. Mais s'il y a une forte demande en farines locales, la filière doit aussi anticiper les évolutions du marché : "Les Français mangent de moins en moins de pain. Les goûts changent, les demandes augmentent pour des farines différentes : seigle, épeautre...".

Lever les freins techniques par la R&D et l'innovation

En parallèle, il faut aussi accentuer les efforts de recherche pour améliorer les productions. Par exemple, "si la viticulture bio est poussée par les consommateurs", des freins techniques persistent, notamment dans la lutte contre la flavescence dorée et le black rot. "Il faut favoriser la R&D", estime Jean-Fred Coste, viticulteur dans la Gard et administrateur de FranceVinBio.Selon Fabien Bova, directeur du conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), certaines régions sont particulièrement touchées : "A Bordeaux, la pression parasitaire est forte. Cette année, la quasi-totalité du cuivre utilisable sur une période de cinq ans a été mobilisée par certains producteurs".

Les éleveurs souhaitent quant à eux la construction de filières d'alimentation locales, notamment de protéines, puisque la réglementation exige une majorité d'approvisionnement local pour le bétail. "Pour la production de poulet, nous avons des difficultés à trouver les matières premières. Il faut développer davantage le concentré protéique de luzerne, le gluten de pomme de terre ou les farines d'insectes. Sur ce dernier segment, deux ou trois sociétés seraient prêtes à se lancer en France, il faut les soutenir", indique le représentant des aviculteurs, Bernard Devoucoux. "Il faut tendre vers l'autonomie alimentaire", estime également le représentant d'Interbev.

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