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Captage et stockage du CO2 : des verrous persistent

Les procédés de captage et stockage du CO2 sont au cœur de plusieurs programmes de recherche français. Optimisation du procédé de captage, caractérisation des zones de stockage et même acceptabilité de cette technologie sont à l'étude.

Energie  |    |  C. Cygler
   
Captage et stockage du CO<sub>2</sub> : des verrous persistent
© Marco Dufour
   

Mardi 20 septembre, les débats Bip Enerpresse ont accueilli le Club CO2 qui rassemble des entreprises, des laboratoires et l'Ademe autour d'un thème d'avenir : le captage et stockage du CO2. Une occasion de faire le point sur le développement de cette technologie qui représente un enjeu majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique.

En effet, pour lutter contre l'augmentation des émissions de CO2, plusieurs actions sont actuellement mises en place comme l'amélioration de l'efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables. Au même titre que ces premières solutions, la technique de captage et du stockage du CO2 (CSC) peut également être un facteur clé face au changement climatique. Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), le CSC pourrait contribuer à hauteur de 19 % à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au niveau mondial d'ici 2050, soit environ 5 gigatonnes de CO2 par an à cette date. L'objectif global est de diminuer de 50 % les émissions mondiales de CO2 d'ici à 2050 pour limiter à 2 °C l'augmentation de température moyenne à l'horizon 2100, seuil considéré comme critique pour l'homme et l'environnement. Pour arriver à respecter cet objectif, divisé par deux à l'échelle du monde les émissions de GES et par quatre pour les pays industrialisés, de nombreux programmes scientifiques portant sur le CSC ont été lancés ces dernières années. En France, ces programmes de recherche mis en place, et financé en partie par le Fonds démonstrateurs de recherche, visent avant tout à tester et valider les technologies de captage (pré-combustion, oxycombustion, post-combustion) et de stockage qui en sont, pour l'instant, qu'à leur balbutiement.

Etat des lieux des différents projets français de recherche

Réunis autour de François Moisan, Directeur exécutif de l'Ademe et Président du Club CO2, des industriels comme EDF ou ArcelorMittal ainsi que des institutionnels étaient présents pour faire un point sur l'état d'avancement des trois premiers démonstrateurs. "Pour l'instant, les projets sont au stade de démonstrateur afin de prouver la pertinence de la technologie, avant de lancer de façon plus industrielle dans quelques années", explique François Moisan. Avec des objectifs et des approches différents, ces sites pilotes offrent une possibilité de tester diverses technologies et également de surmonter certains verrous technologiques.

Le choix du site de stockage

Outre la technologie, le potentiel des sites de stockage est également étudié. Porté par Total, le projet France Nord a pour objectif d'étudier la possibilité d'implanter dans le bassin sédimentaire du Centre-nord une infrastructure pilote de transport et stockage de CO2. Jusqu'à la mi-2012, la phase 1 de ce projet devra définir un site aquifère selon cinq critères : la salinité, la profondeur, l'étanchéité, l'absence de conflit d'usage et sa capacité à absorber des quantités industrielles de gaz. "Trois formations géologiques favorables ont été déjà identifiées : le Keuper, le Dogger et le Bundstanstein. Il faudra désormais les hiérarchiser avant de débuter la deuxième phase", détaille Gérard Moutet, Directeur Climat-Energie de Total. Cette seconde étape commencera par une phase de concertation et de demande de permis qui prendra au moins deux années. La construction et le forage du site pourraient ainsi intervenir en 2015.

Baptisé Ulcos pour Ultra-Low CO2 Steelmaking, le projet porté par ArcelorMittal est, pour l'instant, celui qui apparaît comme le plus avancé. Il prévoit le lancement prochain d'un démonstrateur de recyclage des gaz et de captage de CO2 installé sur le haut fourneau du site sidérurgique de Florange en Lorraine. Pour en arriver là, les équipes scientifiques d'ArcelorMittal et de ses partenaires ont évalué pendant plus de sept ans une centaine de procédés. Quatre solutions ont été au final identifiées dont trois qui utilisent des réducteurs chimiques (oxycombustion). Le procédé Ulcos-BF permet ainsi de séparer les gaz s'échappant du haut fourneau et de récupérer le CO2. "Outre le captage du CO2, cette solution récupère également des composants utiles comme le CO qui sera renvoyé dans le four pour être totalement oxydé. Ce système offre ainsi la possibilité de consommer 20 à 30 % moins de coke", se réjouit Jean-Pierre Birat, Coordinateur européen du programme Ulcos pour ArcelorMittal. Au final, ce procédé pourrait réduire d'au moins 50 % les émissions de GES, tout en augmentant de 20 % la productivité du haut fourneau.

