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Actu-Environnement

“Les biocapteurs microbiens nous permettent de vérifier l'efficacité de la dépollution”

Plusieurs solutions de dépollution ont été engagées sur un site industriel à Quincieux pour traiter les composés organo-halogénés volatils. Une solution innovante de bio-suivi du traitement a également été mise en place. Explication de Florian Philippon, chef de projets sites pollués de l'Ademe.

Interview  |  Risques  |    |  D. Laperche
Environnement & Technique N°372
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°372
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“Les biocapteurs microbiens nous permettent de vérifier l'efficacité de la dépollution”
Florian Philippon
Chef de projets au service friches urbaines et sites pollués (SFUSP) de l’Ademe de Lyon
   

Actu-environnement.com : L'entreprise JEC Industrie a exploité jusqu'en août 2004 des installations de dégraissage des métaux au tétrachloroéthylène (solvant chloré (1) ) et d'usinage des métaux sur le site industriel de Quincieux (Rhône). Après la cessation d'activité, quelles ont été les différentes étapes de dépollution ?

Florian Philippon : Nous pouvons distinguer deux étapes dans la dépollution. Tout d'abord, l'industriel a souhaité quitter le site, devenu trop petit pour ses besoins d'expansion. Dans le cadre de l'élaboration du dossier de cessation d'activité, il a identifié une pollution au tétrachloroéthylène des sols mais également de la nappe d'eau souterraine du secteur.

Suite à différentes investigations, un arrêté préfectoral d'urgence a prescrit la mise en place d'une barrière hydraulique de confinement. Les premiers travaux ont commencé en février 2006 et le dispositif a fonctionné jusqu'en 2008. Ce système a été arrêté car malheureusement la barrière hydraulique n'a pas bien fonctionné et a entraîné la pollution à l'extérieur du site. Un panache de pollution a en effet été observé au niveau de la ville de Quincieux. Le captage d'eau potable situé à 1,5 km du site a également été atteint. JEC a alors consulté deux autres sociétés, Colas et URS, pour dimensionner un nouveau système de traitement pour résoudre ce problème.

AE : Pourquoi la barrière a-t-elle mal fonctionné ?

FP : Une procédure judiciaire est en cours, j'éviterai de rentrer dans les détails. Les arguments avancés par le bureau d'études qui est intervenu sont que la société JEC n'aurait pas accepté le régime préconisé par la société. De son côté, la société JEC évoquait un problème de dimensionnement.

AE : Quelle est la solution mise en place par les entreprises Colas et URS?

FP : Tout d'abord, au niveau de la zone identifiée comme source pour les composés organo-halogénés volatils, ils ont mis en place une barrière de sparging/venting. Son principe repose sur une injection de bulles d'air dans les sols qui vont oxyder les molécules présentes et dans le même temps remonter les composés chlorés. Ces derniers ont en effet une grande affinité à l'air et sont très volatils : ils vont donc remonter dans les sols. Ensuite, les puits venting assurent une dépression des sols et vont donc aspirer les molécules qui remontent des eaux souterraines.

Dans le même temps, ils ont installé une zone de traitement intermédiaire avec des injections pour un traitement biologique. Une seconde barrière de sparging a été mise en œuvre pour ne traiter que le panache de pollution qui a déjà atteint la nappe pour limiter les concentrations de polluants en aval.

Ce système a permis de récupérer environ 5,5 tonnes de polluants. Nous avons évalué qu'il restait environ 7 tonnes à traiter.

Le site est désormais à responsable défaillant : JEC a été liquidé. Le mandataire de la liquidation judiciaire n'avait des fonds que jusqu'au 31 décembre 2014 pour maintenir la barrière de sparging /venting. L'Ademe a donc pris le relais.

Deux arrêtés nous ont missionné en novembre 2014 pour poursuivre le traitement de la barrière de sparging /venting et ainsi éviter qu'une pollution trop importante vienne impacter l'air ambiant des habitations en aval. Nous devions également réaliser des études pour définir les mesures de gestion à mettre en place pour gérer durablement le site et le mettre en sécurité

AE : Comment la pollution de la nappe d'eau est-elle gérée ?

FP : Nous sommes effectivement au-dessus des valeurs d'eau potable aussi bien au niveau des puits des particuliers de la ville de Quincieux qu'au niveau du captage d'eau potable.

Un arrêté municipal interdit la consommation des eaux de puits et leur utilisation dans la ville de Quincieux.

Au niveau du captage d'eau potable, sur les sept puits présents, trois présentaient des traces de pollution. Le choix a été d'augmenter le débit de l'un de ces trois puits puis de le déconnecter : ainsi il ne sert plus à la production d'eau potable, mais pompe les eaux pour éviter que la pollution n'aille dans les autres puits.

AE : Un suivi de la dépollution à l'aide des biocapteurs microbiens a été mis en place en complément. Qu'apporte-t-il au dispositif ?

FP : Au niveau de la barrière intermédiaire, nous injectons de la matière carbonée - l'huile de soja - pour les bactéries qui dégradent les molécules présentes dans les sols. Les biocapteurs microbiens installés permettent de voir si le traitement fonctionne mais également de prédire quand réinjecter des composés afin d'optimiser notre traitement.

L'intérêt de cette solution innovante est que jusqu'à présent une personne devait venir sur le site faire des prélèvements ponctuels, nous n'avions pas de solution de mesure en continu : nous pouvions donc passer à coté de problèmes.

Cela nous a également permis de réfléchir sur une amélioration du dispositif : nous allons mettre en place de nouveaux puits d'injection. Les biocapteurs nous ont montré que l'efficacité du traitement était réduite par une mauvaise diffusion des huiles de soja dans le sol car certains puits étaient colmatés.

Nous avons réexploité cette solution sur un autre site à Bourgoin-Jallieu (Isère) pour nous assurer que les travaux mis en œuvre ne conduisaient pas à une pollution des eaux souterraines.

AE : Quels sont les dernières étapes de la dépollution du site ?

FP : Nous allons engager en 2018 les travaux de dépollution de la zone source par désorption thermique in situ pour traiter les sept tonnes de polluants restantes. Nous estimons que cette étape devrait durer 18 mois mais cela pourra évoluer en fonction du temps de circulation des eaux. Dans le même temps, nous maintiendrons un traitement en aval sur une période de 4 à 5 ans. Pour que les eaux arrivent du site au captage d'eau potable, il faut compter deux ans. Nous verrons donc les effets du traitement au niveau du captage d'eau potable à la fin du traitement, dans 5 à 6 ans.

1. Substance chimique de la famille des organo-halogénés volatils

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