Le Centre d'analyse stratégique (CAS) a rendu public le 7 février son rapport sur les nouvelles mobilités dans les territoires périurbains et ruraux (1) . Fruit de travaux menés pendant plus d'un an, ce rapport propose des pistes et modalités d'actions "conciliant l'environnement et la mobilité pour tous et tenant compte du prix de l'énergie", indique Vincent Chriqui, son directeur. Cette étude est rendue publique quelques jours après la publication d'un rapport du CGEDD (2) portant sur le même thème.
Quelles sont les recommandations du CAS ? Sachant que revoir l'implantation des habitations ainsi que la distribution des emplois et des services ne peut se concevoir que sur le long terme. Et que transposer dans ces espaces les alternatives à la voiture telles que développées dans les villes denses "n'apparaît ni probant ni pertinent".
Définir des stratégies de mobilité
Population la plus motorisée
La majorité des kilomètres annuellement parcourus en voiture en France pour des déplacements quotidiens s'effectue dans les territoires périurbains et ruraux, dont la population est la plus motorisée. Vingt millions de voitures circulent chaque jour dans ces territoires et émettent environ 40 millions de tonnes de CO2, soit 8%
des émissions totales de gaz à effet de serre de la France, tous secteurs confondus. Ces populations étant majoritairement équipées de véhicules d'occasion, leur budget automobile (en moyenne 12,3% de leur budget annuel) est principalement constitué par l'achat de carburants. Une hausse du prix de ces derniers viendrait fragiliser leur situation financière.
Il s'agit ensuite d'apporter à l'usager une information en temps réel afin qu'il puisse organiser ses déplacements en combinant les transports collectifs et individuels (marche à pied, deux-roues, voiture personnelle ou partagée). Cela passe par la mise en place "de centrales d'information multimodales regroupant tous les éléments sur l'offre de service des infrastructures et des réseaux de transport public", tel qu'il en existe déjà, en partie, en Alsace, dans l'Oise ou dans les Côtes-d'Armor.
Développer la voiture partagée
La troisième proposition vise à développer la voiture partagée. Il s'agit, indique le CAS, "de s'appuyer sur l'information numérique pour développer le partage de la voiture et notamment des solutions de covoiturage sécurisées reposant sur un tiers de confiance et un suivi géolocalisé du déplacement".
Les pistes ? Valoriser les parcs de véhicules possédés localement par les ménages, les entreprises ou les collectivités territoriales, mobiliser les garagistes ruraux qui pourraient proposer quelques voitures en autopartage, s'associer avec des services de transport opérant à grande échelle (SNCF, plates-formes multimodales, sociétés d'autoroutes, etc.), mettre au point des solutions de dépannage en cas de défaillance, rechercher les formules d'assurance les mieux adaptées….
Coordonner les services de transport et structurer les déplacements
Le CAS suggère également de coordonner les services de transport collectif entre eux en mettant en place "des rabattements performants", du type itinéraires cyclables, parkings de covoiturage. "L'effort de coordination des autorités publiques pour assurer un continuum des services de transport collectif (trains, autocars, bus), mais aussi des voitures personnelles ou partagées, est essentiel", souligne le rapport, qui émet les recommandations concrètes suivantes : indicateur du taux de remplissage des véhicules de transport collectif conduisant à renforcer un schéma de lignes massifiées à haute qualité de service, cheminements piétons, itinéraires vélos sécurisés, gestion du stationnement, amélioration des correspondances entre les lignes de transport collectif, etc.
La dernière proposition vise à limiter les distances parcourues par les professionnels des services à la personne en les incitant "à coordonner leurs déplacements, leur livraisons ou le transport des personnes qui les sollicitent". Le CAS suggère ainsi "des regroupements de services dans des communes de taille intermédiaire, avec un système de rabattement performant, permettant ainsi de créer des bassins de vie". Des solutions innovantes pourraient aussi être expérimentées à plus grande échelle "en mutualisant les moyens existants (en personnels et en véhicules et en levant certains cloisonnements entre services sociaux et commerciaux", suggère le rapport.
Meilleure résistance des territoires aux risques de crise
Ces pistes pourraient apporter, selon le CAS, "moyennant une dépense publique modeste et un effort important d'information et de concertation avec les habitants", des opportunités de mobilité pour les personnes qui n'ont pas accès à l'automobile : jeunes, personnes âgées ou handicapées, revenus modestes, ainsi que des réductions de l'ordre de 30% des consommations d'énergie et des émissions de CO2 des automobiles sur les trajets périurbaines de proximité. Et enfin, point qui n'est pas à négliger compte tenu de la conjoncture actuelle, "une meilleure résistance des territoires aux risques de crises et de hausses brutales du prix de l'énergie qui pourrait surgir à moyen terme".