Avec un délai de récupération en moyenne de 50 ans, et dans certains cas de 150 ans, les investissements consacrés à l'efficacité énergétique dans le cadre de la politique de cohésion (1) ne s'avèrent pas rentables, selon un rapport de la Cour des comptes européenne. L'Union européenne, depuis 2000, a affecté près de 5 milliards d'euros au cofinancement de mesures éco-énergétiques dans les États membres. Afin d'estimer la bonne gestion financière de ces montants, la Cour des comptes européenne a réalisé un audit dans les pays qui ont bénéficié de contributions importantes (2) entre 2007-2013 et qui avaient également alloué le plus de crédits aux projets correspondants en 2009.
Elle s'est ainsi penchée sur les programmes de la République tchèque (une contribution de 942 millions d'euros), de l'Italie (838 M€) et la Lituanie (370 M€).
Par comparaison, la France a reçu pour cette même période 291 M€ et le plus petit montant a été attribué au Luxembourg (504.873 euros).
"Aucun des projets que nous avons examinés n'était assorti d'une évaluation des besoins ni même d'une analyse du potentiel d'économie d'énergie au regard des investissements, a regretté M. Harald Wögerbauer, le responsable de ce rapport, membre de la Cour des comptes européenne, les États membres utilisaient essentiellement les fonds alloués pour rénover les bâtiments publics, et la question de l'efficacité énergétique revêtait, au mieux, une importance secondaire".
La Cour reconnaît que si tous les projets audités ont donné lieu aux réalisations physiques prévues, le coût s'est révélé élevé au regard des économies d'énergie potentielles.
Autre constat : ces Etats n'ont pas intégré leurs programmes opérationnels dans les plans nationaux d'action en matière d'efficacité énergétique (3) (PNAEE).
Des indicateurs de performance non adaptés au suivi
Selon elle, les indicateurs de performance des mesures éco-énergétiques n'étaient pas adaptés au suivi des programmes. Elle regrette que les lignes directrices relatives au suivi, établies par la Commission, ne définissent pas d'indicateurs en matière d'efficacité énergétique.
"Soit les audits énergétiques n'étaient pas obligatoires (Italie, Lituanie), soit, lorsqu'ils l'étaient (République tchèque), les options d'investissement recommandées dans leur cadre étaient bien trop onéreuses", a déploré dans son rapport, la Cour des comptes.
Elle souligne également que les économies d'énergie effectives se sont avérées invérifiables pour 18 des 24 projets audités, car elles n'avaient pas été mesurées de manière fiable.
Un financement des mesures éco-énergétiques soumis à conditions
Evaluation adéquate des besoins, suivi régulier avec des indicateurs de performance comparables entre eux, critères transparents pour sélectionner les projets et utilisation de coûts d'investissement standard par unité d'énergie à économiser (assortis d'une valeur maximale admissible pour le délai de récupération simple) : la Cour recommande à la Commission de subordonner le financement de mesures éco-énergétiques à certaines conditions.
Concernant le délai de récupération, la Cour conseille à la Commission de s'appuyer sur l'introduction de niveaux optimaux en fonction des coûts pour les bâtiments de référence dans les états membres, en application de la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments. "Dans les cas où ces niveaux ne sont pas encore définis à l'échelon national, les audits énergétiques devraient être utilisés comme principal critère de sélection des projets en matière d'efficacité énergétique", complète t-elle.
L'objectif - non contraignant - de réduction de 20% de la consommation d'énergie primaire projetée à l'horizon 2020, pourrait ne pas être atteint. Selon la cour des comptes, si l'Union ne prend pas de mesures complémentaires, il ne dépassera pas 9% en 2020.
Elle estime que l'essentiel des efforts supplémentaires à fournir pour l'atteindre devra porter sur les secteurs résidentiel et tertiaire (immeubles commerciaux et bâtiments publics).