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Actu-Environnement

''Avec cette nouvelle directive, n'importe qui ne pourra plus s'improviser spécialiste des déchets''

La révision de la Directive Cadre sur les déchets pourrait bientôt entrer en vigueur. Pierre Rellet, ancien dirigeant de Veolia Propreté, se prononce sur le texte au nom des opérateurs européens du déchet. Il vient d'être nommé président de la Fédération européenne du secteur des déchets (FEAD) qui regroupe 19 fédérations nationales.

Interview  |  Déchets  |    |  C. Saïsset
   
''Avec cette nouvelle directive, n'importe qui ne pourra plus s'improviser spécialiste des déchets''

   
Actu-environnement : La révision de la Directive Cadre sur les déchets clarifie-t-elle ces matières ?
Pierre Rellet :
Les notions déchets/non déchets sont globalement clarifiées, même si les définitions restent sources de conflits d'interprétation. L'enjeu porte moins sur la sémantique que sur la faculté d'exonérer un non déchet des contraintes de la réglementation déchet. Nous avons défendu l'idée qu'un déchet doit garder ce statut le plus longtemps possible dans la chaîne de valeur : que l'on sache d'où il vient et ce que l'on va en faire. Toute tentative de déclassement nous paraît dangereuse en ce sens qu'elle ouvre l'opportunité de s'exonérer des contraintes de traitement et de rejets. Les nombreuses expériences de gestion a posteriori des sites de déchets orphelins démontrent la nécessité de maintenir des règles claires de responsabilité. Pour autant, nous ne nous opposons pas au passage du statut de déchet à celui de « matière première secondaire » que défend le Bureau International du Recyclage (BIR). Mais seulement à l'issue d'un véritable prétraitement, après exercice d'un métier spécialisé. Une tonne de papier-carton avec marquage doit pouvoir circuler à travers le monde avec des contraintes minimum liées à son statut.

AE : Le texte adopté en seconde lecture au Parlement européen pourrait voir sa phase ultime de négociation avant la Présidence française. Quelles en sont les principales caractéristiques ?
PR :
Le texte reprend notamment l'ensemble des points de la directive sur les déchets dangereux que la Commission européenne entendait abroger et fusionner dans la Directive Cadre. Il fixe des objectifs de résultats avec un cadre de hiérarchisation des priorités. On privilégie d'abord la prévention (dégressivité des volumes), puis le recyclage et enfin le traitement. Ce sera déjà une véritable révolution pour la majorité des Etats-membres. Il est davantage adapté à ce qu'est un traitement ; avec prise en compte de la problématique d'émissions de CO2. Il reprend les acquis antérieurs avec plus de valorisation et de recyclage, moins de traitement traditionnel - mise en décharge des déchets organiques et incinération sans valorisation énergétique - et plus de traitement intermédiaire - préparation des déchets en vue de leur transformation en combustible de substitution ou via des processus de méthanisation et de Mecanical Biological Traitement (MBT). Avec cette nouvelle directive, n'importe qui ne pourra plus s'improviser spécialiste dans le domaine des déchets. La politique européenne devient avant tout marquée par une très forme ambition de faire progresser le recyclage et toute autre forme de valorisation prenant en compte des critères d'efficacité des procédés de traitement.

AE : Observez-vous un sujet de non-satisfaction dans la révision de cette directive ?
PR :
Oui, l'obligation systématique d'organiser une collecte séparée des biodéchets, c'est-à-dire des déchets organiques. L'expérience française démontre les difficultés économiques de la collecte séparative au porte-à-porte de ces déchets et surtout le surcoût pour les collectivités. Et il n'existe pas encore de normalisation européenne des composts après le traitement des déchets ménagers.

