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La réduction des pesticides ne se fera pas sans une révolution des pratiques

Menée par l'INRA dans le cadre du plan Ecophyto 2018 qui vise à réduire l'usage des produits phytosanitaires, l'étude Ecophyto R&D évalue les techniques et les pratiques pour dessiner des scénarios réalistes de réduction progressive des substances.

   
La réduction des pesticides ne se fera pas sans une révolution des pratiques
© Bpmcwill
   
Avec 76.000 tonnes de substances actives vendues par an, la France est le premier consommateur de pesticides en Europe et le troisième au niveau mondial. L'utilisation régulière de ces produits a des conséquences néfastes pour l'environnement et la santé. En 2007, selon le MDRGF (Mouvement pour les droits et le respect des générations futures), 52,1 % des fruits et légumes (contre 45 % en 2006) contenaient des résidus de pesticides en France, avec 7,6 % de dépassement des limites maximales en résidus (LMR) contre 6 % l'année précédente. Les produits phytosanitaires sont soupçonnés d'être cancérigènes et perturbateurs endocriniens…
Pourtant, les pratiques intensives, qui utilisent près de 50 % de pesticides en plus que la moyenne française ont des gains de production modérés (5 % pour les grandes cultures).
Le Grenelle de l'environnement a pointé du doigt l'usage intensif de pesticides dans les cultures françaises. Les recommandations ont abouti à la mise en place du plan Ecophyto 2018 qui vise une réduction de 50 % des produits phytosanitaires d'ici huit ans ''si possible'' et le retrait progressif du marché des produits contenant les 53 substances actives les plus préoccupantes. Mais les moyens à mettre en œuvre pour réaliser cet objectif n'ont pas réellement été définis. L'étude Ecophyto R&D, commandée à l'INRA par les ministères en charge de l'Agriculture et de l'Environnement, visait à préciser les contours de la mise en œuvre de cet objectif. Les différentes cultures françaises et les pratiques inhérentes à ces cultures ont été étudiées sur l'année 2006 afin de pouvoir dessiner différents scénarios réalistes de réduction progressive des substances actives.

Les grandes cultures et la vigne, grandes consommatrices de pesticides

Selon le Réseau d'information comptable agricole, sur les 25,4 millions d'hectares de surface agricole cultivée (SAU), 14,4 millions consomment 96 % des pesticides (11,7 millions d'ha correspondent à la jachère ou aux surfaces toujours en herbe). En 2006, la pression pesticide globale en France incombe à 67 % aux grandes cultures (céréales, oléagineux, protéagineux, betteraves, pommes de terre…). La viticulture représente 14 % de la pression alors qu'elle ne constitue que 3,3 % de la SAU. De plus, cette production peut donner lieu à des pressions locales fortes, tout comme l'arboriculture (5 % de la pression pesticide) et l'horticulture (5 %). La pression varie selon les cultures : la pomme de terre et le colza sont très consommateurs de substances actives contrairement à la culture du tournesol; la pomme de table est le fruit qui nécessite le plus une assistance chimique (36 traitements) contre 2 à 5 pour les kiwis.
Alors que les zones herbagères sont les régions où la pression pesticide est la plus faible, les régions de grandes cultures (nord de la France), les régions spécialisées dans les cultures fruitières (Vallée du Rhône et sud-ouest notamment) et les zones pratiquant l'horticulture et les légumes en plein champ (ceinture parisienne, Bretagne, Provence, Landes) sont fortement impactées. Les vignobles sont les plus touchés par la pression pesticide.

Grandes cultures : des progrès plus ou moins importants selon les cultures

Près de 30 % des parcelles de grandes cultures utilisent des pratiques intensives, c'est-à-dire qu'elles reçoivent le plus de pesticides. Quatre autres types de pratiques ont été étudiées : raisonnée (selon les recommandations des avertissements agricoles), protection intégrée (combinaisons de mesures agronomiques prophylactiques), production intégrée (protection intégrée associée à un raisonnement des successions de cultures) et biologique.
L'étude conclut qu'il est possible de réduire de 3 à 40 % le recours aux pesticides en moyenne, selon les cultures, par rapport au mode de production intensif, sans affecter le niveau de production.
En allant plus loin (protection et production intégrées), il est possible de réduire de 37 à 62 % le recours aux pesticides en augmentant la marge brute mais en diminuant les rendements de 10 % (céréales à paille) à 15-20 % (colza pommes de terre). Cela passe par un ''retour à l'agronomie'' : travail sur la date et la densité du semis, le choix variétal, la rotation des cultures…
Les cultures les plus sensibles aux bioagresseurs (colza, pommes de terre) sont les plus affectées par des pratiques économes en pesticides.

