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''Aujourd'hui, il importe de traiter deux choses dans les D3E : la dépollution d'abord, le recyclage ensuite''

Michel Valache est le « monsieur D3E » de Veolia Propreté. Directeur de VP et président de la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement (FNADE) sur la région Ile-de-France, il préside la filiale Triade Électronique dédiée à l'activité DEEE. Avec quinze ans de recul, il fait le point sur l'état de la filière.

Interview  |  Déchets  |    |  C. Saïsset
   
''Aujourd'hui, il importe de traiter deux choses dans les D3E : la dépollution d'abord, le recyclage ensuite''

   
AE : Ce 15 novembre 2008, nous fêtons en France les trois ans de mise en place de la filière des déchets d'équipements électriques et électroniques (D3E), impulsée par une réglementation nationale adoptée avec trois ans de retard sur les directives européennes. Comment appréciez-vous l'évolution ?
Michel Valache :
Nous considérons que la filière a vraiment démarré avec la mise en œuvre de la Responsabilité Élargie des Producteurs (REP) sur les D3E : le principe de la reprise « un pour un » des produits en fin de vie, la taxe d'éco-contribution payée à l'achat d'un nouvel EEE, etc. Et aussi avec l'implication dans cette filière de trois éco-organismes généralistes, d'un spécialisé dans les lampes, et de l'organisme OCAD3E chargé de la régulation des marchés des éco-organismes auprès des collectivités et de l'indemnisation du système de collecte des D3E auprès des ménages. En fait, la filière a véritablement démarré il y a un an. Et au premier semestre de cette année, nous avons atteint 3,7 kg/hab/an de D3E collectés, soit quasiment l'objectif de 4 kg/hab/an prévu pour 2006. C'est une véritable prouesse ! Le démarrage de la filière de gestion des déchets d'emballage avait été beaucoup plus long.

AE : Pourtant, l'Ademe a récemment annoncé que nous sommes encore loin de cet objectif de collecte de 4 kg/hab/an des D3E. Comment l'expliquez-vous ?
MV :
Les résultats de l'Ademe auxquels vous faites référence concernent l'année 2007. Ils portent sur les D3E issus des ménages dont le flux représente 50 % d'une production totale estimée à 1,7 millions de tonnes par an. Les filières des D3E dits professionnels, produits par les fabricants et les industriels du secteur, sont soutenues non par des éco-organismes mais par les producteurs eux-mêmes, dont certains avaient anticipé sur la réglementation. Nous-mêmes, nous traitons les D3E depuis quinze ans, avec conscience que cette typologie de déchets ne resterait pas un déchet banal. Actuellement, nous gérons un flux global annuel d'un million de tonnes de D3E. Nous avons une part significative des marchés des éco-organismes pour la collecte et le traitement des D3E issus des ménages. Dans chaque département, nous avons des centres de regroupement de D3E issus des petits détenteurs (entreprises, etc.). Et nous venons d'inaugurer à Angers notre troisième grand centre de traitement des D3E, après ceux de Gonesse et de Montpellier.

AE : Cette capacité vous incite-t-elle à vous tourner vers une offre de traitement de D3E issus d'autres Etats-membres ?
MV :
À ce stade, il nous faut d'abord traiter les D3E produits en France avec un souci de gestion de proximité. Après, on se posera peut-être la question d'optimiser la production des unités de traitement.

AE : Les points de collecte de D3E semblent moins saturés que ceux des piles et accumulateurs que l'on voit souvent déborder, comme si la filière s'arrêtait là. Était ce facile de rendre opérationnelles les infrastructures de traitement des D3E ?
MV :
Surtout, pour obtenir le référencement d'un éco-organisme ou encore l'attribution d'un marché de collecte de D3E pour le compte d'un éco-organisme, cela suppose qu'il y ait derrière une infrastructure de traitement également agréée. Il a fallu modifier les sites de traitement déjà existants en créant des unités dédiées aux D3E. Mais les ferrailleurs s'intéressaient déjà aux EEE usagés, compte tenu de leur poids en ferraille : 60 % du tonnage dans les produits blancs (machines à laver, réfrigérateurs, etc.). Maintenant, ils ont l'obligation de disposer d'unités de traitement des mousses des réfrigérateurs chargées en CFC. Aujourd'hui, il importe de traiter deux choses dans les D3E : la dépollution d'abord, le recyclage ensuite. Qu'on soit ferrailleur ou traiteur, on devient recycleur.

AE : Quel est le traitement adapté aux composants électroniques usagés : un broyage suivi d'une mise en décharge ?
MV :
La dépollution, c'est enlever les composants dangereux qu'on ne peut pas traiter avec le recyclage : piles, accumulateurs, condensateurs, etc. Ces déchets dangereux sont envoyés dans des usines de traitement dédiées. Ainsi, on neutralise le produit pour pouvoir le recycler. La mise en décharge n'est qu'une conséquence résiduelle qui ne concerne pas les déchets dangereux.

AE : Le fait qu'il y ait plusieurs éco-organismes pour la gestion des D3E issus des ménages, est-ce un frein au développement de la filière ?
MV :
C'est principalement aux producteurs qu'il convient d'apporter la réponse, puisque ce sont eux qui ont fait le choix de plusieurs éco-organismes représentant leurs intérêts. C'est vrai qu'il n'y en a qu'un seul dans la filière des déchets d'emballage. Ça pose question. Mais nous n'avons pas de choix à faire là-dessus. Ce qui nous importe, c'est de capter et de traiter les produits, ce qui suppose d'investir et donc de pouvoir s'appuyer sur des contrats stables.

