"Le captage et le stockage de dioxyde de carbone (CSC) est aujourd'hui à la croisée des chemins", constate la Commission européenne dans un document sur l'avenir du captage et stockage du carbone en Europe (1) . Elle a donc lancé, jeudi 27 mars 2013, une communication consultative pour faire un point sur les leviers qui débloqueront son développement. En janvier, un article d'Euractiv avait déjà dévoilé les grandes lignes du document.
Pour la Commission, le CSC constitue l'une des principales technologies disponibles qui permettra de réduire les émissions carbonées du secteur de la production d'électricité.
La feuille de route 2050 de l'énergie ainsi que l'évolution de la demande mondiale sont révélatrices, selon elle, du maintien des combustibles fossiles dans le mix énergétique et dans de nombreux procédés industriels.
Aujourd'hui, le retard dans le lancement de projets de démonstrations à l'échelle européenne risque de compromettre les objectifs fixés : le retrait du projet Ulcos (Ultra-Low Carbon dioxide) a marqué l'abandon de tous les projets européens de captage et de stockage du dioxyde de carbone qui étaient en lice en 2012.
Second appel d'offres NER en avril
Un second appel d'offres NER300, pour sélectionner des démonstrateurs mis en service au plus tard mi-2018, devrait s'étaler d'avril 2013 à mi-2014.
"Les retards vont probablement conduire à des coûts plus élevés pour décarboner le secteur de l'électricité, en particulier pour les États membres qui dépendent fortement des combustibles fossiles", déplore la Commission.
La technologie s'avère déjà freinée par les coûts notamment de l'étape de captage. Le prix d'une opération s'élève en effet à 60 euros par tonne de CO2, tandis que celui du marché du carbone est proche de 5 euros la tonne.
"La majorité des opérateurs de CSC proposent des applications qui reposent presque entièrement sur fonds publics", souligne la Commission, dans son document. Cette situation perdurera tant que le prix du carbone demeurera faible, estime-t-elle.
Le défi principal sera donc de stimuler l'investissement dans des démonstrateurs CSC pour vérifier la faisabilité du déploiement ultérieur et la construction d'infrastructures.
"D'autres retards pourraient conduire l'industrie européenne à devoir acheter la technologie à des pays non-européens dans l'avenir", met-elle en garde.
Comme une industrie avec CSC présentera des coûts (financier et énergétique) plus élevés qu'une usine dépourvue de cette technologie, la Commission questionne sur la mise en place d'une indemnité correspondante.
"Le déploiement du CSC, sans autres mesures d'incitation, nécessite une augmentation des prix ETS d'au minimum 40 €", considère-t-elle. Elle a donc initié un rapport sur le marché du carbone, ainsi qu'une consultation publique sur les options possibles pour y parvenir.
Acceptabilité sociale du CSC
Autre difficulté : l'acceptabilité sociale. Ainsi en Allemagne, la principale raison de la transposition tardive de la directive CSC trouve son origine dans l'hostilité des citoyens à ce type de projet. Dans le cadre de son programme énergétique européen pour la relance (PEER), l'Espagne aurait toutefois "réussi à surmonter l'opposition du public", selon la Commission, grâce à une campagne d'informations.
Malgré une capacité de stockage suffisante en Europe, celle-ci peut ne pas être à proximité des émetteurs de CO2. "Une infrastructure de transport transfrontalière sera nécessaire pour relier les sources aux puits d'injection," note la Commission. Cette dernière souhaite inclure ces nouveaux réseaux dans sa proposition de règlement sur les "Lignes directrices pour les infrastructures transeuropéennes". L'intérêt ? Ils pourront alors devenir des projets d'intérêt commun européen et être admissibles à des financements.
Dans sa consultation, la Commission invite les États membres qui ne l'ont pas encore fait, à produire une feuille de route pour orienter le secteur de la production d'électricité vers des énergies non fossiles en 2050 et à élaborer une stratégie nationale de déploiement de la technologie CSC.
Elle interroge également sur la nécessité de compléter les aides financières par d'autres outils par exemple de type NER300 ou la mise en place d'un standard de performance d'émission ou encore un système d'émission de certificat CSC. Autre piste : demander que tous les nouveaux équipements des services publics d'énergies soient compatibles avec la technologique CSC.
La Commission propose également que les fournisseurs de carburants fossiles contribuent à financer les projets CSC.
Sur la base des réponses à cette consultation ainsi que l'analyse de la transposition de la directive CSC et sa mise en œuvre dans les États membres, la Commission "examinera la nécessité d'élaborer des propositions" pour le CSC, dans ses réflexions sur le "cadre 2030 pour les politiques climatiques et énergétiques".