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Actu-Environnement

“Je porte le projet d'une réelle transition énergétique”

A quelques jours du premier tour de l'élection présidentielle française, Eva Joly, candidate pour Europe Ecologie les Verts précise pour Actu-environnement ses propositions en matière de mix énergétique, de gestion de l'eau ou encore d'agriculture.

Interview  |  Gouvernance  |    |  S. Fabrégat
   
“Je porte le projet d'une réelle transition énergétique”
Eva Joly
Europe Ecologie Les Verts
   

Actu-environnement : Quelle évolution du mix énergétique français envisagez-vous ?


Eva Joly :
En tant que candidate écologiste, je porte le projet d'une réelle transition énergétique, afin d'assurer robustesse économique, lutte contre la précarité énergétique et protection de l'environnement. Je considère pleinement les trois crises auxquelles nous devons faire face : le changement climatique, le risque nucléaire, la raréfaction des ressources fossiles (et naturelles en général).
Pour répondre à ces enjeux, je porte un projet qui fixe les objectifs généraux suivants :
- une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 30% en 2020 par rapport à 1990 et de 85% en 2050,
- une sortie programmée du nucléaire au plus tard en 2031.
Afin d'atteindre ces objectifs, nous avons développé un scénario détaillé techniquement, avec l'ensemble des politiques publiques nécessaires, lesquelles ont été chiffrées au plan budgétaire. Voici, brièvement résumés, les principaux éléments.
Pour 2020, nous prévoyons une diminution de la consommation d'énergie primaire de 20% et de 15% pour l'énergie finale. En 2050, notre objectif est de moins 50% de consommation d'énergie finale par rapport à 2009.
A horizon 2050, la production électrique et la production de chaleur avoisinent les 100% d'origine renouvelable. Notre scénario prévoit évidemment des étapes intermédiaires.
Pour permettre le développement des énergies renouvelables, de multiples politiques seront à mettre en place.

Pour EELV, la démocratisation de la transition énergétique passe par le droit à la participation économique de tout un chacun. EELV propose la création d'un « droit à l'investissement citoyen », en ouvrant le capital des projets EnR aux investisseurs locaux et en créant un « livret vert ». Par ailleurs, les initiatives de type coopérative ou fonds d'investissements citoyens (tel qu'Energie Partagée) seront largement facilitées. Au-delà de l'investissement, le cadre réglementaire et tarifaire sera revu afin de faciliter le développement des projets renouvelables. Les contraintes réglementaires manifestement superflues seront levées (classement ICPE ou règle des 5 mats pour l'éolien, intégration à la toiture pour le photovoltaïque…). Le cadre tarifaire sera revu afin de chercher une convergence européenne. Les tarifs d'achats, préférables aux appels d'offre, devront être prévisibles et négociés régulièrement. La Contribution au Service Public de l'Electricité, qui finance les tarifs d'achat, sera réformée de telle sorte que toutes les EnR soient incluses dans le calcul. Concernant la chaleur renouvelable, à court terme, le fonds chaleur sera triplé et des tarifs d'achat seront créés. L'autoconsommation de la production EnR sera soutenue.

Les gains potentiels en ce qui concerne l'efficacité énergétique sont recherchés dans tous les secteurs. Dans le secteur des bâtiments, nous prévoyons un grand programme de réhabilitation énergétique, afin de viser la rénovation au niveau « BBC rénov » de tous les bâtiments existants d'ici 2050. Pour cela de nombreux dispositifs seront mis en place (réforme de l'Eco PTZ et du CIDD, fonds de garantie, Sociétés publiques de Tiers Financement, formation professionnelle…). Dans le secteur de l'industrie, sur la base d'une étude extérieure, nous estimons possible d'atteindre 18% de réduction de consommation énergétique finale dans l'industrie en 2020 par rapport à 2008 (-20% dans la chaleur et -12% dans l'électricité) et 42% à l'horizon 2050.
Pour les transports, développement des transports en commun (infrastructures existantes ou nouvelles), soutien aux nouveaux usages (auto partage, covoiturage), investissement (recherche et production) dans les nouvelles technologies (véhicule à 1L/100km, hybrides, électrique…), aménagement du territoire adapté (urbanisme densifié), nouvelles pratiques (bureaux partagés, télétravail)…
D'une manière transversale, l'efficacité énergétique sera encouragée par un renforcement de la réglementation, de la fiscalité, des outils de type bonus-malus, des Certificats d'Economie d'Energie (CEE, renforcés et réformés), mais aussi par le développement d'outils novateurs (fonds de garantie) et de services publics adaptés (sociétés de tiers financement, services publics locaux de la maîtrise de l'énergie).

