Le gouvernement s'apprête à abroger la majoration de 5% ou 10% du tarif d'achat photovoltaïque pour les installations solaires dont les composants étaient originaires de l'Espace économique européen (EEE). C'est ce qui ressort du projet d'arrêté (1) rendu public, ce vendredi 28 février, par Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit de l'environnement.
Ce projet d'arrêté abroge l'arrêté du 7 janvier 2013 portant majoration des tarifs de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie solaire. Il devrait être présenté le 12 mars au Conseil supérieur de l'énergie.
"La mesure était attendue tant la compatibilité de cette majoration tarifaire avec le droit de l'Union européenne était incertaine", explique l'avocat, alertant les professionnels du secteur sur le fait qu'"il convient de faire attention au respect de la condition de complétude du dossier avant abrogation de l'arrêté de 2013 pour bénéficier de la majoration".
Pour rappel, à l'occasion de la publication du décret de majoration des tarifs, Delphine Batho, alors ministre de l'Ecologie, avait évoqué "des mesures d'urgence (…) pour mettre un coup d'arrêt aux destructions d'emploi et soutenir la filière photovoltaïque dans l'attente des conclusions du débat sur la transition énergétique". En effet, si le texte permettait au gouvernement de tenir ses promesses, ses bases juridiques semblaient bien faibles. Dans son avis rendu le 20 décembre 2012 (2) , la Commission de régulation de l'énergie (CRE) pointait la non conformité de l'arrêté avec le droit européen et les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces éléments juridiques l'avaient conduite "à émettre un avis défavorable au projet d'arrêté proposé".
Une décision prise fin 2013
L'article 1 du projet abroge l'arrêté majorant les tarifs d'achat de l'électricité produite à partir d'installation photovoltaïque dont les composants étaient originaires de l'EEE. "Toutefois, les dispositions de l'arrêté du 7 janvier 2013 susmentionné continuent à s'appliquer pour les installations éligibles (…) pour lesquelles les producteurs ont adressé à l'acheteur une demande comportant l'ensemble des pièces (…), dans les conditions prévues (…) avant la date de publication du présent arrêté", poursuit le texte.
"En mars 2013, la Commission européenne a appelé l'attention des autorités françaises sur la conformité de ce dispositif avec le droit de l'Union européenne et les a invitées à faire part de leurs observations sur son analyse", explique l'exposé des motifs associé au projet d'arrêté d'abrogation. Or, "ces échanges ont abouti en septembre 2013 à une mise en demeure de la France par la Commission européenne de retirer cet arrêté", poursuit le document. La Commission européenne "[considère] que le dispositif de majoration tarifaire constituait une entrave injustifiée à la libre circulation des panneaux solaires légalement mis en libre pratique dans d'autres Etats membres".
Plus précisément, le dispositif français "[constitue] des mesures d'effet équivalent à des restrictions quantitatives à l'importation [et] il n'est pas démontré que ce dispositif est nécessaire pour [des raisons telles que la protection de la santé et de la vie des personnes ou la protection de la propriété industrielle et commerciale]".
En conséquence, la Commission juge que le dispositif français n'est pas compatible avec les articles 34 et 36 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et "les autorités françaises [lui] ont indiqué (…) fin 2013 que cet arrêté du 7 janvier 2013 serait abrogé".