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Méthanisation agricole : en Bretagne, la filière se porte bien

Sous l'impulsion des politiques régionales et nationales de réduction des fuites de nitrates, la méthanisation à la ferme est en plein essor en Bretagne. Des entreprises se sont installées sur le territoire, permettant l'émergence d'une filière.

Energie  |    |  P. Collet
Méthanisation agricole : en Bretagne, la filière se porte bien
Hors-série - Décembre 2014
Cet article a été publié dans le Hors-série - Décembre 2014
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En Bretagne, la méthanisation agricole tire vers le haut la production de biogaz. En janvier 2014, la région comptait 41 unités de production et de valorisation de biogaz en fonctionnement, pour une puissance de 11 mégawatts (MW) et une valorisation de quelque 500.000 tonnes de déchets organiques. Ce n'est qu'un début, espère le conseil régional, puisque le gisement mobilisable est de quatre à huit fois supérieur à ce qui est mobilisé à l'heure actuelle, y compris en incluant la quarantaine de projets en cours. C'est ce qui ressort de l'étude "Bilan régional et perspectives de développement de la filière méthanisation en Bretagne", présenté mi-septembre 2014 et réalisée par le conseil régional, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et l'Association d'initiatives locales pour l'énergie et l'environnement (AILE).

Depuis 2007, rappelle l'étude, deux plans biogaz soutenus par l'Ademe, les conseils régionaux de Bretagne et Pays de la Loire et animés par AILE ont été mis en place. Cette démarche a abouti au lancement régulier de sessions dans le cadre de l'appel à projets Plan biogaz. En 2014, trois sessions ont déjà été lancées et une quatrième devrait l'être d'ici la fin de l'année. Parallèlement, l'Ademe Bretagne et le Conseil régional de Bretagne ont lancé un appel à projets complémentaire destiné à aider les groupements de producteurs, des coopératives ou encore des territoires.

Au plan national, en août 2009, François Fillon, alors Premier ministre, annonçait vouloir lutter contre les algues vertes en Bretagne grâce à la méthanisation des effluents d'élevage, une solution qui permettrait de réduire les apports en azote liés à des épandages excessifs. Cette approche s'est concrétisée en février 2010 avec la présentation d'un plan d'action de lutte contre les algues vertes. Après l'élection de François Hollande à la présidence de la République, la nouvelle majorité reprend à son compte cette stratégie et lance le plan "Energie Méthanisation Autonomie Azote" (EMAA) en mars 2013. L'effort de l'Etat s'est illustré par le financement de 17 unités de méthanisation des effluents agricoles sur les bassins versants concernés par les algues vertes, en amont des zones littorales les plus touchées. Quatre de ces unités sont déjà en service.

L'agriculture tire la méthanisation bretonne

Globalement, en sept ans, les deux plans régionaux successifs ont permis de soutenir 112 projets sur les deux régions, pour un soutien public de 73 millions d'euros sur un investissement total de 315 millions. En Bretagne, ce sont 72 projets qui ont bénéficié de fonds publics, pour un budget de 37 millions d'euros. Les unités bretonnes devraient permettre de valoriser 932.000 tonnes de déchets organiques, dont 40% d'effluents d'élevage, 50% d'autres déchets et 10% de produits agricoles. Quant à la valorisation du biogaz des 41 unités bretonnes en activité, elle se fait avant tout en moteur de cogénération, c'est-à-dire en production simultanée d'électricité injectée sur le réseau régional et de la chaleur valorisée à proximité du lieu de production.

"Bien que le premier projet de méthanisation développé sur le territoire soit un projet collectif (Géotexia), l'écrasante majorité des projets accompagnés sont portés par des agriculteurs de manière individuelle", explique l'AILE, précisant que pour les projets soutenus, la proportion de projet agricole est de 80%. Ainsi, 24 des 41 unités régionales sont des sites à la ferme. Elles produisent 7.500 tonnes équivalent pétrole (tep) d'énergie primaire sous forme de biogaz et représentent une puissance électrique de 4.931 kilowatts (kW). A cela, s'ajoutent trois unités collectives agricoles (1.785 tep de biogaz et 840 kW de puissance électrique installée) qui rassemblent de 4 à 15 agriculteurs et une unité centralisée (2.805 tep de biogaz et 1.600 kW de puissance électrique installée). Les treize autres unités sont associées à des stations d'épuration (6 unités), des sites industriels agroalimentaires (4), des décharges (2) et à la valorisation de la fraction fermentescible des ordures ménagères (FFOM).