AE : Prévoyez-vous une remise à plat de la fiscalité globale et quelle place y aurait la fiscalité environnementale ?


EJ :
Evidemment, la fiscalité environnementale doit prendre une place importante afin d'orienter les investissements.
Je porte la proposition d'une contribution climat énergie (CCE) qui reposera sur une triple assiette. La première est énergétique. Pour cela, une révision de la fiscalité énergétique existante sera nécessaire et suffisante, dès lors que l'alignement se fait sur le « mieux disant environnemental ». Il est en effet indispensable de supprimer toutes les exonérations dont bénéficient certains acteurs ou certains types de consommations. La seconde assiette est celle des émissions de gaz à effet de serre. Cette nouvelle taxe s'appliquera sur toutes les émissions de gaz à effet de serre, dès lors que cela est techniquement faisable. Le taux devra suivre les valeurs hautes du rapport Quinet. Pour l'évaluation budgétaire, nous avons appliqué un taux de 36€/tonne éq. CO2 en 2013 puis une croissance annuelle de 6%.
La troisième assiette est celle des combustibles fissiles consommés, qui représentent également une externalité environnementale majeure. Sur le modèle des taxes envisagées en Allemagne et en Belgique, nous souhaitons une taxation de l'Uranium à hauteur de 145€ par gramme, avec une croissance de 5% par an ensuite.
En ce qui concerne l'articulation avec le système de quotas européens (SCEQE), nous estimons qu'il est nécessaire d'articuler le prix payé au travers d'une taxe avec celui qui est payé au travers des quotas. Cela peut se faire par exemple par l'introduction d'un prix plancher pour les quotas, dont la valeur tend vers le taux de la taxe carbone. Cela aurait le mérite d'introduire une perspective de long terme pour l'industrie. Cependant, cette mesure semble plus facilement applicable parallèlement au développement d'un ajustement aux frontières de l'Union Européenne et une fiscalité écologique des transports internationaux seront développés. C'est pourquoi, nous portons également ces deux propositions, avec une modalité spécifique : les recettes payées sur les produits importés seront reversées aux pays exportateurs au travers d'un « fonds vert » qui leur permettra d'investir dans l'efficacité énergétique et dans la réduction des émissions de GES.
Nous estimons que l'ensemble de ces nouvelles mesures a un potentiel fiscal annuel d'environ 25 à 30 milliards d'euros.
L'intégralité de ces nouvelles recettes sera utilisée pour permettre la transition énergétique, et elles seront suffisantes pour couvrir les programmes que nous proposons. La redistribution se fera prioritairement à destination des ménages et des entreprises les plus vulnérables, au travers de nos politiques publiques qui permettent la transition énergétique.

AE : Quel modèle agricole défendrez-vous si vous être élue ?


EJ :
Pour faire évoluer le modèle agricole, il sera nécessaire de mettre en place une série de mesures à différents niveaux, portant sur la démocratisation de la gouvernance de l'ensemble des structures agricoles et para-agricoles, sur l'installation des agriculteurs plutôt que l'agrandissement, sur le maintien d'une agriculture paysanne, le soutien de l'agriculture biologique qui est pour nous le modèle le plus abouti d'agroécologie, mais aussi le soutien à d'autres formes d'agro-écologie comme l'agriculture intégrée, l'agriculture durable. Je réorienterai la recherche agronomique et l'enseignement agricole et agronomique vers l'agroécologie. J'instaurerai une taxe sur les nitrates et augmenterai de façon très conséquente la redevance sur les pesticides en utilisant son produit pour aider les agriculteurs à sortir des pesticides en une génération. L'ensemble de ces mesures sera déterminé par une nouvelle loi d'orientation agricole remplaçant l'actuelle loi de modernisation agricole.

