L'initiative "Right2Water (1) " est la première initiative citoyenne européenne (ICE) qui parvient à réunir le million de signatures requis pour lancer une procédure et être auditionnée par la Commission européenne. Avec 1.884.790 signatures, les organisateurs (2) de l'ICE ont pu rencontrer des représentants de la Commission pour leur exposer en détail le contenu de leur initiative et obtenir une audition au Parlement.
Une initiative citoyenne pour la reconnaissance du droit à l'eau
Les partisans de cette initiative militent pour que le droit à l'eau et à l'assainissement soit reconnu comme droit de l'homme. Ils s'opposent à la soumission de l'approvisionnement en eau et de la gestion des ressources hydriques aux "règles du marché intérieur". La demande de mise en place d'un service public fournissant à l'ensemble des citoyens l'assainissement et l'eau saine en quantité suffisante explique cette opposition à la libéralisation du marché de l'eau.
"Le message de notre ICE est simple. Mettre en œuvre le droit à l'eau, ne pas libéraliser le marché des services de l'eau en Europe, et faire plus pour s'assurer que les peuples du monde entier aient accès à de l'eau saine" résume Jan Willem Goudriaan, vice-président de l'ICE Right2Water.
Une issue incertaine malgré le soutien du Parlement
Au terme de l'audition, Maroš Šefčovič, vice-président de la Commission européenne, a annoncé que la réponse officielle de l'exécutif européen interviendra le 20 mars. Cette dernière devra alors justifier de l'adoption ou non d'un texte en réponse à l'initiative.
Les organisateurs de "Right2Water" bénéficient du soutien du Parlement européen qui s'est exprimé par une résolution du 3 juillet 2012 sur la mise en œuvre de la législation de l'Union européenne relative à l'eau. Les parlementaires ont affirmé que "l'eau est un bien commun de l'humanité, un bien public, et que l'accès à l'eau devrait être un droit fondamental et universel", rappelant "la nécessité d'adapter les règles du marché intérieur aux caractéristiques spécifiques du secteur de l'eau" et invitant "les Etats membres à gérer, dans le respect du principe de subsidiarité, l'eau et les services d'approvisionnement en eau".
Pourtant, la position émise par le Parlement, si elle est de bon augure pour l'initiative "Right2Water", ne garantit pas le succès de l'ICE, le pouvoir de proposition des lois revenant à la Commission et non au Parlement.
Les ICE, moteurs de la démocratisation des institutions européennes ?
Ce premier exemple d'ICE incarne une nouvelle voie de démocratisation de l'Union européenne, alors que le déficit démocratique de ses institutions est souvent pointé du doigt. Un nouveau moyen de coopération entre les citoyens européens et les institutions européennes est ainsi mis en place, malgré le frein posé par l'absence de pouvoir de proposition de texte du Parlement.
Enfin, cette nouvelle procédure participe à la création, comme le relève l'eurodéputée Corinne Lepage de "l'Europe citoyenne (...) qui est à construire après l'Europe de la paix et l'Europe économique". L'accueil de cette ICE est cependant très variable selon les pays, le nombre de signataires (3) français étant faible (23.221) en comparaison du nombre de signataires allemands (1.382.195).