Les polluants les plus problématiques
Concernant les particules fines PM10, (particules en suspension dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres et qui représentent un risque respiratoire), les niveaux ont globalement baissé en 10 ans mais avec une stabilisation depuis 2000. Toutefois, la présence des particules a augmenté de 6 à 8% entre 2006 et 2007, due à part égale au changement de méthode de mesure décidé par le Ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables et à une météorologie particulière qui a conduit à d'importants épisodes de pollution au cours de l'année.
En outre, pour la première fois le dépassement de leur valeur limite a été observé pour deux stations loin du trafic. 39 dépassements du seuil journalier de 50 µg/m3 par an ont été comptabilisés pour les PM10, même loin des sources de pollution, alors que la réglementation n'en autorise que 35, a fait remarquer Philippe Lameloise, le directeur de la société Airparif chargée de contrôler l'air en région parisienne.
En ce qui concerne les PM2,5, particules en suspension dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres et qui sont encore plus nocives pour l'organisme, une remontée de leurs niveaux est également observé en 2007, entre 3 et 11% en fonction de la proximité du trafic. Les taux mesurés à proximité du trafic routier dépassent non seulement la norme établie par l'OMS de 10 µg/m3, mais aussi la norme de 25 µg/m3 qui a été retenue dans le projet de future directive européenne sur la qualité de l'air approuvée par le Parlement Européen en décembre. Rappelons que ce seuil avait fait débat et était apparu assez lâche en constituant une valeur cible, autrement dit non imposée. Dans tous les cas, on reste loin des objectifs de qualité de l'air entérinés à l'occasion du Grenelle de l'Environnement.
Concernant le dioxyde d'azote, si l'on excepte l'année 2003 exceptionnelle sur le plan météorologique, une baisse régulière est observée dans l'agglomération parisienne loin du trafic (-25 % entre 2000 et 2007). En revanche, à proximité du trafic routier, la tendance est assez stable (-1 % entre 2000 et 2007) mais avec de forts niveaux de pollution qui sont deux fois supérieurs à la réglementation (objectif de 40 µg/m3 en moyenne).
Cette situation s'expliquerait selon Airparif, par les caractéristiques chimiques du dioxyde d'azote, polluant dit « secondaire » provenant de la réaction chimique entre le monoxyde d'azote et l'ozone. Les teneurs toujours élevées de monoxyde d'azote sur les voies de circulation, associées à un niveau de fond d'ozone croissant, créent des niveaux soutenus de dioxyde d'azote le long des grands axes de circulation. Airparif a estimé qu'en 2007, 3,4 millions de Franciliens avaient été exposés à un air dépassant l'objectif de qualité annuel. La surface de dépassement est estimée à 276 km2, soit 2 % de la région, principalement à Paris et en proche banlieue nord, commente Philippe Lameloise.
Pour ce qui est de l'ozone, la valeur moyenne annuelle de 2007 est la plus faible depuis 2002, en raison de conditions météorologiques moins propices à la formation d'ozone durant une grande partie de l'été 2007. Cependant, les niveaux moyens d'ozone de l'agglomération ont quasiment doublé depuis quinze ans. L'objectif de qualité annuel relatif à la santé (120 mg/m3 en moyenne sur 8 heures) est également dépassé dans toute l'Ile de France comme chaque année.
Les polluants globalement en baisse
Bonnes nouvelles en revanche concernant les autres polluants car la tendance est à la baisse. Les oxydes d'azote spécifiquement émis directement par les véhicules ont diminué de 38% loin du trafic et de 45% près de la circulation entre 1992 et 2007. Cette baisse globale est due à l'amélioration technologique des véhicules et à la généralisation de pots catalytiques sur les voitures. Cependant, la moyenne 2007 n'évolue que très faiblement à la baisse par rapport à 2006. Ceci peut s'expliquer par un parc roulant catalysé déjà prédominant. Airparif prévient de ce fait que les gains seront plus faibles à l'avenir.
En raison de la diminution à l'échelle Européenne des teneurs en benzène (C6H6) dans les carburants depuis 2000, les émissions de ce polluant émis majoritairement par le trafic routier par les véhicules à essence, ont diminué depuis 1994 dans une fourchette allant de 76% à 87% en fonction de la proximité du trafic.
Pour le monoxyde de carbone émis par le trafic routier, la valeur limite pour la protection de la santé est largement respectée. La baisse des teneurs observée depuis 1994 se confirme en 2007 : 73% à proximité du trafic.
