L'article 30 du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l'Environnement, adopté en 1ère lecture par l'Assemblée Nationale et le Sénat stipule que toutes les mesures seront mises en œuvre pour renforcer la lutte contre les pratiques illégales, réduire à la source et prévenir les pollutions maritimes, y compris les macrodéchets et déchets flottants, les dégazages et déballastages, et les espèces exotiques envahissantes, notamment dans les zones portuaires et les zones de protection écologique. Des mesures seront également prises pour réduire l'impact sur la mer des activités humaines venant du continent.
Dans cette continuité, le Grenelle de la Mer, destiné à définir une stratégie maritime nationale à long terme, a installé en décembre dernier, un groupe de travail piloté par l'association Robin des Bois pour avancer sur cette problématique des macrodéchets. L'objectif du groupe est la réduction de la pollution à la source, avait expliqué Jacky Bonnemains, membre de l'association Robin des Bois. Rappelons en effet qu'environ 70% des déchets retrouvés dans les mers et sur le littoral sont d'origine terrestre et de provenances diverses : abandons sur le littoral, rejets dans les ports, décharges, activités domestiques, agricoles et industrielles, trafic maritime, résidus de matériel de pêche… Ces déchets sont drainés, via les bassins versants, vers la mer.
65 recommandations pour réduire les macrodéchets
Le groupe de travail a ainsi remis le 7 mai son rapport et présenté 65 recommandations pour un plan coordonné de réduction des macrodéchets flottants ou échoués dans les fleuves, les ports, le littoral et en mer.
Parmi elles, figure le rassemblement et développement des recherches sur les impacts environnementaux et technico-économiques des macrodéchets et des substances toxiques ou espèces invasives associées dans les bassins versants et en mer.
Le groupe de travail propose également de développer de nouveaux modes d'information en promouvant notamment des campagnes nationales plurimédia et aux heures de forte audience telles que ''La rivière n'est pas une poubelle'', cofinancées par les régions ou l'Etat. Il recommande aussi d'alerter, par des actions d'information du Ministère de l'Education Nationale, de l'Association des Maires de France ou autre autorité, des risques environnementaux et juridiques des lâchers de ballons dont les épaves et fragments sont un indicateur important de la pollution du littoral et menacent la faune marine et aviaire. En effet, les oiseaux de mer, tortues ou mammifères marins peuvent ingérer ces morceaux de plastiques et s'étouffer. Même les ballons en latex dits ''biodégradables'' peuvent mettre plus de 5 ans avant de se dégrader.
Rappelons que les plastiques constituent l'essentiel des macrodéchets, de 60 à 95 % selon les sites. Sur la façade Atlantique européenne, environ 75% des déchets observés sont en plastique ou polystyrène. En Méditerranée, la proportion de plastiques est également de l'ordre de 75%.
Renforcer la réglementation
Parmi les autres recommandations du groupe de travail figure un renforcement de la réglementation en matière des déchets et des sanctions. La convention internationale (MARPOL), initiée par l'Organisation maritime internationale (OMI), vise à réduire la pollution par les ordures des navires, en exigeant que les pays signataires acceptent de recevoir les déchets de tous les navires qui font escale dans leurs ports. Dans le cadre de la révision de l'annexe V de cette convention, qui concerne les déchets d'exploitation et de maintenance des navires, le groupe de travail souhaite qu'aucun rejet ne soit autorisé en mer, y compris les broyats, sauf une liste très limitative de déchets organiques en s'appuyant sur l'engagement volontaire d'armateurs représentatifs.
Le rapport propose également de renforcer l'application de la réglementation nationale sur les envols des déchets dans l'ensemble des filières de collecte, de recyclage, de valorisation et d'élimination notamment en phase de transport routier et fluvial. Le groupe recommande aussi d'intégrer les macrodéchets parmi les sources de pollution ayant un impact sur l'état sanitaire et écologique des eaux et des milieux dans les Schémas Directeurs d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE), les Schémas d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) et les contrats de rivière.
Le groupe réclame en outre des sanctions sévères et propose de renforcer l'article L216-6 du Code Pénal qui rend passible de 75.000 euros d'amende et deux ans d'emprisonnement le fait de jeter ou abandonner des déchets ''en quantités importantes'' dans les cours d'eau ou dans les eaux de la mer. Le groupe de travail demande de supprimer la mention ''quantités importantes'' et d'alerter les autorités de police pour que les sanctions applicables à chaque abandon illégal de déchets soient appliquées avec la même diligence que celles relatives au stationnement des véhicules. Par ailleurs, le rapport propose d'établir un registre des ordures à bord des navires et de créer des filières de récupération des filets de pêche et des déchets des activités conchylicoles (élevage des coquillages).
Seule la combinaison d'actions curatives et préventives permettra d'enrayer ce fléau aggravé par l'effet dispersif des tsunamis, des tempêtes, des cyclones et autres dérèglements climatiques, souligne l'association Robin des Bois.
Quatre groupes de travail planchent depuis le 6 avril sur les différentes thématiques du Grenelle de la Mer et rendront leurs rapports le 9 juin. Parmi les premières propositions figurent une réduction de 50% des pollutions d'origine terrestre en mer d'ici 2020 ou le développement d'un bateau du futur, propre et autonome afin de réduire à zéro les pollutions d'origine marine, a indiqué Jean-Louis Borloo, ministre de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire.