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Une pompe à chaleur dans les canalisations
Développées en Suisse, les technologies de récupération de chaleur dans les eaux usées utilisent des pompes à chaleur eau-eau (PAC). Un fluide caloporteur circule dans des échangeurs mis en contact avec les eaux usées, capte les calories et les conduit vers une PAC alimentant le réseau de chauffage d'un bâtiment ou d'un ensemble de bâtiments. Dans le cas d'un réseau d'assainissement neuf, les échangeurs peuvent être intégrés à la canalisation. Dans un réseau existant, les systèmes sont réalisés sur-mesure et déposés dans le fond des canalisations. Plusieurs paramètres influent sur la performance du système : débit d'eau, vitesse, pente. Les paramètres diffèrent d'un projet à un autre, il n'y a pas de projets standards, explique Philippe Lentz du bureau d'étude BPR-Europe. Globalement la performance du système varie de 2 à 5 kW/m2 d'échangeur soir 1,8 à 8,4 kW par mètre linéaire. Généralement entre 40 et 80 mètres sont nécessaires, précise Philippe Lentz. La facture est elle aussi variable en fonction de la puissance thermique de l'installation, de la distance entre la canalisation et la chaufferie et de la configuration du réseau d'assainissement mais selon le cabinet BPR-Europe, il faut compter entre 1.500 et 4.000 euro/kW.
Plusieurs types de projets se prêtent à cette technologie que ce soit pour le chauffage ou le rafraîchissement en été : logements, bureaux, piscines publiques, établissement de soins, résidences pour personnes âgées… Le débit d'eaux usées doit toutefois être suffisant : 15 litres par seconde par temps sec.
Un montage juridique difficile mais pas impossible
Si sur le principe cette technologie semble simple, le montage juridique des projets qui la mettent en œuvre est plus complexe. ''La difficulté consiste à faire dialoguer des gens provenant de deux secteurs ayant un fonctionnement différent : l'assainissement et l'énergie'', témoigne Philippe Lentz. Le nombre d'acteurs concernés peut vite compliquer les démarches : propriétaires des bâtiments raccordés, exploitant de la chaufferie, propriétaires et exploitants du réseau. ''Dans tous les cas, les calories qui ''tombent'' dans le réseau deviennent publiques'', rappelle Phillipe Lertz. Souvent propriétaires du réseau d'assainissement, les collectivités sont donc les maîtres d'ouvrage idéaux pour ce genre de projets. Mais pour Thomas Rouveyran, avocat à la cour, ''il y a un vide juridique pour l'instant dans ce domaine, c'est donc aux collectivités de préciser les conditions d'exploitation''.
Généralement pour intégrer ce type de projet dans les contrats d'exploitation déjà en cours, le propriétaire de la canalisation doit compléter le contrat le liant à l'exploitant du réseau pour pouvoir mettre en place l'échangeur, et en parallèle établir un protocole de mise à disposition du réseau avec le propriétaire du bâtiment raccordé. Ce dernier doit quant à lui compléter le contrat d'exploitation de sa chaufferie pour intégrer les nouveaux équipements puis réaliser un contrat d'entretien de l'échangeur avec l'exploitant du réseau d'assainissement. Un montage qui, s'il est difficile, n'est pas impossible.
La ville de Levallois a par exemple prévu de récupérer les calories d'une partie de ses eaux usées pour alimenter cinq logements et un centre aquatique en remplacement d'une chaudière à gaz. Les premiers échangeurs du système développé par Lyonnaise des eaux vont être posés dans quelques jours. L'objectif est de couvrir une partie des besoins énergétiques de la piscine en particulier pour le chauffage et le maintien à température des bassins. En optant pour cette solution, la ville entend diminuer de 24 % la consommation d'énergie et de 66 % les émissions de gaz à effet de serre de son centre aquatique.