En ce qui concerne le dioxyde de soufre émis principalement par l'industrie et le chauffage, la baisse des teneurs se poursuit également en 2007. Si l'année constitue le plus faible niveau historique, les niveaux restent bien inférieurs aux objectifs de qualité.
Airparif poursuit également sa surveillance des HAP (Hydrocarbures aromatiques polycycliques) et des métaux lourds qui restent à des niveaux inférieurs aux valeurs de référence européennes.
Des pics de pollution conjoncturellement moins nombreux
Enfin, s'intéressant aux épisodes de pollution, si le bilan des procédures d'informations et d'alertes est plutôt faible (5 épisodes en 2007 contre 9 en 2006 et 8 en 2005), Airparif a constaté deux épisodes de pollution inédits en avril et en décembre.
En avril, il s'agissait d'un épisode de nature estivale, avec des niveaux d'ozone et de particules inhabituellement élevés pour la saison en Ile-de-France mais aussi sur de nombreuses régions françaises, souligne l'organisme de surveillance de la qualité de l'air. Parmi les raisons, on trouvera notamment que cette période coïncide avec les épandages d'engrais agricoles effectués à grande échelle en France et qui, avec de telles conditions météorologiques chaudes et ensoleillées, ont contribué à des concentrations élevées de nitrate d'ammonium (composé qui entre dans la composition des particules).
En décembre, un épisode hivernal caractérisé par des niveaux élevés de dioxyde d'azote dans l'agglomération et des niveaux records de particules dans toute l'Ile-de-France a été observé les jours précédant Noël et jusqu'au 24 décembre. L'indice Atmo caractérisant la qualité de l'air journalière dans l'agglomération parisienne a ainsi atteint son niveau maximum (10/10). Une première depuis 1998, signale l'organisme, qui l'explique par la présence d'un puissant anticyclone amenant un temps sec, froid et peu venteux et aux phénomènes de transport de particules à travers la France et l'Europe, vraisemblablement produites par les activités de chauffage. La combustion du bois constitue à ce titre un mode de chauffage particulièrement émetteur de particules, notamment de particules fines et peu volatiles, explique Philippe Lameloise. Si ce type de chauffage contribue à réduire globalement les émissions de CO2 son attrait semble donc plus discutable en ce qui concerne la pollution locale.
L'enjeu sanitaire d'une pollution moyenne élevée
Mais plus que les quelques jours d'épisodes de pollution annuels, ce sont bien les niveaux moyens de pollution au jour le jour avec des niveaux supérieurs à la réglementation qui posent problème et qui constituent le véritable enjeu sanitaire à résoudre.
Rappelons que depuis 2005, la Commission européenne travaille à une nouvelle directive « pour la qualité de l'air ambiant et un air pur en Europe ». Son objectif est de réglementer les particules fines mais aussi de regrouper dans un seul texte les précédentes directives relatives aux autres polluants dans l'air. Les seuils définis par ce nouveau texte ont entraîné de nombreux débats entre les Etats membres, le Parlement, la commission et les spécialistes de la pollution atmosphérique. La directive a finalement été adoptée le 11 décembre 2007.
Par ailleurs, une circulaire du Secrétariat d'Etat à l'Ecologie ordonne depuis octobre, pour les seuls PM10, le déclenchement du seuil d'information au-dessus de 80 µg/m3 et du seuil d'alerte au-delà de 125 µg/m3.
Si les gaz d'échappement des diesels sont souvent associés aux particules, ce type de véhicules n'est pas leur seule source. Les particules ont trois origines comme les rejets directs dans l'atmosphère (transports routiers, industrie et activités domestiques, en particulier le chauffage), les remises en suspension des particules qui sont déposées au sol sous l'action du vent ou par les véhicules le long des rues et la transformation chimique de gaz certains gaz pouvant produire des particules par réaction chimique entre eux. Ces deux dernières sources donnent lieu à des transports de particules à travers l'Europe.
On n'a vraiment une question à se poser sur l'origine des particules et en particulier sur leur dimension continentale, s'interroge Philippe Lameloise. Ainsi, concernant le trafic, seules les mesures chroniques comptent : par exemple restreindre l'accès au centre-ville comme à Londres ou à Berlin pour les poids-lourds. Il faut se retirer de la tête qu'on peut agir par des mesures événementielles. Les vraies solutions sont chroniques, estime-t-il.