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Actu-Environnement

Dieselgate : l'Etat protège-t-il Renault ?

L'Etat protégerait Renault, sous-entendent des membres de la commission de contrôle des émissions polluantes. Certains tests font apparaître des écarts d'émission d'oxydes d'azote trop importants. Le calibrage du piège à NOx est pointé du doigt.

Risques  |    |  P. Collet

"Un rapport du gouvernement français a omis des détails importants sur la façon dont des voitures diesel de Renault ont pu minorer leur émissions de gaz mortels lorsqu'ils sont soumis aux tests officiels d'émissions", indique le Financial Times (1) dans son édition du 23 août. Le quotidien financier britannique se base sur des confidences recueillies auprès de trois des 17 membres de la commission technique indépendante de contrôle des émissions polluantes des véhicules, mise en place par Ségolène Royal, ministre de l'Environnement, en septembre 2015 suite au "dieselgate".

Ces membres pointent en particulier les tests réalisés sur les modèles Renault Captur. Deux faits les intriguent. Tout d'abord, la commission a constaté qu'à la fin de la préparation du véhicule en vue de réaliser le test d'homologation, le dispositif de piégeage des oxydes d'azote se purgeait très rapidement cinq fois de suite, permettant à la voiture de réduire sensiblement ses émissions lors du test. Ensuite, les écarts entre le test d'homologation standard et ceux réalisés par la commission sont anormalement importants.

Pour rappel, les tests réalisés par la commission ont révélé des résultats accablants pour le Groupe Renault. En condition réelle de conduite, de nombreux véhicules du constructeur au losange dépassent très largement les niveaux règlementaires d'émissions d'oxydes d'azote (NOx). Les premiers résultats faisaient apparaître, qu'avec huit véhicules sur treize, le groupe Renault était le mieux représenté parmi les véhicules les plus polluants (c'est-à-dire affichant des dépassements de plus de sept fois la valeur réglementaire). Ces premiers résultats ont été confirmés par les tests réalisés par la commission ad hoc allemande et par le rapport final. Début janvier, dès les premiers tests, le constructeur avait été mis en cause et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait perquisitionné plusieurs sites du groupe à la demande de la commission technique.

Ecarts anormaux

Selon le Financial Times, le rapport de la commission passerait sous silence certains constats. En particulier, le document ne signale pas que la commission aurait découvert que le dispositif de piégeage et de stockage des NOx fonctionne en condition de test d'homologation mais pas sur route.

Le rapport fait aussi apparaître que les trois véhicules Renault Captur diesel testés figurent parmi les meilleurs lors de leur homologation. Les émissions d'oxydes d'azote sont comprises entre 31,8 milligrammes par kilomètre (pour le modèle 90 chevaux) et 37,2 mg/km (pour les modèles 110 ch). Le seuil règlementaire est fixé à 80 mg/km. En revanche, elles varient de 128 à 209 mg/km lors du tests d'homologation "modifié" (2) réalisé par la commission. Quant aux tests en conditions réelles, ils font apparaître des valeurs allant de 635,5 à 890 mg/km, soit de 9 à 11 fois la valeur règlementaire. Ces résultats sont parmi les plus troublants obtenus lors des tests, explique un membre de la commission.

Le quotidien financier rappelle que "ce sont des discordances entre les tests d'émissions de NOx sur route et en laboratoire qui ont mis la puce à l'oreille des enquêteurs américains sur le fait que les véhicules diesel de Volkswagen étaient équipés de "dispositifs d'invalidation" illégaux pour tricher lors des essais". Or, si les tableaux annexés au rapport révèlent les écarts constatés sur le Captur, le rapport reste silencieux sur le sujet. Le Financial Times explique que les membres de la commission n'ont pas de preuve que Renault utilise un dispositif similaire à celui de Volkswagen. Toutefois, "ces omissions conduisent les membres de la commission à craindre que le gouvernement soit trop indulgent [avec Renault] en raison de sa participation de 20% dans le constructeur automobile". Et Charlotte Lepitre, représentante de France Nature Environnement (FNE) dans la commission, d'expliquer que le rapport final a été rédigé par l'Etat qui a décidé de ce qui devait rester confidentiel. En réponse, le Gouvernement explique qu'il incorporera au rapport les commentaires des membres de la commission un fois qu'il les aura compilés.

Bug de calibration

La page consacrée à Renault dans le rapport de la commission présente la réponse faite par le constructeur au sujet des écarts d'émissions. Renault admet que le dispositif de purge de son piège à NOx est en cause. L'entreprise explique que les dépassements constatés lors des tests d'homologation modifiés sont liés à l'"identification en juillet 2015 d'un bug de calibration dans la gestion des purges déSOx (élimination du soufre) du dispositif de piégeage et de stockage des NOx". Les critères permettant la purge étaient trop restrictifs et cette dernière n'était pas efficace.

L'entreprise a indiqué avoir corrigé ces points sur les véhicules produits depuis septembre 2015. De plus, elle rappelle 15.000 véhicules pour échanger le dispositif de piégeage et de stockage des NOx sur les "véhicules fortement kilométrés". Quant aux dépassements sur route, ils s'expliquent par l'application d'une stratégie de "fenêtre de température", c'est-à-dire le recours à un dispositif de mise à l'arrêt du système de dépollution lorsque les conditions de température ne sont pas optimales. Le constructeur assure qu'il va élargir la plage de température permettant le bon fonctionnement du dispositif. Toutes ces modifications devaient être appliquées à l'ensemble de la gamme Renault à partir de juillet 2016, a assuré le constructeur.

1. Consulter l'article.
http://www.ft.com/cms/s/0/15e40ef8-63cc-11e6-a08a-c7ac04ef00aa.html?ftcamp=published_links%2Frss%2Fcompanies%2Ffeed%2F%2Fproduct#axzz4IEpk3fS8
2. La commission a reproduit sur banc à rouleaux le cycle utilisé pour l'homologation des véhicules, mais en modifiant certains paramètres, comme la position du capot moteur, en faisant tourner les roues non-motrices en effectuant l'essai sur un banc 4x4, en passant la marche arrière au cours de l'essai, après le premier palier de 15 km/h, en modifiant le cycle de pré-conditionnement et en ne chargeant pas la batterie.

Réactions1 réaction à cet article

Il y a quelque chose de fort intéressant dans ce papier. Que Renault traficote ses bagnoles pour passer au travers des normes n'est pas outre mesure surprenant, c'est de bonne guère commerciale dans ce monde. Par contre, bien plus révélateur, est le fait que c'est le modèle Captur qui est incriminé. Un des modèles les plus récents de la gamme, donc a priori à la pointe de la technologie Renault. Et... c'est un SUV, un 4x4 de ville, bref, un oxymore, quelque chose qui fusionne des opposés, une aberration. Et c'est le symbole de ce qu'est devenu l'industrie automobile ! Depuis 20 ans, les constructeurs clament qu'ils sauraient faire des véhicules à 3 litres au 100 km, et ils ne le font pas. A côté de ça, ils continuent de vendre des concepts délirants toujours plus gros, plus lourds, plus gourmands, le tout masqué sous des débauches de technologies inutiles. Et pour une seule raison, le poids du lobby pétrolier. Tant qu'on n'admettra pas ce scandale, qu'on ne se donnera pas les moyens de lutter contre, il ne faudra pas se cacher derrière son petit doigt, les bagnoles pollueront, largueront du CO2, et la planète explosera. Et les normes n'y changeront rien.

dmg | 27 août 2016 à 18h09 Signaler un contenu inapproprié

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