Au niveau européen je considère que la réforme proposée pour la PAC ne va pas suffisamment loin en termes social et environnemental. Je souhaite que la France influence cette réforme de manière à ce que les aides soient plafonnées par actif et selon des critères environnementaux beaucoup plus sérieux, afin que les aides aillent en priorité aux agriculteurs créant de l'emploi et préservant les ressources naturelles. J'inciterai à la mise en place d'un plan protéine à l'échelle européenne afin que la France devienne autosuffisante en protéines végétales au lieu d'importer du soja. Enfin j'inciterai à la mise en place de mesures de régulation et de protection afin que les agriculteurs soient le moins possible soumis aux fluctuations incessantes des cours, à la spéculation et au dumping social et environnemental et aux concurrences injustes et ruineuses.
Concernant les OGM je suis fermement opposée à leur culture en plein champ et je pense que l'Europe devrait les interdire.

AE : Quelle position française porterez-vous dans les négociations internationales en cours ?


EJ :
Si je suis élue présidente de la République, je ferai tout pour que la France porte une voix forte au sein de Rio +20 aux côtés de ses partenaires européens car c'est un rendez-vous crucial pour l'avenir de notre planète. Il faut notamment que des objectifs clairs soient fixés à l'horizon 2022 et non 2030 pour dépasser l'idéologie de la croissance et du profit financier et que ceux-ci soient assortis d'engagements contraignants, afin que l'on puisse en assurer le suivi et l'évaluation. Un statut juridique pour les biens publics mondiaux et biens communs devrait également être créé, de même qu'une fiscalité environnementale pour l'ensemble des pays de la planète, une taxation des flux financiers dédiée à un fonds environnemental et bien sûr une Organisation mondiale de l'environnement (OME) sous égide des Nations Unies. Les décisions de l'OME seraient opposables à l'OMC afin d'influer sur le commerce mondial.
Si j'étais élue présidente, je mettrais également tout en œuvre pour appuyer la création d'un Tribunal international de justice climatique fonctionnant sur le modèle de la Cour de La Haye, ainsi qu'au sein de la Cour Pénale Internationale, une chambre spécialisée sur les crimes environnementaux.

Réactions9 réactions à cet article

EJ : Si je suis élue présidente de la République,

C'est totalement décrédibilisant.

"Oui, j’ai un mandat de TOUS  les écologistes pour mener cette campagne" (dans Médiapart le 23 janvier)
C'est absolument faux. De nombreux vieux (qui n'ont pas attendu après elle) ou jeunes écolos de terrain, avec un train de vie   le plus possible conforme à leurs convictions depuis plus ou moins longtemps, ne voteront pas pour cette porte-drapeau très mal choisie, même si Hulot n'était pas non plus un bon choix
A défaut d'une nouvelle Solange Fernex, Stoll, le maire écolo de Kayserberg était plus crédible et aurait plus mobilisé de voix
Pourquoi ?
1/ Parce qu'ils ne la croient pas vraiment

Sprikritik | 18 avril 2012 à 06h12 Signaler un contenu inapproprié

Bonjour,

Il manque la réponse à la question sur son point de vu d'une bonne gestion de l'eau.

Cordialement

Nico | 18 avril 2012 à 08h57 Signaler un contenu inapproprié

"les contraintes réglementaires superflues" (sic). Il doit s'agir du peu de protection du cadre de vie et des paysages devant le désastre éolien.
Alors, non merci.

sirius | 18 avril 2012 à 10h21 Signaler un contenu inapproprié

Ca fait du bien d'entendre un discours courageux et cohérent...et non démagogique: oser parler de taxes et d'économies d'énergie, certains n'osent pas le faire et qui seront élus!
J'apprécie aussi qu'Eva Joly aille jusqu'à la création d'un Tribunal International de Justice Climatique pour dénoncer les crimes environnementaux, cela me semble pertinent.

