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Actu-Environnement

Pesticides néonicotinoïdes : schizophrénie en France et en Europe

Les néonicotinoïdes seront interdits en France à compter du 1er septembre 2018. Les solutions alternatives seront identifiées. Cette position de compromis a été votée à l'Assemblée nationale, malgré des débats et des actes parfois contradictoires.

Agroécologie  |    |  F. Roussel

"L'utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, y compris les semences traitées avec ces produits, est interdite à partir du 1er septembre 2018". Voici la teneur de l'article 51 du projet de loi pour la biodiversité après les débats en séance publique dans la nuit du 17 au 18 mars 2016.

Cette nouvelle rédaction résulte d'un compromis proposé par le président de la commission développement durable de l'Assemblée Jean-Paul Chanteguet. Il visait à sortir de l'impasse entretenue par certains députés, entre ceux qui demandaient une interdiction pure et simple le plus tôt possible et ceux qui pointaient du doigt les conséquences économiques pour l'agriculture française. "Ces néonicotinoïdes sont plus efficaces que le DDT, un insecticide aujourd'hui interdit pour des raisons sanitaires. Pourquoi ces néonicotinoïdes seraient plus efficaces sur les insectes mais moins dangereux pour l'homme ?", a soulevé le député SRC Gérard Bapt. "La France sera le seul pays européen à interdire ces produits, ce sera une contrainte très forte pour nos agriculteurs, ils seront pénalisés car il n'y a pas d'alternatives", a répondu le député LR Olivier Marleix.

Une centaine de produits concernés


"Cette interdiction va concerner une centaine de produits en France, selon Henri Clément, porte-parole du syndicat apicole Unaf, "sept substances actives autorisées au niveau de l'Union européenne sont concernées : l'imidaclropride, la clothianidine, l'acétamipride, le thiaméthoxam, le thiaclopride, le sulfoxaflor et la flupyradifurone". Selon les statistiques du ministère de l'Environnement qui enregistre le tonnage de ventes de ces produits, 388 tonnes de ce type de substances actives ont été vendues sur le territoire national en 2013.
L'Union de l'industrie pour la protection des plantes (UIPP) a d'ailleurs vivement réagit : "L'interdiction des néonicotinoïdes est une atteinte évidente à la compétitivité de l'agriculture française, une nouvelle fois confrontée à de considérables disparités".
Trouver des alternatives crédibles

La seconde partie de l'amendement a permis de faire converger les positions. Il prévoit qu'un arrêté conjoint des ministres chargés de l'agriculture, de l'environnement et de la santé définira, après avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), les solutions de substitution à l'utilisation des pesticides néonicotinoïdes. "Depuis juillet 2015, l'Anses est compétente pour faire des études comparatives des impacts des différents produits phytosanitaires dans le cadre des autorisations de mise sur le marché. Pour chaque usage, elle peut identifier des produits alternatifs", a expliqué Jean-Paul Chanteguet.

De même, l'article prévoit l'identification de pratiques culturales durables permettant de limiter le recours aux néonicotinoïdes, qu'il s'agisse de solutions biologiques ou physiques ou des pratiques agronomiques telles que la rotation des cultures ou la plantation de cultures pièges. Cet arrêté devra être pris dans un délai de six mois après la promulgation de la loi.

Accord de façade ?

L'amendement de M. Chanteguet a été adopté sur le fil par 30 voix pour et 28 contre. Ce qui illustre que la question est loin de faire l'unanimité à l'Assemblée nationale. Néanmoins elle semble satisfaire les ministères concernés.

La secrétaire d'Etat chargée de la biodiversité Barbara Pompili s'est dit favorable à l'amendement proposé, même si elle s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée. Aujourd'hui, la ministre de l'Environnement Ségolène Royal n'hésite pas à se "féliciter" de cette interdiction. Le ministre de l'Agriculture fait lui aussi bonne figure même si quelques jours auparavant Stéphane Le Foll avaient écrit à tous les députés pour les convaincre d'éviter l'interdiction brutale des néonicotinoïdes.