Cultures légumières : un manque de recul sur les pratiques alternatives

L'étude s'est penchée sur 6 cultures légumières représentant 40 % des surfaces et 48 % du tonnage produit en France métropolitaine (carotte, chou-fleur, haricot vert, laitue, melon, tomate). Elle a permis de souligner que de nombreuses pratiques alternatives à l'utilisation des pesticides ont déjà été développées par les producteurs : greffage, paillage plastique du sol, bâche ou culture sous abris, solarisation, bio-désinfection du sol. Utilisées seules ou en combinaisons, ces méthodes permettent de réduire l'usage des pesticides. Cependant, ces pratiques ne sont pas sans conséquences pour l'environnement…
D'autres méthodes agronomiques sont préconisées : longues rotations, maîtrise de la fertilisation et de la vigueur de la culture, techniques d'irrigation, maîtrise du climat sous abri (température et humidité), agents de lutte biologique. Mais le manque de données statistiques et le faible recul sur les nouvelles méthodes développées ne permettent pas à l'étude d'identifier des pistes précises.

Fruits et vignes : un nécessaire bouleversement des pratiques

Concernant les cultures pérennes, le passage d'une méthode intensive à une méthode alternative permet de réduire l'usage des pesticides mais impacte fortement le rendement. Le recours aux méthodes alternatives est rapidement freiné. Selon l'étude, la réduction de l'usage de substances actives nécessitent des révolutions dans les pratiques (reconfiguration des vergers pour appliquer la confusion sexuelle, évolution des équipements et accroissement de la main d'œuvre dans les vignobles…).

Finalement, l'étude conclut que la généralisation de la protection raisonnée, qui correspond approximativement à la situation moyenne en France (autant sur le plan de la pression pesticide que sur celui de la production), ne permettrait pas une réduction substantielle du recours aux substances actives.
L'emploi de techniques de protection intégrée permettrait une baisse de la pression d'un tiers, pour une baisse de production de 6 % en grandes cultures et nulle en culture fruitière (avec la généralisation de la confusion sexuelle).
Quant à la généralisation de l'agriculture biologique, elle serait marquée par des baisses de productions importantes.
Le respect de l'engagement du Grenelle passerait donc, selon l'étude, par une généralisation de la production intégrée. Cela correspondrait à une diminution de la pression pesticides de 50 % en grandes cultures, de 37 % en vigne, de 21 % en arboriculture et une suppression de tous les traitements sur les prairies pour des baisses de production respectives de 12 %, 24 % et 19 %. Soit une perte de 3,5 milliards d'euros (sur la base de 2006), à relativiser car 1,9 milliard est imputable à la viticulture, où le lien entre rendements et recettes n'est pas automatique. De plus, la diminution du recours aux pesticides s'accompagne d'une baisse des charges pour les producteurs.
En conclusion, ''il ne s'agit pas d'effectuer un changement simple des techniques, mais de mettre en œuvre une nouvelle conception des systèmes de production, ne se limitant pas à une lutte contre les bioagresseurs mais permettant une régulation de ces agressions. Au delà des effets sur le niveau de production et les marges, des modifications dans les stratégies et l'organisation de filières seraient nécessaires''.

Réactions4 réactions à cet article

Les jardins d'agrément et les jardins potagers ?

quand est-il de l'utilisation des pesticides dans le jardin de monsieur tout le monde? Les jardiniers amateurs se tournent-ils plus vers les produits bio au jardin? Existe-t-il des études à cette échelle?

apisbelladonna | 29 janvier 2010 à 14h08 Signaler un contenu inapproprié
Perte de production

Une grande partie de nos champs servent à faire des céréales pour nourrir le bétail.
Mangeons bio et surtout moins de viande et on s'accommodera très bien des baisses de production.

chocard | 29 janvier 2010 à 16h13 Signaler un contenu inapproprié
la biodiversité, la solution

Les bien fait des associations de plantes, de l'apport de plantes auxiliaires avec la présence de haies par exemple ne sont plus à trouver. Le travail du sol en profondeur détruit 80% de cette vie indispensable à la bonne santée des plantes. C'est donc l'ensemble des techniques qu'il faut revoir et à l'échelle humaine. Quand je vois qu'en France un peu plus de 80% des revenus d'un agriculteur sont des subventions ou autres aides et que ce système agricole consomme plus d'énergie qu'il n'en fabrique, on marche sur le tête....

vincent7979 | 04 février 2010 à 00h40 Signaler un contenu inapproprié
Re:Les jardins d'agrément et les jardins potagers.

Je vis depuis plus de 15 ans en pleine campagne, et les habitants du coin produisent des légumes, céréales etc. pour les vendre, utilisant des pesticides , engrais chimiques. Mais pour leur propre consommation, ils cultivent pratiquement sans aucun de ces jolis produits si performants. On est pas idiot, ici. Et j' ai vécu en Asie il y a 30 ans le même épisode: production personnelle sans chimie; et pour le reste, à votre bonne santé!

Onésime | 04 février 2010 à 10h50 Signaler un contenu inapproprié

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