Dans une étude parue le 6 août dans la revue "Emerging Microbes & Infections - Nature (1) ", des chercheurs de l'Institut de recherche pour le développement (IRD) ont démontré un lien "direct" entre une maladie émergente en Amérique latine, l'ulcère de Buruli, et le changement climatique. Cette étude a été menée en partenariat avec l'Université de Bournemouth (Angleterre) et le centre hospitalier de Cayenne (Guyane).
L'ulcère de Buruli est une grave maladie cutanée due à une mycobactérie (Mycobacterium ulcerans) de la même famille que celles de la lèpre et de la tuberculose. La plupart des cas surviennent dans des communautés rurales en Afrique subsaharienne et en Amérique du Sud, où des cas sont répertoriés depuis la fin des années 1960, essentiellement en Guyane française.
Conditions pluviométriques
Les chercheurs ont montré "une corrélation" entre les pics épidémiques de cette infection observés en Guyane française depuis quarante ans et "les épisodes pluvieux, dont les perturbations dues à El Niño, de plus en plus fréquentes du fait du réchauffement de l'océan Pacifique".
La "réduction des pluies et de leurs écoulements" a entraîné la multiplication de zones d'eaux "stagnantes résiduelles", où prolifère la bactérie responsable Mycobacterium ulcerans. "La plus grande accessibilité des habitats marécageux qui en résulte facilite leur fréquentation par les humains (pêche, chasse, etc.) et intensifie ainsi leur exposition au micro-organisme persistant dans ce type d'environnement aquatique", explique l'IRD.
Au regard des conditions pluviométriques de ces dernières années, les chercheurs craignent "une possible recrudescence" de cas d'ulcère de Buruli dans la région. "Au-delà d'une amélioration de la prévision du risque épidémique, ces travaux soulignent la nécessité de prendre en compte un ensemble de paramètres et leurs interactions. Contrairement à l'idée admise, moins de pluies ne signifie pas à coup sûr une baisse de la prévalence de maladies infectieuses comme le montre cet exemple", préviennent les chercheurs. De même, le réchauffement atmosphérique "attendu pourrait offrir des conditions de température impropres au cycle de développement de certains agents pathogènes, comme pour le paludisme en Afrique".
Facteurs hydrologiques
Dans une étude parue fin janvier dernier dans la revue "'Plos Neglected Tropical Diseases (2) ", l'IRD et l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ont souligné "le rôle prépondérant des facteurs hydrologiques (3) sur les pics" de la maladie chez l'homme. Une infection par contact direct avec la peau "apparaît aujourd'hui très peu vraisemblable", ont-ils estimé. Une transmission de la bactérie à l'homme "par des piqûres de punaises aquatiques semble être une voie possible mais doit être confirmée", ont-ils ajouté.