AE : Quelles sont les évolutions dans la filière de traitement par incinération ?
PR :
Vous voulez dire en termes de « recovery », de valorisation énergétique des déchets ? Cette filière de traitement, soutenue par les Français, a obtenu le soutien des autres fédérations de la FEAD. L'idée était d'associer incinération et efficacité énergétique. Il fallait pouvoir tenir compte des conditions climatiques qui influent sur le potentiel de valorisation énergétique. Nous avons plaidé pour que les seuils d'efficacité énergétique minimale des installations au statut de « energy recovery » soient homogènes tout en tenant compte de ce paramètre local. Même si une partie du parc français (moins de 40%) ne sera pas considérée comme « recovery » – ce qui supposera la fermeture de certaines usines et le non renouvellement d'autres, on peut imaginer le développement d'incinérateurs de plus grande taille sans pour autant pénaliser le recyclage. Le « recovery package » (comprenant également le recyclage) n'est qu'un problème de logistique, d'aménagement du territoire et de planification des investissements. Il serait préférable de gérer les installations de traitement à l'échelle régionale comme au Royaume-Uni ou en Allemagne (avec les länder). Et ce, d'autant plus si on veut augmenter les degrés d'efficacité énergétique des usines d'incinération. En France, ils pourraient augmenter de moitié si l'on développait les réseaux de chaleur et les unités de transformation en électricité. Certaines installations de petite taille mériteraient-elles d'être enfermées à moyen terme ?

AE : La controverse n'est toujours pas levée sur le risque sanitaire lié aux émissions des incinérateurs. Ne craignez-vous pas que des unités de plus grande taille la renforcent ?
PR :
Au contraire. Ces usines sont assujetties depuis quelques années aux normes d'émissions les plus strictes du monde industriel. Il faut le faire savoir.

AE : Peut-on espérer une accélération des process de récupération du méthane issu de la fermentation anaérobie des déchets organiques ?
PR :
La méthanisation fait partie des procédés de Recovery. Certes, de nombreux pays ne sont pas encore équipés en process de captation du biogaz des décharges. En France si, pour la quasi-totalité des sites. Qui plus est, les nouvelles générations de décharges sont des « bioréacteurs », avec procédé d'accélération de la fermentation. Reste à équiper certains petits sites en système de turbinage pour produire de l'électricité et ne plus brûler le méthane en torchère. J'ai personnellement œuvré à l'obtention d'un tarif de rachat de l'électricité garant permettant la rentabilité de tels équipements, grâce à l'existence du fonds de compensation de l'électricité qui impose que l'électricité produite soit d'une certaine manière subventionnée avant son injection sur le réseau. Mais il n'y a pas d'obligation de valorisation en électricité. Beaucoup d'autres pays font des efforts dans ce sens pour créer un cadre incitatif à la valorisation des biogaz.

AE : Mais qu'en est-il de la valorisation en tant que telle du méthane issu du biogaz?
PR :
En termes de valorisation du biogaz en carburant, ça existe dans bien d'autres pays. En France, c'est novateur : il manque des flottes dédiées à cela. Je salue l'initiative de Paul Deffontaines, vice-président de la Communauté Urbaine de Lille, précurseur dans ce domaine. Et les autres projets à l'étude en France.

AE : Va-t-on voir évoluer la collecte sélective vers plus de tri matière et donc plus d'efficacité des filières de recyclage ?
PR :
La collecte sélective, il ne faut pas la regarder par le petit bout de la lorgnette sans considérer son coût. Or plus elle est étendue, plus elle coûte évidement. La responsabilité des producteurs de déchets doit se traduire par une contribution financière réaffectée à de vrais bons modes de collecte et de traitements. En France, doit-on encore essayer de capter les 5% de verre, les 15% d'emballages de déchets ménagers encore non valorisés ? Je ne suis pas sûr qu'on soit obligé d'aller au bout du tout recyclage. Bien sûr, les taux peuvent progresser. Mais les points d'efficacité les plus faciles à trouver se trouvent dans la valorisation des déchets industriels et commerciaux. Ce secteur purement marchand fonctionne de manière optimisée sans subvention, selon les conditions de marchés. Le Grenelle de l'environnement a fixé comme objectif le passage de 5,2 millions de tonnes de déchets de la décharge ou incinération à la recyclabilité ou à la valorisation d'ici 2012. Une grande majorité de ce tonnage concerne des déchets industriels et commerciaux plus aisément transformables. Ce qui supposera de grosses mutations d'investissement afin de développer les capacités de tri, et l'aide des pouvoirs publics aux opérateurs pour qu'ils investissent massivement dans le recyclage. À l'échelle européenne, ce débat est crucial partout où le recyclage peut progresser.

