L'IRSN, au titre de ses missions d'appui technique à l'Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN), rappelle aujourd'hui dans une note d'information* qu'il a contribué à définir les objectifs de sûreté assignés à ce type de réacteurs et a examiné de façon détaillée les dispositions retenues par EDF en matière de sûreté.
Inscrit dans la loi d'orientation sur l'énergie et adoptée le 13 juillet 2005 par les parlementaires, l'EPR, technologie de réacteur à eau pressurisée, est un projet franco-allemand développé depuis 1992 par Siemens et Areva, destiné à prendre le relais des 58 réacteurs qui équipent actuellement les 19 centrales nucléaires françaises. Sa mise en service est prévue en 2012. Selon EDF, le lancement de l'EPR contribuera à garantir l'indépendance énergétique de l'Europe dans les prochaines décennies. Le gouvernement actuel estime que la construction de cette centrale renforcera la filière industrielle nucléaire en France. Elle participera à la sécurité d’approvisionnement électrique de notre pays, à un prix compétitif, et vient compléter le soutien sans précédent apporté par le Gouvernement aux économies d’énergie et aux énergies renouvelables, qui ont notamment bénéficié en 2006 de plus 1,5 milliards d’euros de financements publics, indique les différents ministres concernés dans un communiqué commun.
Mais le sujet suscite bien des polémiques, obligeant les candidats à l'élection présidentielle à prendre parti. Si Ségolène Royal (PS) et François Bayrou (UDF) souhaitaient depuis plusieurs semaines un nouveau débat sur le projet même s'ils reconnaissent que la France ne pourra pas se passer du nucléaire, Nicolas Sarkozy (UMP) a fait valoir que les autres alternatives ne pourront pas remplacer le nucléaire et se déclare donc favorable au projet.
Dans ce contexte, si le gouvernement se félicite de cette autorisation, pour les Verts, la publication de ce décret à quelques jours du premier tour des élections présidentielles constitue une véritable provocation. Face à ce déni de démocratie, le prochain gouvernement devra impérativement annuler ce décret et enterrer définitivement le projet de réacteur EPR en cas de victoire de la gauche aux élections, estime dans un communiqué Yann Wehrling, porte parole du parti. Même sentiment du côté de Cap21, le parti de Corinne Lepage qui soutient désormais la candidature de François Bayrou. Selon Eric Delhaye, son parte-parole, après les décrets relatifs aux OGM, ce décret sur l'EPR reflète une nouvelle fois la conception que le gouvernement se fait de la démocratie et de la participation citoyenne : une conception autoritaire qui devrait appartenir au passé mais encore bien présente, à la solde des clans et des lobbys.
Du côté associatif, le Réseau Sortir du nucléaire, qui fédère 765 associations, interpelle Ségolène Royal et François Bayrou pour qu'ils s'engagent avant le 1er tour de l'élection présidentielle, à annuler le décret en cas de victoire. C'est chose faite pour François Bayrou qui s'est déclaré, cet après-midi devant la presse à l'occasion d'un déplacement en Mayenne, favorable à une suspension de la décision dans l'attente d'un nouveau débat public. Du côté du PS, le sentiment est proche puisque l'on s’engage à ouvrir un débat transparent et approfondi sur l’avenir de l’EPR au lendemain de l’élection présidentielle.
Le Réseau rappelle par ailleurs que trois candidats à l'élection présidentielle, Olivier Besancenot, José Bové, et Dominique Voynet, se sont prononcés contre le nucléaire en général et donc contre la construction de l'EPR.
Greenpeace qui prépare un recours en annulation devant le Conseil d'Etat, dénonce cette décision irresponsable prise dans la précipitation pré-électorale et appelle l'ensemble des candidats à la présidentielle à réagir en s'engageant à annuler ce décret s'ils sont élus. Avec ce décret, le gouvernement en fin de course ignore l'opinion de la majorité des citoyens et tente de verrouiller un projet remis en cause par la plupart des candidats à la présidentielle, déclare Frédéric Marillier, chargé de campagne Nucléaire à Greenpeace France.