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La biodiversité, nouvel enjeu du bâtiment durable

L'architecture de demain devra être végétale pour répondre aux besoins de confort climatique des habitants. Plusieurs exemples présentés au Congrès du bâtiment durable démontrent qu'il est déjà possible de verdir efficacement les constructions.

Bâtiment  |    |  A. Sinaï

De la canicule aux grands froids, l'architecture peut-elle construire avec les climats ? Réuni à Marseille (Bouches-du-Rhône) du 14 au 16 septembre, le 5ème congrès national du bâtiment durable a rassemblé quelque 400 participants. Un succès pour ces professionnels, sous l'égide de l'association EnvirobatBDM (Bâtiments durables méditerranéens), qui, depuis 2009, mène des actions de sensibilisation en faveur des pratiques écoresponsables auprès des acteurs de l'aménagement et de la construction. Aujourd'hui, EnvirobatBDM peut se targuer de 300 projets labellisés BDM, cumulant une surface d'un million de mètres carrés, présentés lors du congrès (1) .

La biodiversité peut-elle contribuer à renforcer le confort climatique des habitations ? La relation ville-climat est connue depuis toujours par les architectures vernaculaires, qui épousent les caractéristiques bioclimatiques d'une localité en utilisant pour la construction des ressources locales et en positionnant le bâti de manière harmonieuse par rapport à la topographie et la trajectoire du soleil. Or à l'époque industrielle, "les évolutions techniques dans le bâtiment ont permis de ne plus s'occuper du climat grâce à la technique et au bas coût de l'énergie", souligne Morgane Colombert, responsable du pôle énergie-climat à l'Ecole des ingénieurs de la Ville de Paris.

Le végétal régule le climat urbain

Aujourd'hui, l'architecte a une double responsabilité : créer un bâti qui, par sa sobriété, ne concourt pas au réchauffement climatique, et protéger les habitants des écarts de température (2) à venir. Il faut donc, face aux incertitudes climatiques, s'orienter vers une "gestion adaptative", selon les termes de Céline Philipps, de l'Ademe service climat, au sein de "zones climatiques locales". Yves Bidet, ingénieur Météo France Sud Est explique qu' "en modifiant tout le pourtour de Paris, on peut gagner 2 à 3°C." Dans le cadre du Grand Paris, une consultation internationale propose d'ailleurs un scénario "-2°C, grand paysage et confort métropolitain", qui vise à réduire les températures de 2 à 3°C dans l'agglomération parisienne en jouant sur deux variables : les matériaux réfléchissants et la forêt sur le pourtour de la capitale. Il s'agit de projeter un "paysage urbain régional" qui crée un micro-climat rafraîchissant.

Basé à l'île de La Réunion, l'architecte-écologue Michel Reynaud veut quant à lui, mettre l'arbre au cœur de l'architecture tropicale : "La clé est dans la restauration écologique de notre monde par le végétal. A La Réunion, le climat s'est réchauffé à cause de la déforestation et des constructions en dur. Autrefois, la géographie intervenait, à travers la prise en compte des cycles de l'eau, selon une approche empirique des données d'un territoire. Il faut revenir à une gestion holistique des ressources. C'est dans ce sens qu'il faut comprendre la biodiversité : comme une science des interactions."

Un projet avant-gardiste

Situé sur la commune de Sainte-Marie (Réunion), le projet Beauséjour, quartier de 2.300 logements en cours de construction, se veut un projet éco-citoyen, ancré dans le génie du lieu et son âme créole. Là où la canne à sucre a détruit la forêt, il s'agit de recréer un biotope où le bâti s'immerge dans une forêt urbaine composée de flore endémique. C'est un opérateur privé, l'aménageur CBo Territoria coté en bourse auprès de 9.000 actionnaires, qui a pris le risque d'investir 600 millions d'euros sur dix ans dans cette opération d'aménagement de 68 hectares. Et s'engage à mobiliser ses fonds propres à hauteur de 50 millions d'euros pour la partie aménagement du projet, voirie, réseaux, infrastructures. Le surcoût du projet est estimé à 5.000 euros par logement.