Réactions9 réactions à cet article

Incitation au recyclage des DAE

Bonjour,

concernant la dernière question traitée, une incitation à ce secteur "purement marchand" est justement en préparation dans le cadre du Grenelle de l'Environnement : l'augmentation de la TGAP pour la mise en décharge et l'incinération !

Anonyme | 16 juin 2008 à 09h46 Signaler un contenu inapproprié
critique

les propos de monsieur rellet traduisent clairement sa préférence pour le traitement des déchéts par l'incinération(logique vu son parcours professionnel,tout a fait respectable par ailleurs) je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas dénoncer cet état de fait,l'incinération n'est pas une solution d'avenir pour le traitement des déchéts,si ce forum n'est pas ouvert a la critique il faut le dire tout de suite d'autres sites le permettent

lg | 19 juin 2008 à 10h02 Signaler un contenu inapproprié
Re:critique

Bonjour,

Il est clair que le sujet présent fait la part forte à l'incinération.
Cependant, je vois 2 absences quant à votre réaction :
1 - "L'incinération n'est pas une solution d'avenir" implique un jugement sur le système actuel d'incinérateur (qui est par ailleurs fondé) mais ne laisse pas la part à une amélioration possible de cette méthode. Il est sous-entendu ici que les nouvelles générations d'incinérateurs sont plus tolérables au point de vue environnemental (ce qui est peut-être vrai) et que les certaines structures devraient être remplacée / supprimée (ce qui est assurément vrai).
2 - Une critique constructive est en partie fondée sur le fait d'offrir des alternatives au problème dénoncé : chose en quoi j'attend votre réaction pour qu'on puisse voir que ce forum laisse aussi sa place à la critique :D.

A très bientôt (j'espère)

Frédéri | 19 juin 2008 à 11h06 Signaler un contenu inapproprié
Attention aux réseaux de chaleur !

Un réseau de chaleur participe au réchauffement climatique. Puisqu'il y a échange thermique d'une matière qui, au départ, n'était pas chaude mais inerte.
Aussi le réseau de chaleur doit-il se limiter à l'élimination de nos déchets.
Il serait aberrant de continuer à faire des réseaux de chaleur bois, par exemple. Ou de géothermie profonde (la chaleur profonde remonte en surface et participe donc au réchauffement climatique).

René-Pierre | 19 juin 2008 à 13h18 Signaler un contenu inapproprié
la générale des eaux n'a pas changé de politique

Les propos de ce monsieur ne parle que de rentabilité. IL n'hésites pas à s'appuyer sur des faits qui n'existent pas (expérience française significative de séparation des fermenticibles à la source). Moi je n'en connais aucune et encore moi une ménée par véolià. Ce monsieur semble aussi ne jamais lire les rapports de l'INVS (organisme que l'on ne peut pas taxer de parti pris) concernant les impacts des incinérateurs. Ce monsieur fait de la com et rien d'autres.

james ROY | 19 juin 2008 à 14h50 Signaler un contenu inapproprié
Re:Attention aux réseaux de chaleur !

Ce propos sur le réseau de chaleur est strictement applicable à presque tout mode de chauffage : il consiste à transformer une matière (le bois, ou n'importe quel combustible) en chaleur, ou ramener à la surface de la chaleur initialement souterraine (géothermie). Même le chauffage qui serait issu d'électricité produite par des éoliennes rentre dans cette catégorie : l'énergie du vent est transformée en chaleur. La production d'énergie à partir de l'énergie solaire est probablement la seule qui échappe à cette règle, puisqu'elle utilise de la chaleur, ou des rayonnements énergétiques.
Pour, ce "Attention aux réseaux de chaleur" n'a pas de légitimité, en dehors du fait qu'il y a des pertes thermiques dans les canalisations - qu'il faut bien-sûr veiller à minimiser. Mais la contre-partie positive est que ce mode de chauffage permet d'utiliser de l'énergie qui serait perdue sans cela.