Que le porte-drapeau soit d'origine norvégienne gêne apparemment mon prédécesseur (Sprikritik)? Dommage, nous parlons d'un problème planétaire qui se contre-fiche de nos frontières humaines! Si nous ne sommes pas capables de faire l'effort d’attention que réclame un accent étranger (même à l'écrit!!!), nous serons bien incapables de ralentir la machine infernale que nous continuons à alimenter en énergie fossile pour qu'elle nous broie plus sûrement.

takine | 18 avril 2012 à 10h57 Signaler un contenu inapproprié

Tous les candidats nos proposent un avenir , sinon meilleur, mais plus près de nos préoccupations ? Mais , une fois élus, ce sera la majorité
dite présidentielle qui nous imposera ses lois ! et critiquera, voire supprimera ce que l'autre majorité avait voté ou promis. On nous dira
que c'est ça la démocratie! Nous devinons déjà l'ambiance de confrontation qui régnera durant les séances de ;Questions au Gouvernement, trop souvent un spectacle de cirque pu d'opposition
systématique. Mais, en France, nous avons besoin de discours et de réunionites et durant ce temps, en Allemagne surtout, on se réunit
à une même table et ne se quitte pas sans une décision concrète ,à
mettre en pratique très vite. Hélas, Nicolas Hulot a dû abandonner!

arthur | 18 avril 2012 à 21h06 Signaler un contenu inapproprié

Et pour qui voteront les écolos alors?

Vous pouvez toujours voter pour Marine, au moins elle n'annonce pas de choses qu'elle ne réalisera jamais...

Sprilogik | 19 avril 2012 à 10h53 Signaler un contenu inapproprié

Ça n'a pas de sens de voter pour Joly.

Est-si difficile que ça de comprendre qu'il s'agit d'élire un président, et pas de dire au premier tour « Moi j'aime untel », ou « Moi j'aime le programme d'Untel », ou encore « Moi j'aime Untel ET son programme » ?
Le mode de scrutin et le code électoral étant étant ce qu’il sont, c'est irrationnel, – désolé de le dire aussi brutalement ! – , surtout quand ni Untel, ni son programme n’ont aucune chance d'être au second tour, parce que la droite et la gauche “classique” disposent a priori d’un capital de voix pré-acquis .

C’est pas du tout du cynisme, mais du réalisme; une élection présidentielle, c’est fait pour élire un président parmi les présidentiables; pas parmi ceux qui ont voulu, plus ou moins égoïstement et narcissiquement, s’offrir des tribunes médiatiques à nos frais à cette occasion actuellement quinquennale

Or il n’y en a que deux, cette fois qui peuvent être au second tour; puisque les grosses casseroles sarkozyiennes actuellement mises en avant par Médiapart surtout et l’ex-juge Joly-Farseth, ne semblent pas beaucoup faire réagir, ce qui aurait pu éventuellement profiter à Bayrou (s’il était un peu plus crédible et qu’on connait mal).

Il s’agit donc de voter POUR celui qu’on aime, à tort ou à raison , avec ou sans illusion, ou CONTRE celui qu’on ne veut absolument pas, à tort ou à raison. L'homme – suffisamment équilibré et généreux ? - étant encore plus important que le programme.

sprikritik | 19 avril 2012 à 18h20 Signaler un contenu inapproprié

Mon pauvre Sprikritic, tu n'en as pas beaucoup "d'esprit critique" (argumentaire faible, pas d'analyse)... Ton discours manque vraiment de CLARTÉ !

YaKaYFoKon | 27 avril 2012 à 18h02 Signaler un contenu inapproprié

Le programme énergétique de Mme Joly est totalement irréaliste, et a été rédigé par des idéologues complètement déconnectés de la réalité. Il suffit de regarder l'évolution de la consommation d'énergie des français depuis 40 ans pour se rendre compte qu'il est impossible de réduire sa consommation de 50 % en 2050 par rapport à 2009. Le chiffre de 50 % a été calculé à partir de prévisions tout à fait optimistes de production d'énergie renouvelable, et non pas à partir des économies possibles d'énergie. D'autre part, l'arrêt du nucléaire et le passage aux renouvelables induit une augmentation très importantes des émissions de CO2 (qu'elle veut réduire de 85 % !!) parce que chaque centrale éolienne et chaque centrale solaire nécessite une centrale back-up au gaz, pour prévenir les intermittences de ces systèmes . En effet, on ne sait pas stocker une grande quantité d'énergie électrique. Donc, oublions vite ce programme pour passer à des propositions plus sérieuses.

Pierre-Ernest | 06 mai 2012 à 11h08 Signaler un contenu inapproprié

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