AE : L'amélioration de la valorisation des D3E passe-t-elle par la mise en place d'un marquage du montage avec indication des composants, à l'intérieur de la carcasse des EEE, à l'abri du regard du consommateur ?
MV :
Aujourd'hui, les concepteurs de produits sont sensibilisés à la capacité de pouvoir ou non démonter l'appareil, de déconstruire le produit en fin de vie. C'est le fruit des démarches d'écoconception. L'écran plat, marché qui explose et fera disparaître d'ici 8 à 10 ans celui des écrans cathodiques, c'est l'archétype du produit sur lequel nous travaillons aujourd'hui pour définir des technologies de dépollution industrielles au moindre coût et en fonction du prix de revient du fabricant. Le marquage des composants est une bonne chose dans l'absolu, en terme de traçabilité. On a déjà dépollué et détruit de grandes séries de produits de fournisseurs, en créant des unités dédiées pour cela. Mais la diversité des marques et les volumes à traiter des produits grands publics ne le permettent pas. Sur les grands flux, il faut trouver d'autres solutions. Alors pour les PAM (Petits appareils en mélange), les téléphones portables, les lecteurs MP3, etc., nous nous orientons vers du tri de plus en plus fin, jusqu'au centimètre, en appliquant des techniques de reconnaissance optique et de détection électronique. L'évolution du métier passe inévitablement par le recours aux techniques d'imagerie et surtout d'éjection.

AE : La diversité même des composants des produits ne présente-t-elle pas un frein à l'usage des techniques d'imagerie pour le recyclage matière ?
MV :
Non, car les techniques de reconnaissance ont fait des progrès considérables. En effet, prenons l'exemple des composants plastiques dont la variété est multiple. Nous avons créé une base de données de molécules plastiques pour en améliorer la reconnaissance et le recyclage, sachant que la plupart des plastiques ne sont pas miscibles : on ne peut les mélanger pour faire un nouveau produit avec garantie des caractéristiques techniques. Alors bien sûr, il reste la valorisation énergétique en combustible de substitution. Mais pour atteindre une seconde vie des matériaux, il faut pouvoir séparer les différents composants et cela coûte cher. Sans être directif, on essaie d'encourager les fabricants à aller vers une standardisation des composants. Les fabricants d'automobile ont bien abandonné le PVC en raison de la présence de chlore.

AE : Ces derniers temps, on observe une sécurisation de l'accès aux décheteries. Est ce lié à leur équipement en points de collecte de D3E ?
MV :
Les décheteries ont toujours été plus ou moins visitées. Mais aujourd'hui, l'apport de matériels bien séparés, aux matériaux à forte valeur ajoutée dont les cours ont été forts il y à peu, ça attise les convoitises. Mais un D3E vamparisé n'est plus D3E… Ce phénomène nuit à la rentabilité de la filière mais aussi à sa qualité, car on ne sait pas où partent les produits. Alors oui, ces espaces se sécurisent. Et en même temps, ils doivent rester un lieu de fréquentation serein pour les habitants. Sans hyper-gardienner les déchèteries, il va falloir mettre en place des systèmes de sécurité discrets mais efficaces. Ça va coûter un peu.

AE : Depuis toujours, en une ultime nécessité, les plus pauvres ont su trouver un peu de richesse dans les déchets. L'organisation de la filière des D3E laisse-t-elle encore place à la participation du monde des exclus ?
MV :
Faire travailler le monde associatif comme Emmaüs ou le réseau Envie, cela fait partie des obligations des éco-organismes. Au sein de la filiale Triade Électronique, nous avons créé une entité dédiée à l'emploi de personnes handicapées : Triade Avenir, qui compte trois sociétés régionales et une centaine de salariés. Dans ce secteur, il y a aussi des emplois possibles pour les personnes en situation d'insertion socio-professionnelle. Nous nous considérons dans une suite logique pour l'emploi de ces personnes qui ont effectué un parcours d'insertion dans une Entreprise d'Insertion (EI). C'est pourquoi nous préférons passer des partenariats avec des EI en leur permettant de s'installer sur nos sites pour qu'elles y encadrent directement leur personnel. Le monde des déchets a souvent proposé des emplois sans qualification. Aujourd'hui, nous pouvons faire évoluer les conditions de travail de nos collaborateurs en leur permettant d'accéder à un vrai métier et d'évoluer. Le métier ne consiste plus seulement à rester sur une table de tri, mais aussi à surveiller un écran ou à manipuler des appareils. Nous veillons à ne pas créer de conflits d'intérêts entre le développement des emplois, la professionnalisation du personnel et la modernisation des installations. C'est vraiment une posture à laquelle je tiens.

Réactions2 réactions à cet article

recyclage des cartes électroniques

Je suis professeur d'électronique et je vous assure que vu la diversité des composants présents sur une carte mère d'ordinateur par exemple il est complétement faux de dire que l'on recycle les composants. Ils sont soit mis en décharge ou envoyés dans les pays sous-developpés.
S'il existe des usines de recyclage je suis curieux de savoir où elles se trouvent.

Air Vigilance | 20 novembre 2008 à 11h55 Signaler un contenu inapproprié
Le vrai problème

Le vrai problème, Mrs Michel Valache, est la surconsommation. Je sais que ça ne fait pas l'affaire de beaucoup de gens, mais c'est ainsi il faut réduire à la source. Les centres de tri ne savent plus quoi faire, la planète est épuisée, l'air n'est plus respirable, les cours d'eau sont pollués, les animaux meurent, les hopitaux débordent, Soyons intelligent et réduisons notre consommation de ces choses superflus.
Enfin, regardons nous dans les yeux comme des humains.

Merci Gaétan Racine musicien/chanteur et ami de la terre

Anonyme | 01 décembre 2008 à 00h15 Signaler un contenu inapproprié

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