André | 20 juin 2008 à 11h03 Signaler un contenu inapproprié
Re:critique

Vous affirmez que l'incinération n'est pas une solution d'avenir. Personnellement, je ne sais pas dire de quoi sera fait l'avenir. Mais ce que je veux affirmer, c'est que l'incinération est une solution du "présent" ! Car dans la situation actuelle, où la quantité de déchets non triés (la poubelle grise) représente quelque 300 kg/an par habitant, en France (je vous laisse faire la multiplication pour découvrir la quantité que cela représente à l'année, rien que pour la France), que pouvons-nous faire de ces déchets ? Les mettre en décharge ... pour que nos enfants se dé..... avec nos déchets ? NON ! Je pense qu'il nous appartient de gérer nous-mêmes, autant que faire se peut, nos déchets. En plus, l'incinération permet de récuper une partie de l'énergie que les déchets contiennent. Plutôt que d'enterrer cette énergie, je pense qu'il y a mieux à faire, en la valorisant (la récupération du biogaz de décharge ne permet que de récupérer une partie de l'énergie des déchets, celle de la fraction fermentiscible).
Ceci étant posé, il est évidemment très important que nous trouvions d'autres solutions. La priorité doit être mise sur la prévention. "Le meilleur déchet, c'est celui que l'on ne produit pas !" Et puis, il y a le recyclage (à condition qu'il ait du sens du point de vue économique et environnemental !)
Dans l'avenir, si prévention et recyclage ont été développés (et ils le seront !), l'incinération pourrait ne concerner qu'une proportion beaucoup plus faible qu'actuellement. Mais même dans ce cas, ce serait du gâchis que de ne pas valoriser énergétiquement ce "reliquat".
Donc, l'incinération est d'après moi, une solution d'avenir ... sauf si on décide de s'en passer pour faire plaisir à son électorat par exemple (et les exemples ne manquent pas !!!).

André | 20 juin 2008 à 11h23 Signaler un contenu inapproprié
Re:Re:critique

depuis quand les electeurs décident t'ils ?les electeurs élisent et les politiques décident le plus souvent en faveur des différents lobbys (dont l'incinération est un membre émminent).L'incinération coute trés cher, entraine une perte de matiére premiére importante(non valorisation des fermentiscibles 30% de la poubelle, entre autres)pollue, méme si les traitements on été améliorés (scandale de la dioxine) et surtout n'encourage pas les gens ni les industriels a ce responsabiliser ,détournements des camions de tri pour alimenter ces méme incinérateurs qui doivent fonctionner a plein régime pour amortir leurs couts de fabrications etc,etc.
Il ne manquerait plus qu'on ne récupére pas la chaleur ce qui soit dit en passant et encore d'actualité mais malgre tout ça l'incinération se développe et est méme considérée comme de la valorisation un comble a rapprocher de la demande de rachat de l'electricité issue des décharges au méme prix que celle issue des énergies renouvelables si ça ce n'est pas du lobbying!!!
Je ne tiens pas a laisser a mes enfants des montagnes de déchéts mais je ne veux pas non plus leur laisser des champs d'incinérateurs et de centrales nucléaires comme seules réponses au gaspillage monumental de notre société.
excuser moi pour les fautes pas eu le temps de relire

lg | 20 juin 2008 à 13h46 Signaler un contenu inapproprié
Et pourtant

Si j'étais prophète je dirai :

"donnez-moi des poubelles identiques avec les mêmes couleurs partout en France et je résoud la problématique déchets".

Pour ceux qui voyagent un peu (en France) regardez c'est frappant !!!

jojo | 20 juin 2008 à 19h30 Signaler un contenu inapproprié

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