Ce texte permet l'application de l'article L.541-10-3 du Code de l'environnement qui pose le principe, à compter du 1er janvier 2007, de la responsabilisation financière des metteurs sur le marché de produits textiles par le versement de soutiens financiers aux opérateurs de tri et/ou collectivités locales impliquées, et prévoit la création d'un éco organisme dédié.
Le texte précise ainsi les conditions de la mise en place d'une contribution textile versée par les producteurs et/ou importateurs de textiles d'habillement, de chaussures et de linge de maison à destination des ménages. Un éco-organisme sera chargé de la redistribution de la contribution aux opérateurs de tri et, dans une moindre mesure, aux collectivités territoriales. La contribution sera reversée aux entreprises qui s'engagent à réemployer ou recycler au moins 70% du tonnage collecté et à embaucher au moins 15% de salariés dans le cadre d'un contrat d'insertion. Le montant de la taxe reste à déterminer aujourd'hui. Les collectivités, quant à elles, toucheront une partie de la contribution pour leurs activités de communication.
La publication du décret a été suivie de l'annonce de la création d'un éco-organisme, Eco-TLC, par trente entreprises du commerce et de l'industrie, dont Carrefour, Auchan, les Galeries Lafayette, Décathlon… La société pourrait être opérationnelle d'ici fin 2008. Auparavant, il lui faudra obtenir l'agrément des pouvoirs publics. Le dossier devrait être déposé avant la fin du mois.
Une filière organisée par l'économie solidaire
La nouvelle réglementation poursuit un double objectif : favoriser l'emploi et l'insertion dans les structures de l'économie sociale et solidaire et augmenter les volumes collectés et valorisés.
La filière textile constitue un gisement de 700.000 tonnes de déchets par an. Aujourd'hui, 100.000 tonnes sont collectées. Les textiles récupérés connaissent différentes issues : selon Federec, 50 % de ces vieux textiles sont acheminés vers les pays en développement afin d'être réutilisés, 20 % se transforment en chiffons d'essuyage, 10 % sont destinés à la cartonnerie, 8 % à l'effilochage et 12 % sont détruits.
La filière est organisée dans sa large majorité par des entreprises d'économie sociale avec en tête Emmaüs. Ce secteur représenterait 5.000 emplois, dont un tiers dans des entreprises d'insertion.
Emmaüs France s'est félicité de la parution du texte, précisant que l'éco-contribution va permettre à tous les acteurs de la filière de récupération textile de pérenniser et de développer cette filière. (…) Plusieurs réseaux de l'économie solidaire s'organisent déjà pour être encore plus efficaces tant sur le plan de l'environnement en collectant et triant toujours plus que sur le plan social en créant des emplois et des postes d'insertion.
Le décret permet donc la préservation d'une filière existante mais aussi son soutien. La filière se trouve en effet en difficultés depuis quelques années. Entre 2002 et 2005, 20 % des structures privées ou d'insertion auraient fermé leurs portes, poussées par une baisse des revenus liés à cette activité. La filière de recyclage aurait en effet perdu en rentabilité en raison de la baisse de qualité des vêtements et de la concurrence des vêtements neufs bon marché.
L'emploi favorisé par rapport à l'environnement ?
La filière textile soutiendra donc principalement les opérateurs de tri. Les collectivités locales seront impliquées mais dans une moindre mesure. Celles-ci ne percevront qu'une partie minime de l'éco-contribution, pour leurs activités de communication.
Les opérateurs de collecte et de tri signent des conventions avec les collectivités pour l'installation de conteneurs permettant aux associations de collecter les textiles usagés, explique Jonathan Decottignies, chargé de mission au Cercle National du Recyclage. Cependant, 600.000 tonnes de déchets textiles sont encore à la charge des collectivités locales. Rien n'est prévu dans le texte pour cette partie des déchets. Et les objectifs annoncés par Eco-TLC ne sont pas satisfaisants.
D'ici 2012, l'éco-organisme envisage de porter à 130.000 tonnes le volume de déchets collectés (contre 100.000 aujourd'hui) et d'accroître le nombre d'habitants ciblés de 20 millions à 41 millions.
Ces objectifs sont faibles aux vues des conclusions du Grenelle de l'environnement et de l'expérience de la France au travers les autres filières (DEEE, piles et batteries, imprimés non sollicités…), commente Jonathan Decottignies. Ce texte est là davantage pour protéger l'intérêt de certaines entreprises. Nous aurions souhaité une réelle application de la responsabilité élargie des producteurs et que chaque acteur reçoive les soutiens nécessaires pour l'action qu'il mène dans la filière.
À partir de 2009, l'éco-organisme versera 250.000 € par an (sur un budget annuel de 10M€ environ) à la recherche afin de soutenir le développement de textiles plus écologiques. Des actions devraient également être menées envers les producteurs qui mettraient sur le marché des textiles respectueux de l'environnement. Le décret prévoit en effet que la contribution peut être minorée pour les produits respectant les critères du label écologique mentionné par le règlement (CE) 1980 / 2000 du 17 juillet 2000 susvisé ou de tout système de labellisation écologique équivalent.