En 2014, la consommation de vin bio a augmenté de 14%. Désormais, un tiers des Français déclarent acheter du vin AB. La moitié des restaurateurs indiquent proposer à leur carte au moins une référence de vin bio. Cette forte attractivité a un impact sur les vignobles français qui, de plus en plus, s'inscrivent dans une démarche environnementale. "Les consommateurs font évoluer la mentalité des vignerons, analyse Michel Issaly, viticulteur du Tarn doublement certifié, bio et HVE (haute valeur environnementale) et membre des Vignerons indépendants. Les Français veulent savoir ce qu'ils achètent, il faut les rassurer sur nos pratiques".
Quelques chiffres
La viticulture représente un chiffre d'affaires de 12 milliards d'euros, dont plus de 500 millions pour le vin bio. Elle représente 600.000 emplois directs et indirects. La viticulture bio nécessite deux fois plus de main d'œuvre que la viticulture conventionnelle (3,5 emplois par exploitation contre 1,8 en moyenne sur la filière).
Résultat : la vigne se convertit à l'environnement. Entre 2007 et 2012, les surfaces viticoles en conversion biologique ont progressé de 188%. Elles représentent désormais 8,2% du vignoble national. La viticulture est également championne de la Haute valeur environnementale puisque, sur les 168 exploitations françaises certifiées aujourd'hui, 151 produisent du vin. Le marché s'équilibre donc entre une demande en hausse et une production qui suit le mouvement.
La marque collective des Vignerons indépendants estime que, d'ici 2017, 50% de son réseau sera engagé dans une démarche environnementale, contre 36% aujourd'hui. Elle a donc décidé d'organiser un salon dédié à ce thème. La bio et la HVE seront à l'honneur de la première édition de Nature et vins, qui s'ouvre du 29 au 31 mai à Paris.
Conserver l'image de marque du vin
Le vin véhicule une image à la fois haut de gamme et de terroir. Pourtant, derrière l'étiquette se cache une réalité pas si reluisante. Alors qu'en 2006, la viticulture représentait 3,3% de la surface agricole utile (SAU), elle consommait 14,4% des produits phytosanitaires. Avec des impacts environnementaux importants : pollution des eaux de surface et de profondeur, de l'air, des sols… La filière utilise surtout des fongicides, contre l'oïdium et le mildiou, et des insecticides contre la flavescence dorée, véhiculée par la cicadelle.
"Mais devant le coût économique de la lutte chimique, mais aussi l'impact sanitaire pour les travailleurs et les riverains, de plus en plus de vignerons essaient de trouver des alternatives", estime Michel Issaly. Selon l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), si de nombreux systèmes de production coexistent en viticulture (intensif, conventionnel, raisonné, intégré, biologique, biodynamique), les systèmes de production raisonnée, qui visent une maîtrise des intrants, prédominent aujourd'hui.
Le développement récent de certifications valorisables auprès du consommateur, comme le règlement européen sur le vin bio en 2012 ou la certification environnementale lancée par les autorités françaises la même année, a offert une nouvelle opportunité à la filière.
Des difficultés dans certaines régions
La bio garantit que le viticulteur n'a pas recours aux pesticides de synthèse, au désherbage chimique et utilise des produits naturels pour la fertilisation et la lutte contre les parasites. Après de belles années de progression, la dynamique bio commence à s'essouffler avec, pour la première fois en 2013, une stabilisation de la surface de vignes bio. "2013 et 2014 ont été des années difficiles pour la viticulture bio. Le mildiou, l'oïdium ont eu de réels impacts économiques pour les vignerons. Certains se posent des questions quant à leur avenir en bio. Mais s'ils décident d'arrêter, ils resteront néanmoins dans une démarche raisonnée", analyse le viticulteur bio.
Dans certaines régions, où le passage en bio est difficile en raisons des conditions pédoclimatiques (Champagne, Jura, Savoie, Pyrénées atlantiques…), la certification environnementale peut être un bon compromis. "C'est un élément essentiel pour mettre le pied à l'étrier d'une démarche environnementale ou pour les vignerons qui sont installés dans des régions avec plus de contraintes", estime Michel Issaly. Cette certification comporte trois niveaux, seul le plus élevé permet de communiquer autour de la haute valeur environnementale de l'exploitation.
Mais d'autres viticulteurs, comme Michel Issaly, font le choix d'être certifiés bio et HVE. Cette dernière reconnaissance porte sur quatre critères de performance environnementale : biodiversité, stratégie phytosanitaire, gestion de la fertilisation et ressource en eau. "Quand le consommateur visite nos vignes HVE, il voit directement l'impact visuel : la vie revient avec les arbres, les bandes enherbées… Il touche ainsi du doigt la biodiversité qui se réinstalle dans la vigne et qui l'aide à se protéger, notamment contre la cicadelle", raconte le viticulteur. Le fait que ces changements soient visibles n'est pas négligeable : 36% des achats en vin bio se font directement auprès du producteur.
D'autres vont encore plus loin
Enfin, d'autres viticulteurs font le choix d'aller plus loin que la bio, en s'inscrivant dans la biodynamie. 1% du vignoble français serait biodynamique aujourd'hui, un chiffre qui devrait progresser dans les prochaines années : "3% des Vignerons indépendants pratiquent la biodynamie, ils devraient être 9% en 2017", indique le Tarnais. Les vins sont certifiés par des labels indépendants, Demeter ou Biodyvin. Outre le respect du cahier des charges bio, ces labels exigent des pratiques œnologiques et une limitation en sulfites plus restrictives que le label bio. Des préparations naturelles sont utilisées (orties, prêle, valériane…) et le calendrier lunaire est suivi.