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Blockchain et énergie solaire veulent promettre ensemble une "révolution énergétique"

Des projets associent de plus en plus panneaux photovoltaïques et blockchain pour permettre d'autoproduire et de consommer sa propre électricité. La levée de nombreux obstacles au développement du secteur provoque un grand enthousiasme, à tempérer…

Energie  |    |  G. Krempp

"Une révolution en trois D : Digitalisation, Décentralisation et Décarbonisation". La formule de Didier Lafaille, chef du département technique à la Commission de régulation de l'énergie (Cre), est efficace. André Joffre, PDG du groupe Tecsol, la reprend volontiers lors d'un colloque sur l'autoconsommation et la blockchain, organisé par le bureau d'études le 26 octobre. L'événement a fait salle comble, démontrant ainsi le fort intérêt économique suscité par ce mélange entre technologie numérique et production d'énergie solaire.

"Un marché extrêmement récent"

Si la puissance solaire raccordée au réseau est passée de 4 MW en 2006 à 6.547 MW en juin 2016, l'autoconsommation de cette même énergie est un phénomène qui n'a pris de l'ampleur que récemment en France. Les obstacles au développement de la filière ont été progressivement levés. Caroline Plaza, directrice technique de la start-up Sunchain, créée en mai 2016, voit "la baisse des coûts d'installation" comme un premier facteur positif. D'après les méthodes de calcul de l'association européenne de l'industrie photovoltaïque (EPIA) et le cabinet AT Kearney, la compétitivité de l'énergie solaire pourrait être atteinte avant 2020 en France.

A une conjoncture économique favorable s'ajoute un soutien du législateur à la filière, consacré par l'ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l'autoconsommation d'électricité. Les obstacles règlementaires à ce type de dispositif ont ainsi pu être levés. Dans le tissu entrepreneurial, on reconnaît l'effet libérateur qu'a eu ce texte : "le marché est extrêmement récent puisque la réglementation sur le raccordement au réseau électrique a été promulguée en juillet dernier", affirme Mathieu Jacquot, gérant de la start-up Ecosolar, mise sur pieds en août dernier.

Enfin, les mentalités semblent elles-aussi prêtes à soutenir ce type de production énergétique. D'après une enquête du syndicat des professionnels de l'énergie solaire, Enerplan, 60% des français se déclarent prêts à équiper leur domicile de panneaux photovoltaïques.

La blockchain : une question de traçabilité

La blockchain parachève cet ensemble de conditions favorables en apportant une innovation séduisante pour les investisseurs. Cette technologie digitale doit permettre de stocker et de transmettre des informations de façon transparente, sécurisée et décentralisée. Pour décrire ce dispositif, les mots du mathématicien Jean-Paul Delahaye sont souvent repris. La blockchain serait finalement "un très grand cahier, que tout le monde peut lire librement, gratuitement, sur lequel tout le monde peut écrire, qui est impossible à effacer et indestructible".

Chez Sunchain par exemple, cette technologie sera utilisée comme un registre. Elle permettra de certifier l'origine de l'électricité verte de façon entièrement automatisée. Un capteur installé sur les panneaux solaires émettra les informations sur l'énergie produite. Que l'électricité d'origine photovoltaïque soit directement consommée ou vendue, la blockchain enregistre son évolution. L'avantage : les informations sont distribuées chez chaque membre de la blockchain, d'où la transparence du dispositif. Et son inviolabilité, car il est plus aisé de hacker une base de données centralisée que des informations sécurisées distribuées en plusieurs endroits. A quoi s'ajoute l'indépendance du système vis-à-vis de tiers, type certificateur ou notaire, pour valider les échanges. Un élément crucial des business model de ces start-up qui misent sur des coûts de transaction très peu élevés grâce à ce système informatique.

Sunchain développe son dispositif pour le Conseil départemental des Pyrénées orientales sur un ensemble immobilier qui devra entièrement produire l'énergie qu'il consomme. Caroline Plaza voit déjà d'autres applications potentielles pour Sunchain : "la blockchain nous permettra notamment d'introduire plus facilement l'autoconsommation d'énergie solaire dans des logements sociaux ou de recharger nos véhicules électriques en payant simplement le coût d'acheminement de l'électricité". Dans tous ces projets, le défi est le même : mettre en place un dispositif raccordé au réseau électrique tout en garantissant la possibilité de tracer l'énergie solaire produite. Car cette énergie seule ne suffira pas toujours pour couvrir les besoins énergétiques de l'ensemble immobilier concerné ou elle ne sera pas toujours totalement consommée. Dans ce second cas, l'énergie produite est partiellement injectée sur le réseau. Sebastien Couture, cofondateur de Stratum, une start-up créée il y a un an, doit ainsi "démontrer la traçabilité d'un smart-grid grâce à notre blockchain" dans le cadre du projet, lancé par Bouygues Constrution, pour le quartier de Lyon Confluence.

