Cependant, si ces déchets inertes sont bien identifiés et facilement triés dans les travaux publics, il n'en est pas de même dans le secteur de la démolition. En effet, les déchets inertes représentent théoriquement 94% des déchets de cette activité mais en réalité, ce taux n'est que de 60% car certains déchets non inertes ne peuvent être séparés des autres. Ce mélange tient à la nature même des déchets de démolition : restes de plâtre sur les bétons, présence d'éléments de second oeuvre comme le bois et les plastiques qui n'ont pu être retirés des murs. En effet, les techniques de construction anciennes avec l'association de nombreux matériaux différents ne permettent pas de réaliser une déconstruction sélective «idéale». Technique visant à séparer lors de la destruction d'un bâtiment les matériaux qui pourront être réutilisés de ceux qui devront être définitivement détruits, la déconstruction sélective n'en est qu'à ses débuts en France. Résultat, selon l'IFEN, seulement 50% de ces déchets mélangés sont triés puis recyclés ou réutilisés. Pourtant il existe de réelles perspectives de développement à l'image du Royaume-Uni ou de l'Allemagne, pays qui produisent environ 6 fois plus de granulats de recyclage que la France. La grande disponibilité de granulats naturels dans certaines régions françaises, les bas tarifs des décharges et le réseau de recycleurs encore à développer expliquent sans doute le faible taux de recyclage.
Le surcoût induit par la déconstruction sélective est également un obstacle souvent invoqué pour ne pas systématiser ce type de pratique. En effet, toute déconstruction doit être précédée d'un audit avec inventaire systématique et complet des matériaux, ce qui représente un premier surcoût. II est également nécessaire d'identifier, dès les premières études, les filières locales de recyclage car une déconstruction fine ou un tri poussé ne peuvent se justifier en l'absence de possibilité de valorisation locale. De plus, les travaux sont plus longs à cause des opérations de dépose et de tri des éléments du second œuvre et la mission du maître d'oeuvre doit inclure la surveillance des bonnes pratiques de gestion des déchets et le contrôle des filières d'élimination. Enfin, le transport et l'élimination des déchets non inertes vers des filières réglementaires entraînent des coûts supplémentaires car ces filières sont dans la plupart des cas plus onéreuses et plus éloignées. Au final, les dépenses correspondant à l'abattage de la structure sont identiques pour les deux pratiques, mais la gestion globale des déchets reste légèrement plus onéreuse pour la déconstruction.
Pourtant, selon le CSTB, la modification des pratiques actuelles et la généralisation de la déconstruction sélective pourrait améliorer sensiblement le recyclage des déchets inertes et par la même occasion la collecte et le traitement des autres déchets. En effet, le BTP est amené à produire des déchets non inertes comme le bois et le métal qui peuvent être recyclés mais également des déchets dangereux comme le bois traités ou l'amiante qui doivent suivre des filières d'élimination spécifique. Actuellement, les trois quarts des déchets dangereux de la démolition et des travaux publics sont récupérés mais ce taux pourrait progresser significativement grâce à la déconstruction sélective.