Le plan Borloo sur les énergies renouvelables ne devrait que renforcer cette tendance. Il prévoit en effet l'installation d'au moins une centrale par région d'ici 2011. Deux installations de 10 MW dans les plus ensoleillées, une seule dans les moins bien pourvues. L'appel d'offre devrait aboutir en décembre 2009 mais déjà des projets se concrétisent. Ce plan s'accompagne d'un tarif de rachat de l'électricité incitatif (0,20 € le kWh)
Selon les calculs, l'objectif gouvernemental occuperait entre 10.000 et 15.000 hectares de terrain… Or, 10.000 hectares, c'est déjà trop quand on sait que chaque année 72.000 hectares disparaissent à cause de l'urbanisation, commente André Barbaraux, directeur de la Fédération Nationale des Safer (sociétés spécialisées dans la vente de biens fonciers ruraux).
Au moment de la lutte contre l'artificialisation des sols, il est vrai que le manque d'encadrement actuel de ce déploiement pose question. Nous ne sommes pas opposés au photovoltaïque. Nous disons juste que concernant les centrales au sol, il faut faire attention. Leur développement ne doit pas entrer en conflit avec la nécessaire préservation des terres agricoles, forestières et des espaces naturels. D'autant que les centrales photovoltaïques peuvent se déployer sur les toitures de bâtiments agricoles, industriels et commerciaux en prenant en compte les obligations relatives aux paysages et aux sites protégés. Dans ce cas, cela peut même entraîner un complément de revenu non négligeable pour les propriétaires concernées dont les agriculteurs.
L'impact environnement des centrales solaires au sol
Outre l'impact sur le paysage, les centrales photovoltaïques au sol peuvent avoir des conséquences directes sur l'environnement local. Modification des biotopes, érosion des sols, déplacement de la faune sauvage font partie des impacts que peut avoir ce type d'installation.
Mais la question qui préoccupe avant tout les associations environnementales et les agriculteurs concerne la concurrence des sols. En effet, au moment où la sécurité alimentaire devient une priorité et où le gouvernement s'engage à lutter contre l'artificialisation des sols, une nouvelle concurrence avec l'agriculture voit le jour au travers des centrales au sol.
On assiste à un engouement très fort des investisseurs dans certains départements comme les Alpes de Haute Provence, les Landes ou la Réunion. Cela pourrait priver les agriculteurs de leur outil de production. Par exemple, les investisseurs proposent un tarif de 2.000 à 3.000 € l'hectare pour l'implantation de centrales photovoltaïques alors qu'un bail rural, pour le fermage, ne dépassera pas 500 à 700 €.Cela pose un gros problème de concurrence, note André Barbaraux.
Si les partisans du développement de ce type d'installation arguent que les objectifs fixés par la France porteraient l'utilisation des surfaces agricoles utiles à moins de 0,1 %, pour André Barbaraux, ce n'est pas tant la quantité qui compte mais la qualité. Nous craignons un mitage des terres, une implantation en timbre poste des centrales. Cette implantation déstructurerait le sol agricole. Il faut définir des zones d'implantation, encadrer ce développement. À l'instar des ZDE, (Zone de Développement Eolien) le développement des centrales photovoltaïques au sol devrait-il être circonscrit dans des zones définies à cet effet ?
Si à Narbonne, la centrale qui occupe 23 ha a été implantée sur un site classé Seveso, d'autres projets, comme celui de Gabardan, créent la polémique car ils nécessitent un déboisement par exemple. De nombreuses voix s'élèvent donc pour demander qu'un encadrement soit mis en place. Le Ministère du développement durable réfléchit aujourd'hui à la pertinence d'élaborer une procédure d'autorisation des capteurs solaires au sol.
Un dispositif peu encadré pour l'instant
Car aujourd'hui, les centrales au sol ne font pas l'objet de permis de construire. Il est possible de les implanter sur des espaces agricoles sans autres formalités que celles liées aux équipements annexes tels les transformateurs. Ce n'est que lorsque le montant de l'investissement dépasse 1,9 millions d'euros que le projet est soumis à une étude d'impact.
S'il n'existe pas aujourd'hui de procédures nationales permettant de contrôler le développement des centrales photovoltaïques au sol, des initiatives locales voient le jour. Ainsi, les préfets des Alpes-Maritimes et de la Réunion ont prévu la mise en place de procédures qui se rapprochent des permis de construire, explique André Barbaraux.
Pour sa part, le ministère a publié un « guide sur la prise en compte de l'environnement dans les installations photovoltaïques au sol ». Très largement inspiré d'un document de référence publié par le ministère allemand de l'environnement, le guide détaille les différents paramètres à prendre en compte.