Le 20 janvier, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a présenté les nouvelles prescriptions applicables préalablement à l'éventuel redémarrage du four de fusion de Centraco située près du site de Marcoule (Gard).
"Indépendamment des conclusions de l'enquête judiciaire sur les causes précises de l'accident, l'ASN, après avoir analysé la situation actuelle de l'installation Centraco, considère qu'il est nécessaire de fixer à la Socodei [l'exploitant du four, ndlr] des prescriptions de sûreté renforcées", explique l'Autorité.
"Ces prescriptions portent notamment sur la formation des opérateurs à la conduite à tenir en situation anormale, les procédures encadrant le redémarrage du four, ou encore les dispositifs d'alerte et d'alarme associés au fonctionnement du four", indique l'ASN, précisant que "l'exploitant devra justifier à l'ASN le respect de ces prescriptions pour demander l'autorisation de redémarrer le four de fusion".
Assurer l'indépendance du service de gestion de la sûreté
Le détail des prescriptions a fait l'objet d'une décision officielle (1) le 14 janvier 2014. La Socodei doit appliquer ces prescriptions au plus tard six mois après la notification ou à la date du redémarrage si elle intervient avant.
S'agissant de l'installation à proprement parler, l'ASN prescrit des dispositions applicables dès le dépôt de la demande de redémarrage du four. L'Autorité réclame une revue complète des documents techniques et la justification de la manière dont Socodei prend en compte les préconisations de sûreté qui y figurent. De plus, elle attend de l'exploitant qu'il corrige les éventuels dysfonctionnements et anticipe les risques liés au vieillissement ou à l'obsolescence des équipements.
En matière organisationnelle, l'ASN demande à l'exploitant de lui remettre une étude portant sur les facteurs organisationnels et humains en salle de conduite du four de fusion. Par ailleurs, une série de procédures doit être affinée concernant la fusion des métaux, la réduction des risques pour les travailleurs et certaines situations problématiques.
De plus, l'ASN attend de l'exploitant qu'il précise dans les règles générales d'exploitation le rôle et les responsabilités du service chargé de la vérification de la sûreté. Socodei doit allouer à ce service les ressources nécessaires à l'accomplissement de ses missions et à une présence opérationnelle "suffisante" dans les installations. L'exploitant doit aussi veiller à ce qu'il soit doté de compétences techniques spécifiques. Enfin, "l'exploitant prend les dispositions nécessaires pour garantir l'indépendance de jugement de ce service ainsi que son indépendance effective par rapport aux services de production".
Pour finir, Socodei doit assurer la mise en place d'un plan de formation à la sécurité spécifique aux différentes tâches effectuées par les opérateurs ainsi qu'à "la conduite en situation dégradée ou incidentelle". Un volet spécifique traite de la mise en place d'une "démarche générale à suivre [lorsque l'exploitant] est confronté à une situation inhabituelle pour laquelle il ne dispose pas d'une procédure spécifique définie". Plus globalement, l'ASN demande à ce que "l'exploitant [prenne] toutes les dispositions pour maintenir et développer les compétences nécessaires à l'exploitation sûre de son installation".
Erreur humaine
Le 12 septembre 201, une explosion survenue dans un four de fusion servant à fondre les déchets radioactifs métalliques de faible et très faible activité a entraîné la mort d'une personne et en a blessé quatre autres dont une gravement.
A l'issue d'une inspection inopinée menée le 4 octobre, l'ASN avait constaté que le dispositif visant à mesurer la radioactivité présente dans les rejets d'effluents gazeux (gaz et aérosols) n'était pas conforme. De même, les inspecteurs avaient déterminé que, du fait d'une erreur humaine, "le four de fusion contenait, au moment de l'accident, une charge d'environ 4 tonnes de métal pour une activité de l'ordre de 30 mégabecquerels (MBq) et non de 63 kilobecquerels (kBq) comme l'avait initialement indiqué l'exploitant", soit une estimation 476 fois supérieure à celle qui prévalait lors de l'accident.
"Sans préjudice de la procédure judiciaire engagée pour la recherche de responsabilités, l'ASN a, par sa décision du 27 septembre 2011, soumis à son autorisation préalable le redémarrage du four d'incinération et du four de fusion de Centraco", rappelle l'Autorité, ajoutant que "le 29 juin 2012, l'ASN a autorisé le redémarrage du four d'incinération".