Le lundi 17 mars, Greenpeace avait en effet intercepté, au large de Ouistreham, un cargo battant pavillon maltais, le ''Galinea III'', transportant 6.000 tonnes de bois brésilien afin d'empêcher le débarquement de sa cargaison que l'association juge ''illégale''.
Selon Greenpeace, la cargaison à destination du port de Caen-Blainville provient d'exploitants forestiers s'illustrant depuis des années dans des pratiques illégales en Amazonie. 60 à 80 % du bois au Brésil est exploité illégalement, dénonce l'association. Plus de la moitié du bois amazonien exporté arrive en l'Europe et la France est le plus gros importateur européen de bois brésilien, souligne Greenpeace. L'organisation écologiste a demandé lundi aux autorités françaises d'empêcher le déchargement en attendant d'obtenir du gouvernement brésilien la preuve de la légalité du chargement et des certificats.
Le gouvernement français doit s'engager immédiatement à défendre auprès de la Commission européenne et des autres Etats membres une législation européenne interdisant la mise sur le marché de bois illégal et non-durable. Le processus de destruction doit cesser !, a déclaré Grégoire Lejonc, chargé de la campagne forêts à Greenpeace France.
Quatre militants sont restés accrochés aux grues de déchargement du Galina III jusqu'à hier soir 20h après que le Ministre de l'Ecologie, M. Borloo se soit engagé à soutenir une loi européenne contre le commerce illégal de bois exotique, souligne Greenpeace.
En effet, dans le cadre de la présidence française de l'Union Européenne, le ministre a indiqué qu'il prendrait des initiatives pour améliorer la lutte contre le commerce illégal et non durable de bois exotique. Jean-Louis Borloo a fait un point hier sur l'importation en France de bois exotiques, particulièrement en provenance du Brésil. Il s'est à ce titre entretenu avec son homologue brésilien, Marina Silva, pour évoquer avec elle la conformité des autorisations de commerce de ces bois. M. Borloo a également demandé aux douanes la plus grande vigilance concernant les importations en France de ces bois exotiques.
Notre action sur le Galina III a permis d'attirer l'attention des autorités sur ces trop nombreux bateaux qui arrivent chaque semaine à Caen, La Rochelle, Nantes ou Sète, chargé de milliers de m3 de bois issu du pillage des forêts tropicales, a déclaré Grégoire Lejonc, de Greenpeace France. Nous avions un objectif politique. Nous avons obtenu un engagement clair du ministre d'État. Nous attendons maintenant les effets dans la pratique, a averti Grégoire Lejonc.
Greenpeace a également appelé le Brésil à rejoindre le processus européen FLEGT (Forest Law Enforcement on Governance and Trade), dont l'objectif est de lutter contre la déforestation sauvage de forêts primaires afin de préserver la biodiversité et lutter contre le changement climatique. Rappelons que la déforestation de l'Amazonie au Brésil s'est gravement accrue ces derniers mois malgré les mesures de contrôle mises en place depuis trois ans par le gouvernement Lula, selon un rapport de l'association écologiste publié le 6 mars. Sur les 162 mesures prévues par le plan du gouvernement en 2004, plus de 60% n'ont pas été mises en œuvre, a déploré Greenpeace.
Dans le même temps, le gouvernement brésilien a renforcé le 5 mars son plan de lutte contre la déforestation, après le déboisement de 7.000 km2 de forêt vierge entre les seuls mois d'août et de décembre 2007. Le Brésil a annoncé la saisie automatique des terres déboisées illégalement et a doublé le montant des amendes en les portant à 5.000 dollars. Ces mesures vont dans le bon sens, mais ne seront efficaces que si le gouvernement a enfin la volonté ferme de les faire appliquer, a souligné Greenpeace.
13 millions d'hectares de forêt disparaissent chaque année dans le monde, surtout sous les tropiques. En marge de la conférence de Bali sur le climat, la Banque mondiale a annoncé le 11 décembre dernier le lancement d'un nouveau mécanisme financier baptisé le Forest Carbon Partnership Facility (FCPF) destiné à combattre la déforestation, responsable de 20% des émissions mondiales des gaz à effet de serre mais aussi d'une perte de la biodiversité et d'habitats pour les populations locales.
La déforestation de la forêt amazonienne pourrait relâcher entre 55,5 milliards et 96,9 milliards de tonnes de dioxyde de carbone dans l'atmosphère d'ici 2030, soit l'équivalent de deux années d'émission de CO2 dans le monde, avait indiqué l'organisation environnementale WWF dans un rapport publié en décembre dernier.
La déforestation des forêts tropicales touche également le bassin du Congo et l'Asie du Sud-Est. Chaque année, plus de 800.000 hectares de forêts tropicales du bassin du Congo (Gabon République Démocratique du Congo, etc.) sont détruits sous la pression démographique et économique alors qu'ils abritent la plus grande partie des populations de grands singes au monde. L'Indonésie qui possède notamment près de 80% des dernières forêts tropicales primaires d'Asie du Sud-Est (îles de Bornéo, de Sumatra et en Irian Jaya), a perdu en 50 ans 72% de ses forêts anciennes. L'exploitation du bois d'oeuvre, les plantations industrielles pour l'huile de palme et pour la pâte à papier sont autant de menaces qui pèsent sur ces forêts, leurs habitants, et les dernières populations d'orangs-outans, a indiqué les Amis de la Terre dans le cadre d'une campagne de sensibilisation, lancée en juin dernier. Il ne resterait plus aujourd'hui qu'entre 45.000 et 69.000 orangs-outans sur Bornéo et environ 7.300 sur Sumatra, selon l'organisation qui ajoute que chaque année, 5.000 orangs-outans disparaissent.