Une filière qui se structure

Par ailleurs, dans le cadre du pacte électrique breton et du schéma régional climat air énergie (SRCAE), la région s'est fixée un "très ambitieux" objectif de 100 MW de puissance électrique pour la méthanisation à l'horizon 2020. Aujourd'hui, avec près de 20 MW installés début 2014, "les résultats actuels sont en phase avec les objectifs affichés". Mais l'effort à consentir reste important puisqu'"il faut permettre la réalisation chaque année d'une puissance identique à l'ensemble de ce qui a été aidé jusqu'à présent".

La Bretagne bénéficie maintenant de l'implantation progressive des entreprises du secteur. "Avant la mise en place du premier plan biogaz, aucun constructeur n'était recensé sur le territoire", rappelle l'AILE, ajoutant qu'aujourd'hui 30 entreprises sont basées en Bretagne et en Pays de Loire. Ce sont donc seize constructeurs, quinze organismes professionnels agricoles, sept bureaux d'étude et cinq développeurs qui constituent aujourd'hui la filière méthanisation dans l'Ouest. D'autre part, des partenariats inter-régions ont été établis, permettant de référencer près de 70 entreprises afin de favoriser le transfert de technologies et savoir-faire.

Seul bémol, "en tant qu'effluent d'installation classée, le digestat est un déchet soumis à plan d'épandage", rappelle l'AILE, expliquant que "les contraintes administratives très lourdes pour modifier un plan d'épandage sont des obstacles à la substitution des engrais minéraux par les digestats". Par ailleurs, la matière pose problème puisque, si les essais au champ ont confirmé leur valeur fertilisante, ils ont aussi montré un risque de volatilisation de l'azote en conditions douces et sèches. Son utilisation au début du printemps est donc compliquée. Enfin, reste l'épineux problème de la normalisation des digestats, sur laquelle l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a émis un avis négatif, ou de leur homologation qui reste onéreuse. Cette dernière démarche dure entre 12 et 18 mois, avec un coût de 20 à 40.000 euros, explique l'AILE.

Réactions10 réactions à cet article

Et l'azote ?

Pour mémoire, la justification de la méthanisation déjà par Fillon, était de lutter contre les rejets d'azote responsables des algues vertes.

Et dans ce bilan on nous parle de kw électriques comme une victoire une révolution.
Et le problème de l'azote n'est en rien réglé, il est même empiré pour trois raisons:
1) concentration des gisements sur quelques grands centres de traitement et donc potentiel de pollution massive plus important (même si cette concentration devrait permettre une gestion et un suivi plus professionnel)
2) Dans la foulée, les digestats qui ont perdu une bonne partie de leur matières organiques, ont perdu une bonne partie de leur intérêt d'amendement, ajoutons à cela que la réglementation applicable est plus contraignante que celle des lisiers, on saisit que la valorisation est nettement compliquée
3) L'azote présent dans les lisiers sous forme de molécules complexes, sinon de matières solides, bien retenues par les sols, se retrouve essentiellement sous forme d'ammoniaque beaucoup plus mobile et lessivable ... dans les nappes et les rivières.

Les kw électriques qui ne sont qu'un aspect tout à fait secondaire (et aberrant ) du traitement permettent aux lobby politico médiatiques de présenter une aggravation comme une avancée.

VD69 | 05 octobre 2014 à 11h26 Signaler un contenu inapproprié

Petit complément sur les risques de lessivage:

Si l'épandage des lisiers se fait en situation pluvieuse il y a lessivage dans les nappes et les rivières...
pire si l'épandage est réalisé en période sèche , l'ammoniac est volatilisé dans l'atmosphère avec toute la kyrielle de conséquences dont l'effet de serre

La gestion de l'Environnement n'est jamais une chose simple. Les quinze entreprises qui pour l'instant ont profité de la manne publique (de mes impôts en fait ) n'ont pas du présenter la chose à Fillon sous cette forme.

VD69 | 05 octobre 2014 à 11h39 Signaler un contenu inapproprié

Autant valoriser les déchets non? et produire de l'électricité et de la chaleur.
Avec ou sans méthanisation, il y aura des nitrates (lisier ou engrais) donc ça ne change rien?

faleor | 06 octobre 2014 à 14h09 Signaler un contenu inapproprié

VD69 a raison sur la forme. Sur le fond, où est le bizness plan qui évalue pour le contribuable-consommateur d'électricité le coût du kw produit (primes à la reprise d'énergie, subvention à l'installation).

l’intérêt majeur de la méthanisation est de reverdir la pratique agricole intensive, et de résorber plus facilement les excédents...et l'exportation des digestats hors des zones de production, et, par conséquence, de donner de l'air aux quotas dans les plans d'épandages.

