Après six mois de travail et d'auditions, le rapporteur de la loi Grenelle 2 Bertrand Pancher a remis au Président de la République ses premières propositions sur la gouvernance environnementale, destinées à mieux associer les citoyens à la concertation et aux décisions publiques. ''Si des progrlès existent déjà, l'organisation de la participation du public connaît encore des limites qui justifient d'essayer d'améliorer les dispositifs existants et de promouvoir de nouveaux outils pour impliquer davantage les citoyens dans la préparation des décisions publiques touchant à l'environnement'', analyse Bertrand Pancher.
Le rapport et les 23 propositions de Bertrand Pancher sont consultables du 2 mai au 1er juin 2011 sur le blog dédié gouvernanceenvironnementale.wordpress.com. L'objectif est de ''jouer le jeu de la concertation'', via une interaction avec le public.
Information environnementale : vers une agence française du développement durable ?
Première proposition du député : créer une agence indépendante, l'agence française du développement durable, chargée de l'information environnementale au niveau national et de la participation du public. Aujourd'hui, le dispositif d'information est ''éclaté en entités distinctes et peu coordonnées''. L'objectif est de créer un guichet unique, mieux identifié par le public, tel qu'il existe au niveau européen (Agence européenne de l'environnement, AEE), en Finlande ou au Danemark et d'organiser les conditions d'une interaction entre information, prospective et évaluation. Composée de l'Autorité environnementale du Conseil Général de l'Environnement et du Développement Durable (CGEDD), du Commissariat général au développement durable (CGDD), du Comité de prévention et de précaution (CPP) et de la Commission nationale du débat public (CNDP), elle pourrait également fonctionner selon le principe de gouvernance à 5 du Grenelle.
Parallèlement, le député préconise de poursuivre le développement du portailtoutsurlenvironnement.fr, en y associant toutes les institutions publiques nationales, les ministères et leurs établissements publics, les Préfectures et les directions régionales de l'Environnement et les collectivités locales et des établissements publics de coopération intercommunale de plus de 15.000 habitants.
''L'adhésion pourrait être rendue obligatoire pour l'ensemble des collectivités locales qui disposent des documents relevant des thématiques du Grenelle de l'environnement (par exemple les documents d'urbanisme, tels les PLU, SCOT, PLH..)'', précise Bertrand Pancher.
Pour faciliter l'accès à l'information environnementale, la mission propose également de rendre exécutoires les avis de la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), qui a aujourd'hui un rôle consultatif.
Reconnaître l'expertise et la dissocier de la décision
Bertrand Pancher préconise de clarifier les rôles entre expertise et décision. Il souhaite que soit dissocié, dans les missions des organismes publics, ce qui relève de la gestion du risque environnemental ou sanitaire et ce qui relève de l'expertise environnementale ou sanitaire. Les sciences humaines et sociales doivent également se voir attribuer une place plus importante dans l'expertise (notamment dans les conseils d'administration des organismes de recherche publics), aux côtés des scientifiques.
Le député conseille de reconnaître le rôle des lanceurs d'alertes. Cette mission pourrait être confiée à l'agence française du DD qui aurait également un rôle de médiateur. ''Après que les procédures internes aux entreprises ont été épuisées, l'agence aura pour mission de répondre au lanceur d'alerte soit en classant le dossier s'il s'avère que les études existantes sont suffisantes, soit en lançant de nouvelles investigations dont les résultats seront publiés''.
Au niveau régional, pour clarifier les rôles, le député préconise de déconcentrer l'Autorité environnementale en créant des comités régionaux de l'AE, ''qui reprendraient les compétences exercées par les Préfets de région, aujourd'hui juges et parties lorsqu'ils agissent en qualité d'AE''.
L'Autorité environnementale pourrait également évaluer les études d'impacts des lois et règlements, ''une procédure similaire à celle utilisée au sein de la Commission Européenne à Bruxelles (comité des études d'impact). Il s'agit de disposer d'un processus de contrôle qualité efficient des études d'impacts''.
Améliorer les débats publics et la concertation
Renforcer l'information sur les installations nucléaires
Bertrand Pancher préconise de renforcer les moyens d'actions des conseils locaux d'information (CLI), qui ''jouent un rôle majeur dans l'information des citoyens'' sur les installations nucléaires. Il propose notamment de reverser 1 % de la taxe sur les installations nucléaires de bases (INB) aux CLI pour leur permettre un financement régulier.
La gouvernance à 5 doit être introduite dans la phase préparatoire du débat public (réunion de concertation avec les parties prenantes locales intéressées par le projet) afin de faire la ''synthèse des avantages et inconvénients du projet sans préjuger de la décision finale''.
Les résultats de la procédure de consultation doivent ensuite être mieux pris en compte par le maître d'ouvrage. ''Pour aller plus loin, la mission préconise de rendre obligatoire la motivation des décisions prises par le maître d'ouvragelorsqu'il n'a pas retenu les observations faites, afin que les participants à la consultation en connaissent les raisons''.
La CNDP pourrait également être chargée d'organiser des débats sur des enjeux de société, par saisine du Parlement ou du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
À l'échelle locale, afin de combler un déficit de démocratie participative, il s'agit de remettre à plat toutes les instances de concertation et de permettre aux CESER (conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux) de rendre systématiquement un avis, sur saisine du représentant de l'Etat, sur les politiques publiques régionales mises en place par l'Etat.
Les Conseils de développement doivent devenir obligatoires pour les collectivités de plus de 50.000 habitants et leur fonctionnement doit être plus efficace (présentation d'un rapport annuel…).