Une Europe divisée

Cette satisfaction française affichée sera-t-elle cohérente au niveau européen ? Stéphane Le Foll annonce d'ores et déjà que la France s'opposera au niveau européen les 22 et 23 mars prochains à la demande de l'Allemagne soutenue par l'Autriche d'augmenter les limites maximales de résidus de thiaclopride autorisées dans les miels. La France sera-t-elle moteur sur d'autres dossiers ?

La Commission européenne a retiré en 2013 trois substances actives néonicotinoïdes sur les cinq autorisées à l'époque. Raison invoquée : des évaluations de risques incomplètes. La ministre de l'Environnement encourage clairement l'Union européenne à aller plus loin en élargissant cette interdiction à l'enrobage des semences hivernales comme l'a conseillé l'Anses. D'un autre côté, lorsque les Etats membres sont amenés à se prononcer sur l'autorisation de nouvelles substances néonicotinoïdes ou sur l'utilisation de nouvelles méthodes d'évaluation des pesticides plus complète, la France se fait discrète sur sa position officielle.

Depuis 2013, l'EFSA a mis sur la table de nouvelles lignes directrices qui prennent mieux en compte l'impact des substances sur les pollinisateurs. Ces documents doivent être approuvés par un comité d'expert où siègent des représentants des Etats membres. Ils ne le sont toujours pas puisque les vingt-huit n'arrivent pas à une majorité qualifiée. "A cause d'un manque de transparence il est toutefois très difficile d'obtenir des informations détaillées sur la position propre de chaque Etat membre", constate l'association européenne Bee life. Résultat, l'évaluation des risques des substances reste encore incomplète et aboutit à la mise sur le marché de nouveaux produits, et notamment des néonicotinoïdes. En 2015, la Commission a ainsi autorisé la mise sur le marché du sulfoxaflor et du flupyradifurone.

En France, l'Anses ne peut pas utiliser les nouvelles lignes directrices tant qu'elles n'ont pas été approuvées par les Etats membres. Petite consolation : la Commission a décidé d'avancer sur le sujet puisque pour la réévaluation des trois néonicotinoïdes suspendus, elle a demandé à son agence sanitaire (Efsa) d'appliquer les nouvelles lignes directrices. Les résultats complets sont attendus pour janvier 2017.

Réactions2 réactions à cet article

Ce comportement de trop de parlementaires est profondément affligeant

Car il en va de la santé publique et "accessoirement" du budget de la Sécu

Les récriminations de la majorité des agricultueurs, pas ceux qui ont compris leur intérêt personnel pour leur santé et celle des leurs de travailler en bio sont ,tout aussi irresponsables.

Mais ont-il faut preuve du sens des responsabilités et de leurs véritables intérêts en élisant le président national qu'ils ont, à la FNSEA ?

Sagecol | 21 mars 2016 à 10h15 Signaler un contenu inapproprié

Effectivement lors des récentes manifestations DES agricultueurs ont aussi dénoncé les normes, oubliant que la prescription tardive ou l'absence de normes est la cause de la mort ou du triste état de santé de certains de leurs collègues, sinon de leur propre progéniture.

Evidemment il faut payer les grosses machines qui ont enrichi et les représentants, et l'insensé PIB et ....... le Crédit Agricole.

"Il y a bien d'autres choses qui polluent les consommateurs que ma surdose de traitement pour ne pas gâcher ma récolte"

J'aurai(s) déjà un peu moins de doute sur l'intelligence de la majorité des agricultueurs lorsqu'ils dégommeront le président qu'ils ont mis à la tête de la FNSEA

Mais en attendant nous trinquons, quoique certains - en nombre croissant ? - passent enfin à l'agriculture et au maraîchage bio.

Sagecol | 22 mars 2016 à 09h16 Signaler un contenu inapproprié

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