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Nucléaire : le Japon fait l'expérience de l'effet falaise

Pour la première fois depuis 42 ans le Japon ne dispose plus d'aucun réacteur nucléaire en service. Une situation qui pourrait s'avérer déterminante pour l'avenir énergétique de l'archipel.

Energie  |    |  P. Collet

Samedi 5 mai 2012 le groupe Hokkaido Electric a mis à l'arrêt pour maintenance le réacteur nucléaire 3 de la centrale de Tomari (au nord du Japon sur la façade maritime ouest) d'une puissance de 912 mégawatts (MW). Avec ce nouvel arrêt, les 54 réacteurs de l'archipel sont indisponibles. Une première depuis mai 1970 et l'arrêt simultané des deux unités que comptait alors le Japon, relève l'agence Reuters.

Le test de l'été 2012

Lorsque que le séisme du 11 mars a frappé le Japon, 17 unités étaient à l'arrêt et 11 réacteurs ont cessé de fonctionner automatiquement. Depuis, deux tranches ont été arrêtées "pour la sécurité des habitants" sur ordre du Premier ministre et le reste du parc a été progressivement mis en maintenance sans possibilité de redémarrage une fois les opérations prévues effectuées.

Le Japon doit donc faire face à l'"effet falaise", c'est-à-dire à une accumulation d'événements anodins entrainant des conséquences importantes, voire insurmontables. Ici la mise à l'arrêté de l'ensemble des réacteurs en 14 mois oblige les Japonais à adapter leur consommation électrique à l'indisponibilité d'un peu moins d'un tiers de leurs capacités de production électrique.

Un tel scénario est parfois présenté comme catastrophique et depuis plusieurs mois le gouvernement a tenté de l'écarter. En vain. Au-delà des risques associés à un black-out causé par la perte d'une telle proportion des capacités de production, Jeffrey Kingston, spécialiste du Japon à la Temple University Japan interrogé par Reuters, estime que les autorités "souhaitent éviter de créer un précédent". Si le Japon passait l'été 2012 sans problème majeur, l'hypothèse d'un redémarrage rapide et consensuel des centrales serait compromise.

L'opinion publique doute…

Le Japon ne compte plus que 50 réacteurs

Quatre des six réacteurs de la centrale de Fukushima Daiichi n'ont plus d'existence officielle depuis le 20 avril. Ces installations ravagées par le tsunami vont être démantelées et le parc nucléaire ne compte plus que 50 unités.

Quant aux deux autres réacteurs de Fukushima, ils sont toujours officiellement comptabilisés, même si un redémarrage semble improbable. Une situation qui pourrait durer, si l'on se fie au précédent des réacteurs 2, 3 et 4 de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa à l'arrêt depuis le tremblement de terre de juillet 2007 et qui n'ont jamais redémarré.
Afin de rassurer la population, le gouvernement japonais a entrepris d'auditer la sûreté du parc nucléaire. En octobre 2011, l'opérateur électrique Kansai a remis à l'Agence japonaise de sûreté nucléaire et industrielle (Nisa) les premiers résultats des stress tests des réacteurs 3 et 4 de la centrale d'Ohi (au centre du Japon sur la façade maritime ouest). Un passage en revue de la sûreté des deux unités validé par la Nisa en février mais qui n'a toujours pas permis leur redémarrage, faute d'avoir convaincu les autorités locales.

En l'occurrence, les audits de sûreté et la volonté du gouvernement de réduire la part du nucléaire dans le futur bouquet énergétique japonais n'ont semble-t-il pas eu d'effet positif. La popularité du gouvernement n'a eu de cesse de s'effriter depuis l'arrivée de Yoshihiro Noda au poste de Premier ministre en août 2011. Un sondage publié le 16 avril, quatre jours après que le gouvernement ait pris officiellement position en faveur du redémarrage des deux unités d'Ohi, révélait que seulement 28% des citoyens nippons approuvaient cette décision.

Parallèlement à l'annonce gouvernementale, Yuki Edano, le ministre du Commerce, s'est rendu dans la préfecture de Fukui où se trouve la centrale d'Ohi pour demander l'approbation des autorités locales. Le maire d'Ohi et le gouverneur de la préfecture ont en retour demandé le 17 avril que les stress tests soient validés par une équipe d'experts de leur choix. La demande a été en partie acceptée puisque les experts ont pu visiter la centrale.

...tout comme les chefs d'entreprise

Les chefs d'entreprise semblent eux aussi douter des garanties apportées jusqu'à maintenant. Seulement 15% des entreprises interrogées mi-avril par Reuters dans le cadre de son enquête mensuelle auprès des 400 principaux groupes nippons seraient favorable à un redémarrage rapide des réacteurs. Elles sont pourtant 65% à craindre d'être pénalisées par un arrêt prolongé du parc nucléaire.

Des risques pour l'activité économique explicités par les opérateurs électriques qui ont accentué leur pression en présentant leurs prévisions d'alimentation électrique pour cet été. Selon les projections présentées le 23 avril, Kansai Electric Power, le producteur le plus dépendant de l'atome, pourrait faire face à des coupures électriques correspondant à 19,3% de la demande de juillet. En août le déficit serait de 16,3%. L'entreprise, à qui appartiennent les réacteurs d'Ohi et qui alimente les villes industrielles d'Osaka et Kobe, serait la plus touchée des quatre qui auraient à faire face à des coupures.

Cependant, pour établir ces prévisions, les opérateurs ont pris en référence les records de chaleur de l'été 2010, ce qui explique qu'elles ont été "accueillies avec scepticisme", rapporte Reuters. "Les opérateurs n'ont plus la moindre crédibilité et leurs prévisions ne sont pas figées", estime Jeffrey Kingston qui rappelle que la réalité dépendra des températures réelles, des efforts d'économie d'énergie et des éventuelles coupures préventives. Kansai a d'ailleurs indiqué qu'avec des températures plus conformes à la moyenne sa prévision de déficit se réduirait à 16,7% en Juillet et à 13,5% en août.

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