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Nanoparticules : l'incinération est-elle adaptée à leur élimination ?

Le projet NanoFlueGas s'est penché sur le comportement des nanoparticules incinérées et l'efficacité des procédés d'épuration des fumées. Les équipes de scientifiques ont présenté à la presse jeudi 2 avril, les premiers résultats des travaux.

Risques  |    |  D. Laperche
Environnement & Technique N°347
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°347
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Doit-on éliminer différemment les déchets contenant des nanoparticules ? C'est une des questions auxquelles ont cherché à répondre, à travers le projet NanoFlueGas (1) , les équipes de scientifiques de l'Ineris, l'école des mines de Nantes et Trédi, la filiale du groupe Séché, spécialisée dans la gestion et le traitement des déchets industriels dangereux. Aujourd'hui, il n'existe pas de filière d'incinération spécifique et l'efficacité des procédés d'épuration des fumées vis-à-vis de ces particules n'est pas connue. Le développement des nanomatériaux manufacturés impose pourtant d'améliorer la connaissance de leur répartition, leur utilisation et leur comportement en fin de vie. Selon le dernier bilan de la déclaration R-nano, plus de 1.700 importateurs, producteurs, distributeurs ont indiqué avoir mis sur le marché en 2013 au total près de 400.000 tonnes de substances à l'état nanoparticulairen (275.000 tonnes produites et 122.000 importés).

96% des nanoparticules de carbones filtrées

Lors de la présentation à la presse des premiers résultats de NanoFlueGas, les partenaires ont souhaité se montrer rassurants : l'expérience montre que le système de traitement de fumées issues d'incinération testé retiendrait plus de 96% en nombre des nanoparticules de carbone émises dans les fumées brutes. "Concernant les rejets dans l'atmosphère, en moyenne nous sommes proches de 1 mg/m3 (2) , situe Danielle Venditti, ingénieur de recherche dans le laboratoire de Trédi. En prenant une hypothèse défavorable de présence de nanoparticules avec un abattement de 99,9% en massique, nous considérons que l'ensemble des opérateurs – soit 120 unités – relargueraient dans l'atmosphère une quantité inférieure à la centaine de tonnes par an".

Pour obtenir ces résultats, les différentes équipes ont dû contourner plusieurs difficultés. Tout d'abord, les scientifiques ont identifié les gisements de déchets susceptibles de contenir des nanoparticules manufacturées (3) . Aujourd'hui, selon l'équipe de NanoFlueGas, la production annuelle de nanoparticules se compose à 40% sous forme de silice (peinture, détergents, cosmétique, etc.), 39% sous forme d'alumine (cosmétique, catalyse, vernis, etc.), 20% sous forme de noir de carbone (composants électroniques, pneus, encres, équipements sportifs, etc.) et 1% sous forme de dioxyde de titane (TiO2) (peinture, crèmes solaires, détergents).

Trois types de déchets testés

Les scientifiques ont retenu pour l'expérimentation trois types de gisements se retrouvant dans les déchets dangereux représentatifs des flux de déchets réellement collectés et traités, toutes filières d'élimination confondues : la poudre de carbone (noir de carbone), un polymère organo-silicé (mastics et élastomères silicones) et des déchets de peintures en phase aqueuse. "Nous n'avons pas traité l'alumine car nous n'en avons pas retrouvé", précise Danielle Venditti. Ils ont également vérifié leur contenu en nanocharges. Le déchet noir de carbone présente 30% en masse de nanoparticules, le polymère environ 8% de nanoparticules de silice et la masse sèche de la peinture 0,5% de nanoparticules de silicium (silicates de calcium et de sodium).

L'Ineris a développé un pilote de chambre d'incinération en laboratoire qui reproduit les conditions réelles (température, turbulence et oxygénation) des unités de Trédi. Ce dernier permet de gérer un gramme de déchet. "La particularité et avantage de notre étude, par rapport à la plupart des autres travaux sur ce sujet, est que nous avons déposé le déchet au sein d'une nacelle alimentée en oxygène, avec une arrivée d'air en dessous, précise Olivier Le Bihan, ingénieur de recherche au sein de l'unité Innovation pour la mesure de l'Ineris. Dans les autres études, la combustion reste en surface". L'équipe a prélevé et mesuré à chaud, en temps réel les aérosols et gaz de combustion. Suivant le type de nanoparticules contenues dans les déchets, les émissions s'avèrent différentes en composition. L'incinération de la poudre de carbone aboutit à une combustion complète (pratiquement pas de mâchefers) et l'aérosol produit présente moins de 10% de matière carbonée, dominé en nombre par des nanoparticules (inférieure à 100 nm). La peinture, malgré la nature aqueuse, présente une inflammation immédiate probablement du fait de la présence de composés organiques volatiles. Le résidu qui en résulte est composé de calcium, titane et oxygène. L'aérosol est dominé par les particules de nano-silices.

