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Les nanotechnologies : entre opportunités et prudence

Au regard des progrès que présage le développement des nanotechnologies, la recherche européenne s'accélère dans ce domaine. Mais la prudence reste de mise et un code de conduite encadrant les travaux devrait voir le jour en Europe.

Risques  |    |  F. Roussel
«Nanotechnologie» est un terme générique qui décrit des applications dans de nombreux domaines scientifiques mais recouvre d'une manière générale la recherche sur les principes et propriétés existant à l'échelle nanométrique, c'est-à-dire au niveau des atomes et des molécules. L'objectif des nanotechnologies consiste à produire des objets ou matériaux inférieurs à 100 nanomètres. Ces nanomatériaux sont composés de nanoparticules qui, contrairement aux particules très fines d'origine naturelle ou provenant d'une combustion, sont produites intentionnellement. Les nanomatériaux peuvent être des métaux, céramiques, carbones, polymères ou encore des silicates qui présentent l'intérêt d'avoir des caractéristiques spécifiques par rapport aux mêmes matériaux à l'échelle macroscopique. L'acquisition de ces nouvelles propriétés physico-chimiques ouvre ainsi un immense champ de recherches fondamentales et appliquées regroupées sous l'appellation de «nanosciences».

De nombreux produits nanotechnologiques sont déjà présents sur le marché, notamment des composants électroniques et chimiques, des textiles, des revêtements de surface, des systèmes de diagnostic et d'administration de médicaments ou encore des innovations en matière de régénération tissulaire. Mais ce n'est que le début puisque les analystes du secteur estiment qu'en 2015 les produits élaborés à partir des nanotechnologies représenteront un marché mondial de plus de mille milliards de dollars qui générera plus de deux millions d'emplois*. La production de nanomatériaux devrait ainsi connaître une croissance exponentielle dans les prochaines années et toucher de très nombreux secteurs : la production d'énergie, l'électronique, la médecine, l'agro-alimentaire, l'aéronautique, l'automobile, la construction ou encore la cosmétique.
Ce développement rapide est stimulé par des investissements importants dans la recherche dans un contexte international très compétitif. En Europe, les décideurs politiques, chercheurs et représentants de l'industrie se sont réunis la semaine dernière au Portugal, pour discuter de l'avenir de la recherche européenne dans ce domaine. Convaincue de l'importance stratégique de ces technologies et de la contribution qu'elles peuvent apporter à la qualité de vie et au bien-être économique des Européens, l'Union européenne espère jouer un rôle de premier plan. Dans le cadre de son 6e programme-cadre de recherche (2003-2006), l'UE a investi 1,4 milliard d'euros à travers 550 projets dans le domaine des nanosciences. Sur la durée du 7e programme (2007-2013), le financement de la Commission européenne pour les nanotechnologies devrait augmenter fortement et le financement annuel moyen sera sans doute plus du double de celui du 6e programme. Des partenariats public-privé pour la nanoélectronique et les systèmes intégrés devraient également bientôt être concrétisés. Ces nouveaux partenariats de recherche public-privé sont une vraie occasion pour l'Europe de franchir une étape déterminante dans ce domaine en plein essor qui a une importance fondamentale pour notre avenir numérique, a déclaré Viviane Reding, membre de la Commission chargée de la société de l'information et des médias, lors de la conférence à haut niveau sur les nanotechnologies. L'UE établit aussi des partenariats internationaux dans ce domaine. Ainsi, la création d'un fonds de recherche UE-Inde pour la recherche en nanotechnologies, doté de 10 millions d'euros, a-t-elle été annoncée un peu plus tôt ce mois-ci. Ce fonds vise à permettre aux meilleures institutions d'Inde et de l'UE de collaborer dans ce domaine.

Cependant la déferlante des nanotechnologies amène son lot d'interrogations quant aux risques que pourra poser la prolifération de nanomatériaux. Si leurs effets sur la santé et l'environnement sont encore mal connus, certaines de leurs propriétés laissent déjà présager des risques. La taille nanométrique des nanoparticules peut en effet leur conférer de nouvelles propriétés biologiques dans la mesure où elles peuvent pénétrer à l'intérieur des cellules plus facilement que des particules de taille micrométrique. La composition chimique des nanoparticules peut également être pathogène. Des modifications de surface peuvent être apportées aux nanoparticules en fonction de l'application prévue, en particulier en greffant de nouvelles molécules à leur surface. Ces modifications peuvent avoir un impact majeur sur la toxicité ou l'innocuité des nanoparticules. Par ailleurs, les nanoparticules manufacturées peuvent avoir différentes formes (sphères, fibres, tubes, anneaux ou feuilles) qui influencent leur toxicité et leur solubilité. Leur capacité à former des agrégats est également un facteur de risque important.

Actuellement, il n'existe pas suffisamment de données ni de méthodologies adaptées pour évaluer les risques pour la santé de l'homme à cause du faible nombre d'études menées, d'un recul peu important sur cette nouvelle forme d'exposition et de la grande diversité des nanoparticules produites. Par conséquent, si les scientifiques semblent très optimistes sur les applications liées aux nanoparticules, ils restent prudents. Selon un sondage récent** réalisé par des chercheurs des Universités américaines du Wisconsin-Madison et de l'Arizona auprès de 363 scientifiques et ingénieurs travaillant dans le domaine des nanotechnologies, les scientifiques sont optimistes quant aux applications en médecine mais ils redoutent l'apparition de nouveaux problèmes de pollution et de santé provoqués par le développement des nanotechnologies.
Cette crainte est également exprimée par le grand public même si elle ne se traduit pas dans les mêmes domaines. Selon le sondage, le grand public craint à la fois que ces évolutions technologiques se traduisent par des pertes d'emplois et qu'elles facilitent le développement de nouvelles armes faciles à élaborer et à utiliser par des individus malveillants comme des terroristes, et redoute aussi qu'elles permettent de mettre au point des systèmes pouvant porter atteinte à la vie privée.

Afin d'éviter un rejet de la population envers ses nouveaux matériaux, la commission européenne mise sur la communication et l'information. Pour déployer tout son potentiel, le développement des nanotechnologies doit être adapté aux attentes de la société et faire de la communication et du dialogue une priorité absolue, explique-t-elle. La Commission a d'ailleurs lancé en juillet dernier une concertation ouverte en vue de la création d'un code de conduite pour une recherche responsable sur les nanotechnologies qui pourrait aboutir avant la fin de l'année. La Commission européenne examine également la législation existante afin de déterminer si le cadre réglementaire actuel couvre de manière adéquate les risques en matière de santé, de sécurité et d'environnement. En outre, elle a pris des mesures en vue de la création d'un observatoire fournissant aux décideurs des évaluations dynamiques concernant les évolutions scientifiques et du marché. Les nanosciences et les nanotechnologies sont un facteur potentiel de croissance et de création d'emplois en Europe, nous devons donc veiller à ce qu'elles se développent mais de manière positive et responsable, a déclaré M. Janez Poto?nik, membre de la Commission chargé de la science et de la recherche.


*US National Science Foundation
**Publié dans Nature le 25 novembre 2007

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