L'effet du végétal sur la température ambiante est sensible : moins 6°C dans l'air et moins 8°C au niveau du sol. Beauséjour se veut un exemple de bioclimatisme, où la végétation régule l'humidité et assure un confort thermique permanent. La gestion des eaux pluviales est la clé de l'implantation durable des jardins forestiers enserrant les immeubles. Le quartier épouse les courbes de niveau, conçues sur le modèle d'une rizière pour recueillir les eaux de pluie, canalisées vers des impluvium selon une topographie combinant l'eau et le végétal, explique le paysagiste Didier Larue, responsable du projet qui plaide pour "désimperméabiliser" l'urbain : "La forêt est surtout un sol : elle reconstitue l'humus, assure la rétention d'eau. Il faut donc envahir le bâti, les trottoirs servent à recueillir la pluie pour alimenter des fosses de plantations continues qui passent sous la route pour que l'arbre puisse s'étaler."

L'évapotranspiration assure la fraîcheur. Comme à Singapour, où les dessous d'immeubles sont envahis de végétation, il s'agit de créer une rue tropicale, dans le cadre de cette "ville frugale et durable" qui se veut bien plus qu'un éco-quartier (3) . "Collecter, ralentir, infiltrer, épurer, arroser" est ici un slogan. Diversité des essences – plus de 150 -, strates végétales, priorités aux endémiques, vont ici fabriquer une canopée. Le hic : il faudra du temps. Au moins cinq ans. Et la maintenance est délicate, mais crée des emplois locaux.

Créer de la résilience urbaine

En France, une multitude de microlieux s'inscrivent dans leurs correspondances végétales. Pour François Navarro, paysagiste à Grasse (Alpes-Maritimes) qui a créé une faille végétale dans le parking B de Nice (Alpes-Maritimes), il s'agit d'"instaurer une flore mellifère, une nouvelle mixité, décloisonner". Parkings drainants, clairières conservées au milieu des bâtiments, habillage des toits avec des végétaux adaptés, plantes fruitières, préservation de l'eau par la couverture du sol, bassins de rétention, façades conçues pour servir de nichoir aux chauve-souris, murs en gabions transformés en refuges pour les insectes et plantes sauvages... Toute démarche uniformiste serait inadaptée. Le confort s'obtient par le boisement, par la ville-forêt.

Il s'agit aussi de créer de la résilience urbaine. A Marseille (Bouches-du-Rhône), Eiffage développe le projet Smartseille qui recourt à des champignons dépollueurs afin d'assurer la remédiation des sols, contaminés aux hydrocarbures, naphtalènes et cyanure, explique l'architecte Gil Burban du cabinet Polypop. A Colombes (Hauts-de-Seine), une "agrocité", prototype d'unité d'agriculture urbaine civique, consiste en une micro-ferme expérimentale, des jardins collectifs, des espaces pédagogiques et culturels et des dispositifs de production énergétique, de compostage et de collecte, dans le cadre d'une "stratégie urbaine participative" portée par le projet R-Urban, qui se veut un réseau de résilience et de biodiversité soutenu par l'Atelier d'architecture autogérée. En Ile-de-France, l'Agence régionale de l'environnement et des nouvelles énergies (Arene) promeut une filière chanvre régionale afin de développer des matériaux de construction produits en circuits courts. Les initiatives se multiplient. Reste à consolider ce changement de paradigme.

1. Dans l'ouvrage Architecture méditerranéenne d'aujourd'hui par Dominique Gauzin-Muller et Frédéric Corset, Museo Editions, 2016. 2. Voir notre dossier ilots de chaleur.
https://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/ilots-chaleur/ville.php
3. Lire à ce sujet l'ouvrage de Dominique Gauzin-Müller,

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