Ce démonstrateur sera, par ailleurs, associé à un projet pionner de transport et de stockage de CO2. Le gaz récupéré sera ainsi évacué dans un pipeline de 60 à 80 km de long qui débouchera sur une zone de stockage à 1.500 mètres sous terre. Pour définir ces zones géologiques, une demande de permis de recherche a été déposée en juin 2010. Si le site obtient toutes les autorisations, la construction du procédé de recyclage des gaz se fera dès 2012 et devrait être opérationnel en 2014. "L'ensemble haut fourneau, pipeline et zone de stockage sera construit dans les cinq ans et devra, par contre fonctionner pendant dix ans. Une exigence pour obtenir des financements", note Jean-Pierre Birat. Une nécessité quand on sait que ce projet est estimé à près de 700 millions d'euros.

De son côté, EDF dont 3,6 % de sa production électrique provient de centrales à charbon, est également porteur d'un démonstrateur appelé C2A2 pour Captage de CO2 avec des amines avancées. En partenariat avec Veolia et Alstom, ce projet vise à tester ce procédé dans des conditions et à l'échelle industrielle, mais également à bien l'intégrer à un site de production ainsi qu'à optimiser ses performances. "Durant le dernier trimestre 2011, ce procédé de captage sera installé sur l'unité 4 de la centrale à charbon de 600 MWe du Havre. Le but est de capter environ une tonne par heure de CO2, une petite quantité au regard des 1.000 tonnes de gaz dégagées par heure par la centrale. Mais, c'est avant tout un démonstrateur pour prouver la pertinence de cette technologie", souligne François Giger, en charge de la stratégie et de la coordination des projets CSC chez EDF.

Par ailleurs, Total a procédé fin août à une première injection de 22.000 tonnes de CO2 sur son site expérimental de stockage à Lacq (Pyrénées Atlantiques). Par rapport au calendrier initial, ce programme a pris du retard. Il faudra désormais attendre 18 mois de plus, et l'injection de 80.000 tonnes supplémentaires, pour connaître les résultats de ce test. A cause de ce délai, Total a dû demander à la Direction régionale de l'environnement une prolongation de cette expérimentation. La réponse de la Dreal est attendue pour ces prochains jours.

Des verrous technologiques et sociétaux à franchir

De son côté, l'Institut français du pétrole Energie Nouvelle (IFP EN) porte actuellement toute son attention sur les verrous existants au développement de cette technologie. Le premier défi est d'abaisser les coûts. " Avec les procédés de CSC, un supplément de 20 euros par MWh est à compter ce qui augmente le prix de 50 € à 70 € le MWh dans le cas de production d'électricité", précise Hervé Quinquis, Responsable du programme stockage du CO2 à l'IFP EN. L'institut compare ainsi les différentes techniques au regard de leur coût et de leur efficacité. "A 13 euros la tonne de CO2, les industriels n'ont aucune légitimité financière de faire le stockage.(…) Il faudrait des coûts de CO2 très élevés pour que les techniques du CSC soient viables économiquement", appuie Jean-Pierre Birat.

Le deuxième axe de travail de l'IFP EN est d'évaluer le risque de stockage de ce gaz qui est un verrou essentiel à tous projets. "Après avoir défini les paramètres d'un site, il faut analyser le risque et la sécurité du stockage. IFP EN réalise donc des modélisations de fluides sur une période de mille ans en prenant en plus en compte les possibles interactions avec les roches", note Hervé Quinquis.

Pour tous les acteurs réunis, la sécurité du stockage a une importance considérable pour que la population accepte ce genre de projet. "S'il n'y a pas d'acceptabilité, il n'y aura pas de CSC", prévient Gérard Moutet, Directeur Climat-Energie de Total. Cette acceptabilité sociétale devra forcément s'accompagner d'un débat qui a déjà commencé depuis la mise en place des tout premiers projets. En effet, les citoyens se posent la question du devenir de cette quantité de gaz stockée pendant des décennies, voire des siècles, sous leurs pieds. "Le choix de déployer une filière CSC en France nécessite de lancer un débat, mais il lui faut de la matière. Avec les démonstrateurs et pilotes, on aura des vraies données à analyser", Francois Moisan. Nombreux institutionnels et industriels regrettent la décision de pays comme l'Autriche d'interdire toute recherche sur le captage et stockage du CO2. En Allemagne, même si rien n'est réglementé au niveau national, plusieurs lands ont avancé l'idée de mettre un véto sur ce genre de projets. Les études de modélisation des fluides, de surveillance géochimique, de monitoring du panach des gaz offriront peut-être des arguments de poids aux discours des acteurs de cette filière. Sans compter que cette solution peut vraiment participer à l'atteinte des objectifs de lutte contre le réchauffement climatique.

