"La tarification incitative est un levier très puissant et sans équivalent pour faire évoluer les comportements des usagers et ainsi réduire les déchets résiduels collectés, améliorer la valorisation et maîtriser voire baisser le coût du service dans le cadre d'une démarche d'optimisation globale", estime l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) dans un avis (1) rendu public fin novembre. Mais pour être pleinement efficace, il faut que les collectivités mettent à disposition du public tous les outils permettant de réduire la quantité de déchets et de mieux trier ceux produits, pondère-t-elle.
TEOM et REOM
La taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) finance le service public des déchets sur la base de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Elle prend en compte la valeur locative du local et ne dépend pas de l'utilisation du service par les habitants. La TEOM est la règle pour les villes moyennes, puisqu'environ 90% d'entre elles y ont recours.
La redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM) finance le service public en fonction notamment du volume de déchets enlevés. La REOM peut varier en fonction de la composition des foyers et du mode de collecte. Elle reste très minoritaire, quelque 5% des collectivités l'appliquant.
Une mesure acceptée par les usagers
Cet avis s'appuie notamment sur les précédentes études de l'Ademe sur le sujet et sur celle du commissariat général au développement durable (CGDD) du ministère de l'Environnement publiée en mars dernier. Le passage en redevance incitative permet de réduire de 30 à 50% la production par habitant d'ordures ménagères résiduelles (OMR). Parallèlement, la collecte séparée des emballages et papiers est améliorée d'environ 30%. Le coût du service public de gestion des déchets (SPGD) par habitant est, pour sa part, réduit ou stabilisé dans la majorité des cas. Quant à la taxe incitative, moins répandue, elle permet une réduction de 20 à 40% des OMR collectées, une amélioration de la collecte des emballages et papiers de 10 à 120% et du verre de 5 à 50%.
Les enquêtes de l'Ademe montrent aussi que les usagers sont favorables à la tarification incitative dans des proportions de 63 à 70%. "Ce taux montre une adhésion élevée, comparé à ceux obtenus pour d'autres mesures de nature économique ou fiscale", telle que la taxe carbone, explique l'Agence. Ce constat la conforte dans son opinion positive. Certes, des impacts négatifs peuvent se manifester, tels qu'une dégradation de la qualité du tri par l'habitant, des incivilités ou des impayés, mais ils "ne viennent pas contrebalancer les effets positifs". Globalement, l'Ademe indique que ces effets négatifs apparaissent lors de la mise en place de la tarification incitative, avant de se résorber après que la collectivité locale ait réagi.
Mettre les moyens appropriés
Pour assurer le succès du passage à la tarification incitative, l'Ademe conseille aux collectivités d'y accorder des moyens adaptés. "La mise en place est un projet souvent long et complexe qui nécessite un investissement important", explique-t-elle. Les collectivités doivent notamment porter le projet au plus haut niveau politique, organiser une véritable concertation, prévoir des renforts en moyens humains et prendre en compte les spécificités du territoire. S'agissant des moyens humains, l'Ademe estime qu'ils se situent entre 0 et 3 emplois en équivalent temps plein pour 10.000 habitants lors des trois premières années. Ils redescendent ensuite entre 0 et 1 emploi pour la gestion quotidienne du dispositif. Quant aux investissements, ils se situent dans la majorité des cas entre 6 et 22 euros par habitants.
Sans surprise, l'Ademe confirme que la tarification incitative est plus facile à instaurer en secteur rural ou mixte. L'habitat pavillonnaire facilite l'identification et le suivi par usage de l'utilisation du service de collecte des déchets. Pour les collectivités urbaines, qui financent la collecte par une taxe, plutôt qu'une redevance, l'agence recommande une mise en œuvre progressive d'une tarification incitative. Elle préconise de l'appliquer dans un premier temps aux entreprises, commerces et administrations via la redevance spéciale pour les déchets des acteurs économiques utilisant le service public. La tarification peut ensuite être appliquée sur une partie du territoire, avant d'être généralisée à l'ensemble des usagers.