"Eviter les promesses irréalisables"

Si à l'aune des entrepreneurs, l'avenir de l'association entre digital et solaire paraît radieux, d'autres pensent bon de garder une méfiance face aux promesses. Ainsi Philippe Dewost, directeur adjoint, chargé de l'économie numérique et du financement des entreprises à la Caisse des Dépôts et Consignations, reste sur ses gardes : "dans le domaine énergétique, nous avons plutôt un potentiel qu'une réalité pour l'instant […] Il faut éviter les promesses irréalisables".

Comme le concède le site BlockchainFrance, cette technologie n'est pas exempte "de défis et de limites qu'elles soient économiques […] ou encore écologiques”. Pour rappel, la blockchain Bitcoin, plus communément appelée Blockchain B, est la première application de ce système informatique à la monnaie numérique, le Bitcoin. Son fonctionnement se base sur la résolution constante d'équations par de grandes puissances de calcul ("proof-of-work"). Ce travail d'ordinateurs extrêmement performants nécessitait en 2014 l'équivalent de la consommation électrique de l'Irlande. Au niveau global, le numérique absorbe quant à lui l'équivalent énergétique de l'aviation, d'après l'ouvrage "La face cachée du numérique". Si les acteurs du numérique, tels que le cofondateur de Stratum, concède "ne pas être expert en énergie", d'autres, comme Caroline Plaza, se montrent plus rassurants : "nous prenons en compte l'aspect énergétique dans la conception de notre blockchain et souhaitons éviter l'aspect énergivore de la blockchain Bitcoin".

François Jarrige, historien et auteur de l'ouvrage Techno-critiques, décèle derrière cette relation entre énergies renouvelables et technologies numériques, un "mouvement de légitimation réciproque. L'utilisation d'outils numériques est justifiée par le fait que l'énergie est dite "propre" tout en permettant une plus grande efficacité dans la consommation énergétique". Au-delà de cette "plus grande efficacité dans la consommation", Philippe Bihouix, auteur de "L'âge des low tech", critique plutôt des "innovations […] basée sur des métaux moins répandus […] et des composants high tech plus durs à recycler".

Une fuite du vrai problème ?

Marc Jedlizcka, directeur de l'association Hespul, voit d'un œil très critique l'émulation autour de la blockchain et de l'autoconsommation. Le problème n'est, selon lui, pas dans l'aspect énergivore de ces outils développés. Il tacle plutôt les acteurs "tentés par une utilisation du réseau de distribution d'Enedis en passager clandestin, sans payer une participation à son entretien". Concernant la transition énergétique, la solution n'est pas à chercher du côté des innovations techniques, selon le directeur d'Hespul. Ce dernier voit "le véritable enjeu [dans] la réappropriation du réseau par les collectivités locales. C'est là que l'aspect politique se révèle un obstacle majeur. L'engouement médiatico-politique pour la blockchain, c'est aussi une manière de fuir le vrai problème. Car 70% des besoins du secteur tertiaire peuvent être couverts par l'autoconsommation mais on est loin du compte pour les logements individuels". N'en déplaise aux entrepreneurs du digital, la révolution dans le domaine énergétique n'est pas encore en passe d'être numérique.

Réactions2 réactions à cet article

Bonjour Monsieur/Madame

Je Lucien Y Abouya, fondateur de The ChicBon,Inc et une autre entreprise d’énergie solaire a Abidjan, Cote D'Ivoire.
Ce genre de discours sonne bien pour moi et mes associes. L'Afrique Francophone ne croit pas encore a l’énergie solaire. Et elle a raison. Elle a encore plus besoin de voir. Nous proposons des produits allemands et Chinois. Toute initiative de France nous intéresse avant de perdre tous nos moyens.

Lucien Y. Abouya | 24 novembre 2016 à 11h04 Signaler un contenu inapproprié

Bravo pour cet article qui aborde un sujet ardu et avant-gardiste, c'est très clair et équilibré.

Mathilde | 02 décembre 2016 à 12h00 Signaler un contenu inapproprié

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