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Actu-Environnement

Dix nouveaux indicateurs pour requalifier la richesse

L'Assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental a validé le 24 juin un jeu d'indicateurs phares complémentaires au PIB, qui seront annexés à la prochaine loi de finances, afin de mesurer la soutenabilité du progrès.

Gouvernance  |    |  A. Sinaï

Forgé pendant les Trente Glorieuses pour mesurer la croissance de l'après-guerre, le PIB demeure l'indicateur de référence pour mesurer la richesse d'un pays, mais il est de plus en plus controversé. L'idée que la croissance du PIB n'est pas uniformément bonne a fait l'objet d'un large débat notamment à la suite de la publication du Rapport sur la mesure des performances économiques et du progrès social de Joseph Stiglitz, Amartya Sen et Jean-Paul Fitoussi en 2009. A ce moment là, un consensus semblait s'être affirmé sur le caractère radicalement insuffisant et trompeur du PIB, qui tend à occulter les inégalités, le bien-être et les atteintes à l'environnement.

Or, les nouveaux indicateurs peinent à trouver une véritable reconnaissance dans les politiques publiques françaises. Ailleurs, un certain nombre de pays et de régions s'y intéressent. En Belgique, une loi votée en 2014 institue un débat annuel au Parlement sur la qualité de la vie, le développement humain, le progrès social et la durabilité de l'économie. A l'échelle de l'Union européenne, la stratégie Europe 2020 adoptée en 2010 s'est accompagnée de grands objectifs chiffrés à l'aune de neuf principaux indicateurs. En Allemagne, une commission d'enquête parlementaire a permis d'identifier neuf indicateurs complémentaires au PIB qui devront être publiés dans un rapport annuel sur le bien être.

En France, aucun indicateur complémentaire ne s'est imposé dans le débat public. En avril 2015, l'adoption définitive de la proposition de loi de la députée Eva Sas visant à la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition des politiques publiques a réouvert le débat. Dès octobre 2015, un tableau d'indicateurs doit être présenté et commenté par le gouvernement au Parlement.

62% des Français estiment le PIB insuffisant

C'est dans ce contexte que le Conseil économique, social et environnemental (Cese) et France Stratégies se sont associés, afin d'élaborer dix entrées prioritaires (1) , qui doivent être à la fois pertinentes, en nombre limité, intelligibles pour des non spécialistes, disponibles dans le temps et comparables au plan international.

A l'issue d'une série de réunions d'un groupe de travail rassemblant une soixantaine de personnes – représentants de partenaires sociaux, de la société civile, des administrations, des organisations internationales, experts et universitaires – une liste de dix indicateurs phares correspondant à dix thèmes prioritaires a été élaborée. Puis, dans une seconde phase, les citoyens ont été consultés, à la fois par téléphone (sur la base d'un panel de 1.000 personnes interrogées), en ligne et lors d'ateliers organisés dans plusieurs villes. Il en ressort que 62% des Français estiment que le PIB est insuffisant pour refléter la situation du pays. Neuf personnes sur dix considèrent nécessaire de le compléter par d'autres indicateurs.

Il en ressort aussi que les thèmes liés à l'environnement sont très peu cités spontanément, alors qu'ils sont plus présents dans les ateliers citoyens et lors de la consultation internet. Les critères économiques liés à l'emploi, au chômage et à la dette, sont jugés prioritaires. La majorité des personnes enquêtées souhaitent cependant introduire un indicateur subjectif pour mesurer la qualité de la vie, et placent la santé parmi les trois critères principaux de la qualité de la croissance. La préférence pour le présent l'emporte dans le panel représentatif : moins de 5% des personnes interrogées ont retenu les thèmes environnementaux comme une de leurs trois priorités pour compléter la mesure de la qualité de la croissance du pays.

Améliorer la statistique environnementale

En revanche, le groupe de travail a placé très clairement dans ses priorités les thématiques environnementales. Trois axes ont été retenus : la préservation du climat, la préservation de la biodiversité, la préservation des ressources naturelles. Il en a résulté trois indicateurs. L'empreinte carbone, reconnu comme l'indicateur le plus pertinent par le groupe de travail, mesure la quantité de gaz à effet de serre nécessaire à la satisfaction des besoins des personnes vivant en France sur une année, y compris dans les produits importés. L'expression utilisée sera celle de "consommation carbone", jugée plus explicite.

Sur le deuxième indicateur environnemental, portant sur la biodiversité, des débats ont eu lieu entre deux propositions concurrentes. Il a fallu choisir entre un indicateur d'artificialisation des sols, qui mesure la diminution des habitats naturels, et un indicateur du nombre de specimens d'espèces vivantes sensibles à l'évolution de l'habitat naturel. Alors que le choix du panel représentatif des Français s'est porté sur l'artificialisation des sols, les membres du Cese ont retenu l'indice d'abondance des oiseaux communs, indicateur jugé pertinent du fait que les oiseaux sont en fin de chaîne alimentaire et reconnu par Eurostat.

Enfin, le gaspillage des ressources naturelles a été évoqué comme un thème particulièrement sensible. Le taux de recyclage a été retenu comme indicateur afin de mesurer la part des déchets municipaux collectés et par la suite réutilisés dans le cycle de production. Ce taux recouvre le recyclage des matières (verre, papier-carton, plastiques et métaux) et le recyclage organique des déchets verts (compostage). Cependant, ni la qualité de l'eau ni la qualité de l'air ne figureront parmi les indicateurs sélectionnés.

La statistique publique, insuffisante dans le domaine environnemental et souvent en retard de données, devra être mobilisée et améliorée. Et le Cese plaide pour que ce tableau de bord figure désormais en annexe du projet de loi de finances et demande que la société civile s'en saisisse. L'enjeu est d'orienter les politiques publiques et de créer un débat sociétal.

1. Télécharger l'analyse
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-24816-note-analyse-cese-france-strategie.pdf

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