Dans tous les cas, cette technologie ne verra pas le jour demain d'un point de vue industriel. Au moins une décennie sera nécessaire pour optimiser les procédés de captage et stockage. Au niveau mondial, les projets se multiplient mais peu de progrès sont clairement identifiés. En Europe, les programmes de financement se succèdent. Le prochain appelé NER 300 vise à financer au moins huit projet CSC. Le Ministère de l'Ecologie a également lancé un nouvel appel à manifestations d'intérêt en mai dernier qui aura pour but de lever les barrières technologiques des différentes expérimentations. Ce dernier sera clos le 15 novembre prochain.

Réactions6 réactions à cet article

La puissance du raisonnement !!!!!!!!!!!

Stocker le CO2 ne le fait pas disparaitre, il peut potentiellement ressurgir n'importe quand et tuer les populations locales du fait de sa concentration soudaine trop élevée dans l'air. Ce qu'il faut c'est le supprimer à la source.
C'est un peu comme produire un toxique, je sais que c'est un toxique donc je vais le stocker plutot que d'arrêter de le produire. Cela est très logique digne d'élève de CE1...

arthur duchemin | 21 septembre 2011 à 10h08 Signaler un contenu inapproprié

ne serait t'il pas préférable de capter le CO² par l'intermédiaire des micro algues cultivées dans des bioreacteurs permettant de le transformer en carburant comme à ALICANTE EN ESPAGNE.cela permet de recycler le CO² est d'éviter la consommation de pétrole fossile et; d'éviter les rejets supplémentaires de CO²; de continuer les forages notamment en artique et risquer des marées noires catastrophiques le stockage tel que présenté c'est mettre nos problèmes sous le tapis à moins de nous prouver que ce CO² une fois stocké au fil du temps ce transforme en calcaire et que les générations du futur n'assiteront pas à des relarguages massives au risque et péril de leur vie surtout pour les populations vivant au-dessus .

CITD | 21 septembre 2011 à 10h27 Signaler un contenu inapproprié

Tout a fait d'accord avec Arthur Duchemin en n'oubliant pas qu'en cas de puite importante le precdent dulac nyokos (1.500 morts) fait reflechir

fleurent | 21 septembre 2011 à 19h28 Signaler un contenu inapproprié

Pour régler un problème, il faut s'attaquer aux causes, pas aux conséquences !
Le stockage de CO2 est une pseudo-réponse aux problèmes de changement climatique. C'est une vision à court terme défendue par les pétroliers et les gaziers, qui va coûter très cher (et donc détourner de l'argent des vraies solutions) et soutenir la consommation d'énergie fossile.
Sans parler des conséquences environnementales en cas de défaillance : pollution de l'air, incertitudes géologiques...

Qu'on arrête de gaspiller de l'argent dans ce genre de bêtise. Les autrichiens ont raison.

brazz | 22 septembre 2011 à 09h40 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour à tous,

Le stockage géologique du CO2 est nécessaire car, entre autres, pour certaines industries ayant déjà drastiquement réduit leurs émissions de gaz à effet de serre par des avancées technologiques (sidérurgie, cimenterie, aluminerie, ...), il n'existe pas d'autre solution à court terme pour réaliser de nouvelles réductions massives des émissions de gaz à effet serre.

Également, il faut bien comprendre que ce qui est arrivé au Lac Nyos ne pourrait pas se produire dans le cas d'un site de stockage géologique du CO2.

Cordialement,

Jean-Philibert Moutenet
Chaire de recherche sur la séquestration géologique du CO2
Québec, Canada

Jean-Philibert Moutenet | 22 septembre 2011 à 15h54 Signaler un contenu inapproprié

Le stockage du CO2 ? Au mieux, de la poudre aux yeux pour se donner bonne conscience. Au pire, des sommes importantes distribués à quelques lobbys influents et des accidents type lac Kivu. Quand admettra t-on l'irréalisme de cette "solution" : quelques millions de tonnes stockées en tout et pour tout, alors que le problème se pose en milliards de tonnes !

dmg | 23 septembre 2011 à 18h35 Signaler un contenu inapproprié

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