Une technique appliquée dans le secteur viticole a toutes ses chances de figurer parmi ces pratiques : l'enherbement des parcelles de vignes. Technique étudiée depuis 1960, l'enherbement des sols consiste à implanter une couverture végétale entre les rangées de vignes. Selon les statistiques d'Agreste consacrées aux pratiques culturales et présentées par le Service de l'Observation et des Statistiques (SOeS)*, cette technique était répandue sur plus du tiers du vignoble français en 2006. De nombreux viticulteurs d'Alsace, du Bordelais et des Charentes la pratiquent depuis plus de 15 ans. Dans ces trois régions, respectivement 85, 80 et 61% des surfaces de vigne sont concernés alors que cet enherbement n'est obligatoire que sur une petite part du territoire (17% en Alsace et 9 % dans le Bordelais).
De multiples avantages
Les viticulteurs qui pratiquent cette technique recherchent principalement à concurrencer la vigne. Le couvert végétal limite en effet la vigueur de la vigne parce qu'il la concurrence pour l'eau et les éléments nutritifs. Cette technique est souvent associée à l'effeuillage et à la vendange des grappes vertes pour diminuer le rendement mais augmenter la qualité des raisins.
Les études qui se sont intéressées à cette pratique démontrent également son intérêt pour limiter le développement du Botrytis, ce champignon appelé communément « pourriture grise » et qui affectionne particulièrement l'humidité. Or, les trois quarts des interventions de traitement chimiques sont destinées à lutter contre les maladies fongiques. L'enherbement aurait donc un effet indirect sur l'utilisation de pesticides.
De leur côté, les viticulteurs charentais pratiquent l'enherbement afin de renforcer la portance du sol ce qui permet le passage des engins indépendamment de la pluviométrie. Le couvert permanent lutte en effet contre l'érosion et le ruissellement.
Mais cette technique a surtout un avantage environnemental et économique non négligeable pour les viticulteurs en limitant directement l'utilisation d'herbicides. En moyenne, les vignerons appliquent deux traitements herbicides mais selon les statistiques d'Agreste, ceux qui enherbent entre tous les rangs limitent neuf fois sur dix les applications aux seuls rangs de vigne et non à l'ensemble de la parcelle. Un moyen de diviser par trois les quantités déversées.
Une technique à moduler en fonction des parcelles
Malgré tous ses avantages, la technique de l'enherbement n'est pas encore généralisée dans les vignobles français. Les régions plus exposées à la sécheresse et où le Botrytis est peu présent ne la pratiquent pas. Ainsi, les viticulteurs du Languedoc-Roussillon ou de Provence ne mettent en place un couvert permanent que sur respectivement 18 et 15 % de leur vignoble.
L'enherbement est également délaissé par les vignobles où l'écartement entre les rangées est étroit comme en Champagne. Un faible écartement des rangs de vigne est un obstacle important à la mise en place d'un couvert permanent car il rend difficile voire impossible le passage des engins nécessaires à l'entretien du couvert. Résultats, là où les rangs sont séparés de moins de 1,20 mètre, le couvert n'est adopté que sur 20 % des surfaces.
Le vignoble champenois privilégie par ailleurs un autre moyen de prévenir l'érosion des sols viticoles : la couverture du sol par de la paille ou des écorces. Une solution expérimentée dans 30 % du vignoble champenois et peu répandue ailleurs.
Dans ces régions, le couvert végétal doit donc être modulé. Il est par exemple envisageable en hiver dans les régions exposées à la sécheresse. À cette période propice à l'érosion, le couvert protège tout en limitant sa concurrence avec la vigne. L'enherbement peu également être limité dans l'espace en réduisant la largeur de la bande enherbée ou le nombre d'inter-rangs enherbés.
Enfin, les viticulteurs peuvent également jouer avec la vitesse de croissance du couvert et choisir des espèces à croissance lente et limitée comme les fétuques, certains ray-grass ou encore paturins.
La chambre d'agriculture de Rhône-Alpes donne également une série de conseils pour adapter la technique. La surface à enherber doit dépendre du type de sol pour limiter la concurrence hydrique et les vignes doivent être âgées de 2 à 3 ans au moins pour avoir un développement racinaire suffisant. De plus, le sol ne doit pas contenir de résidus actifs d'herbicides. L'emploi d'herbicides rémanents est donc à proscrire pendant 1 an au mois avant implantation. Enfin, l'enherbement des zones exposées au gel doit être évité car il accentue l'effet isolant en limitant la restitution de chaleur par le sol.
*Le Service de l'Observation et des Statistiques (SOeS) a intégré récemment l'IFEN dissous par décret en date du 27 novembre 2008. Le SOeS est lui-même intégré au Commissariat général au développement durable (CGDD).