René Hamel

oreeat | 07 octobre 2014 à 08h57 Signaler un contenu inapproprié

VD69 se trompe à peu près sur toute la ligne, la matière organique stable est toujours présente dans les digestats, celle qui est valorisée en gaz le serait au champs par la minéralisation. Le bilan humus est équivalent. Les pertes par lessivage seraient supérieures.
Les plans d'épandage et les contraintes son gérés en amont du projet ce qui explique leur durée de gestation. Des techniques comme celle de la séparation de phase ou plus sophistiquée de type Enoferti offrent des options que ne permettent pas la gestion des effluents bruts.
Quant au lessivage ou aux pertes sous forme d'ammoniac, les premières sont limitées par la gestion des épandages, l'azote du digestat est directement assimilable sous forme nitrique, celles sous forme d'ammoniac sont largement réduite pour les même raisons. Ces pertes seraient bien plus conséquentes avec l'épandage de lisier. Jusqu'à 50% en cas d'épandage d'automne sur sol nu.
Mais il oublie un détail, c'est la production nette d'énergie, électricité + chaleur d'origine renouvelable, dont le bilan est très positif pour une ENR.
Vous l'ignorez peut-être mais l'industrie pétrolière reçoit chaque année 200 milliards de subvention à l'échelle planétaire, pour une énergie fossile émettrice de CO2.
Enfin, dans l'absolu l'idéal serait de méthaniser l'ensemble des déchets fermentescibles pour limiter l'usage d'engrais chimique et d'améliorer les procédés, il reste de la marge.

JFK | 07 octobre 2014 à 14h30 Signaler un contenu inapproprié

JFK ne doit pas avoir les mêmes informations ou les mêmes études que les miennes.
J'en étais resté dans les grandes lignes au fait que les matières humiques sont le fruit de la conversion essentiellement de la cellulose dans le cadre d'une dégradation aérobie.
Les fermentations anaérobies sont plus puissantes et dégradent la cellulose. C'est ce qui se passe dans la panse des ruminants, c'est ce qui permet aux fosses sceptiques de ne pas être engorgées de papier toilette.

VC69 | 08 octobre 2014 à 11h16 Signaler un contenu inapproprié

Au cours de la digestion anaérobie la matière organique biodégradable transformés en biogaz. Des lipides (50 à 70%), des protéines 50%, de la cellulose 60 à 80%, hémicellulose 65%, amidon 90%, acide gras 80%, lignine 0%.
Tout dépend donc de la composition du substrat, je ne nie pas la dégradation de la matière organique, je relativise. Si votre souci est de préserver le stock d'humus ou de l'augmenter, je vous conseille plutôt de vous orienter vers les intercultures, production potentielle de matière sèche de 3 à 15 tonnes par an. En plus de toutes les qualités agronomiques du sol qui sont améliorées. De la souplesse et de la régularité du système qui vous permet en jouant sur les espèces et la maturité de varier la taux de minéralisation par exemple. En particulier de réduire l'usage des engrais chimiques et des pesticides, mais je sais que ce n'est pas votre préoccupation.

JFK | 08 octobre 2014 à 14h08 Signaler un contenu inapproprié

Quelle est donc votre préoccupation JFK?
En me confirmant que 70% de la cellulose est dégradée par la méthanisation, vous confirmez que la valorisation en humus n'est pas votre préoccupation. Vous devez savoir que les sols des anciennes "landes bretonnes" sont pauvres en argile et peu profondes. Seules les MO peuvent freiner le lessivage.
L'excès d'épandage d'engrais, ne serait pas ma préoccupation alors que le titre de mon premier post est : "Et l'azote?". Je suis de ceux qui veulent limiter l'importation d’engrais azotés en Bretagne tant que cette région est en excédent du fait des lisiers.
Quant aux pesticides, vous devez savoir que je défends les OGM qui évitent leur utilisation .
Je vous repose donc la question : Quelle est votre préoccupation?

VD69 | 08 octobre 2014 à 16h43 Signaler un contenu inapproprié

Vous devriez réviser votre conception de l'évolution de la matière organique dans le sol, surtout dans des conditions de labour.
Vous savez bien que les OGM n'ont jamais réduit l'usage des pesticides.
Vous savez aussi que ce n'est pas l'épandage de lisier qui va compenser les pertes en matière organique, passé par le méthaniseur ou pas. Que votre conception de l'agriculture est archaïque, que vous continuez à nier les techniques alternatives et à proposer des techniques qui ont démontrées leurs échecs en particulier dans ces domaines.
Je ne crois pas que vous soyez apte à comprendre mes préoccupations, tout comme vos amis, il y a un demi-siècle qui nous séparent.

JFK | 08 octobre 2014 à 17h37 Signaler un contenu inapproprié

D'après vous, d'où provient l'azote organique? Quelle part des épandages est minéralisée? Comment évite-t-on l'usage des engrais chimiques tout en préservant les rendements et en limitant le lessivage?

JFK | 08 octobre 2014 à 17h44 Signaler un contenu inapproprié

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