Après une phase expérimentale menée de mars 2010 à mars 2011 par le gestionnaire de réseau ERDF, Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, a confirmé en juillet 2013 le déploiement du compteur communicant Linky. Objectif fixé : installer trois millions de compteurs d'ici 2016 et remplacer les 35 millions de compteurs électriques installés actuellement en France, d'ici 2020. Mais la Commission de régulation de l'énergie (CRE) propose de revoir ce calendrier et les cibles fixées, dans une délibération portant proposition de décret (1) , publiée le 28 juillet.
Surcoûts, cumul de retards et évolutions technologiques
"Les travaux de définition du cadre de régulation incitative du projet de système de comptage évolué Linky ont montré que l'atteinte d'un taux de 95% de compteurs posés à l'issue de la phase de déploiement massif engendrerait des surcoûts significatifs, sans que des bénéfices supplémentaires pour les consommateurs puissent les justifier", indique la CRE. Celle-ci propose de fixer la date de déploiement du compteur au 1er décembre 2015 (au lieu du 1er janvier 2012) et un objectif de 90% au 31 décembre 2021 pour ERDF (contre 100% au 31 décembre 2020). Les entreprises locales de distribution (ELD) voient cet objectif repoussé au 31 décembre 2024.
Ce report, demandé par ERDF, est justifié par les nombreux retards pris. Si le décret définissant le calendrier de déploiement de Linky, publié en 2010, se basait sur une expérimentation achevée au 31 décembre 2010, celle-ci n'a démarré qu'en mars 2010 pour s'achever un an plus tard.
Le déploiement de Linky, prévu initialement à compter du 1er janvier 2012, était également conditionné à la parution d'un arrêté fixant les fonctionnalités du compteur et ses spécifications. Cet arrêté a finalement été publié le 10 janvier 2012. Depuis cette date, "ERDF a l'obligation de procéder au déploiement des compteurs évolués en basse tension inférieure ou égale à 36kVA".
Enfin, l'appel d'offres pour la fabrication de trois millions de compteurs et 80.000 concentrateurs CPL (courant porteur de ligne) n'a été publié que fin juillet 2013 au Journal officiel de l'Union européenne, et "ce marché doit être attribué à l'été 2014".Un marché à partager
ERDF devrait répartir les volumes de production de son compteur Linky. Jusque-là, trois industriels ont participé à sa fabrication : Iskraemeco (Slovénie), Itron (Etats-Unis) et Landis+Gyr (Suisse). Le cahier des charges publié par ERDF prévoit une production 100% française de son compteur.
Landis+Gyr a un site de production à Montluçon (Allier), Itron à Chasseneuil-du-Poitou (Vienne). Iskraemeco pour sa part a signé début juillet un partenariat de production aves le sous-traitant Asteel Flash, installé en Bretagne (Redon et Langon). Le Français Sagemcom, implanté à Dinan (Côtes-d'Armor), est également intéressé par ce marché.
Par ailleurs, des évolutions technologiques sont attendues : la prochaine génération, la G3, "apportera des améliorations significatives pour les gestionnaires de réseaux d'électricité en termes de quantité d'information échangée et de nombre de compteurs communiquants avec un concentrateur". Mais les protocoles entre la G1, actuellement utilisée, et la G3 n'étant pas compatibles, la CRE estime qu'il faut reporter l'installation de ces systèmes. "Par contre, cette obligation peut être maintenue pour chacune des zones de déploiement, si les compteurs répondant à la technologie de CPL envisagée pour cette zone sont disponibles". Certaines zones de déploiement sont en effet prévues en CPL G1.
Rémunérer les actifs en fonction de l'atteinte des objectifs
Par ailleurs, quelques jours plus tôt, le 17 juillet, la CRE a publié une délibération relative au cadre de régulation incitative (2) pour le système de comptage évolué d'ERDF. Après une phase de consultation, organisée en mai dernier, la CRE a décidé de répondre favorablement à la demande d'ERDF de fixer un cadre tarifaire pour toute la durée du projet, soit environ vingt ans. Cependant, elle pose au gestionnaire de réseau des objectifs de maîtrise des coûts d'investissement, de respect du calendrier et de garantie de la performance attendue.
"La CRE retient, pour les actifs liés au projet Linky et mis en service entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2021, une méthode de rémunération incitant ERDF à optimiser le couple quantité/coût de la dette en permettant au gestionnaire de réseau de conserver les éventuels gains liés à cette optimisation. En contrepartie, ERDF supportera les éventuelles contreperformances, par exemple si le coût de la dette effectif est supérieur au coût de la dette cible retenu par la CRE".
Une prime incitative de 300 points de base (3%) est attribuée aux actifs mis en service, sur leur durée de vie. "Une première partie de 200 pbs est conditionnée à la performance d'ERDF en termes de coûts d'investissement et de respect du calendrier de déploiement ; une seconde partie de 100 pbs est conditionnée à la performance du système de comptage évolué en termes de qualité de service".