Une nouvelle population de nano-particules

Quant à la combustion du polymère, il génère un mâchefer composé principalement de silicium et d'oxygène et un aérosol concentré de nano-particules de silice. La particularité de ce dernier ? Il présente deux types de "population" : la première provient de particules de nano-silice initialement présentes dans le déchet et la seconde, nouvelle, est issue de l'oxydation du silicium organique en particules de nano-silice.

L'équipe de scientifiques de l'école des mines de Nantes s'est ensuite intéressée à l'efficacité du système de filtre à manche pour retenir les nanoparticules présentes dans ces fumées. "Nous avons choisi ce dispositif car il est en théorie, avec le filtre électrostatique, le plus efficace pour éliminer les particules et est très répandu", explique Aurélie Joubert, enseignant-chercheur. Les scientifiques ont reproduit en laboratoire les conditions de traitement du dispositif réel (150°C, teneur en eau de 1 à 12%, présence de réactif d'élimination de gaz acide, dioxine et furane). L'aérosol testé reproduit les caractéristiques de celui produit lors de l'incinération du noir de carbone dans le pilote de l'Ineris. "Nous avons choisi le plus défavorable en terme de comportement", justifie la scientifique.

Résultat : le procédé retient 96% en nombre des nanoparticules de carbones émises dans les fumées. "Il est plus facile de capturer des particules de dix nanomètres que de 100 nanomètres, du fait des mécanismes de collecte, précise Aurélie Joubert. Pour un diamètre de 100 nanomètres, nous atteignons 99% de collecte". La portion non émise dans les émissions d'incinération devrait se retrouver dans les déchets solides, les résidus d'épuration des fumées d'incinération des ordures ménagères (Refioms). Les premiers résultats de NanoFlueGas ouvrent la voie à de nombreuses questions et autres investigations.

1. Le projet NanoFlueGas est soutenu par l'Ademe dans le cadre du programme Cortea (connaissance, réduction à la source et traitement des émissions dans l'air). Il a été lancé pour trois ans (2011-2014).
https://hal.archives-ouvertes.fr/ineris-00971075/
2. La Directive Incinération de déchets dangereux fixe à 10 mg/m3 la valeur limite de concentration en poussières au rejet à l'atmosphère3. substances fabriquées intentionnellement pour avoir de nouvelles propriétés, et ayant une ou plusieurs dimensions caractéristiques externes dans le domaine du nanomètre (1-100 nm)

Réactions1 réaction à cet article

Si les élus avaient fait leur boulot dès le début des années 1990 il y aurait moins de polluants dans cette fraction des déchets qui vont dans une unité de traitement thermique

Et ce n'est pas avec des discours incohérents de type "zéro déchet" qu'on abordera efficacement les problèmes qui restent à résoudre d'urgence

Il devrait être évident qu'il y aura toujours des déchets dit des ménages ou municipaux qui seront irrecyclables.

Si les humains ont généralement besoin de mots pour penser, il ne faut pas laisser les mots   penser pour nous. Or c'est hélas une habitude très répandue, y compris chez ceux qui nous représentent et/ou gouvernent, ce qui a entraîné, entraîne et entraînera encore bien des maux.

Alors que rares, sinon très rares sont les personnes qui ont le souci du juste mot pour la juste chose, le souci des mots pesés pour éviter, voire réduire, les maux pesants.

 C’est un combat militant qui en vaut d’autres, voire conditionne le succès des autres parce que ce souci est ou au moins semble absent  chez  beaucoup  d'intervenants, dans des commentaires d’articles de presse en particulier, sinon dans les articles eux-mêmes, à propos de tous les grands sujets sociétaux , politiques inclus bien évidemment. Et c’est bien souvent le cas, hélas, comme dit, de beaucoup de nos vecteurs d'opinions et/ou de décisions.

Sagecol | 07 avril 2015 à 07h20 Signaler un contenu inapproprié

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