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Réutilisation des eaux usées : les obstacles bientôt levés ?

Beaucoup d'espoirs avaient été placés sur la réutilisation des eaux usées. Le bilan est aujourd'hui très décevant mais les choses pourraient changer dans les mois qui viennent. Grâce à un encadrement réglementaire mieux adapté.

Eau  |    |  L. Radisson
Environnement & Technique N°347
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°347
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La publication en 2010 d'un arrêté encadrant la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) pour l'irrigation des cultures ou des espaces verts semblait ouvrir de nouvelles perspectives, après plus de vingt ans d'atermoiements sur cette question liés principalement aux risques sanitaires de cette pratique.

Quatre ans après, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances, malgré l'intérêt que peut présenter la REUT dans un contexte de raréfaction de la ressource en eau liée au changement climatique. Les raisons ? L'encadrement réglementaire perçu initialement comme un facteur de développement s'est finalement révélé être un frein, notamment du fait des coûts induits, comme le souligne un récent rapport du Commissariat général au développement durable (CGDD), qui pointe également la relativement faible acceptabilité sociale de cette pratique.

Pourtant, de nombreux acteurs semblent aujourd'hui dans les starting-blocks, prêts à rebondir sur les différentes initiatives qui devraient être prises au cours de l'année 2015.

"Nous sommes les derniers aujourd'hui"

"Nous étions pionniers il y a 25 ans, nous sommes les derniers aujourd'hui", a lancé Valentina Lazarova de Suez Environnement devant un cénacle de spécialistes réunis fin mars par l'Institut de la filtration des techniques séparatives (IFTS). Un marasme confirmé par d'autres participants. Ainsi, Joël Casanova du BRGM estime qu'il y a même une régression avec le retour de certains golfs à l'eau potable.

Les raisons d'un tel blocage ? Ce dernier évoque les contradictions de la réglementation française, la complexité des dossiers à monter, les investissements trop lourds, pendant qu'un autre participant met directement en cause les agences régionales de santé (ARS) qui bloqueraient tous les projets.

Daniel Berthault, chef du bureau des eaux souterraines et des ressources en eau au ministère de l'Ecologie, reconnaît sans difficulté que la réglementation actuelle "très techno" ne marche pas. La réglementation actuelle, c'est l'arrêté du 2 août 2010, relatif à l'utilisation d'eaux issues du traitement d'épuration des eaux résiduaires urbaines pour l'irrigation de cultures ou d'espaces verts, qui a fait l'objet d'une première modification en juillet 2014.

Ce texte fixe quatre niveaux de qualité des eaux usées traitées (A, B, C, D) qui permettent de fixer des contraintes d'usage par type de culture irriguée (cultures maraîchères, pâturages, espaces verts, pépinières, arboriculture, etc.), des contraintes de distance vis à vis des activités à protéger (plans d'eau, piscicultures, baignades, zones d'abreuvement du bétail, etc.), des contraintes liées aux terrains (milieu karstique, pente) mais aussi au matériel utilisé ou à la vitesse du vent dans le cas de l'irrigation par aspersion. Le texte prévoit la surveillance de plusieurs paramètres pour déterminer la qualité des eaux usées : MES (1) , DCO (2) , Escherichia coli, entérocoques fécaux, phages ARN, spores de bactéries anaérobies sulfitoréductrices.

Beaucoup de projets semblent suspendus à l'application de ces prescriptions réglementaires. Pour des raisons techniques, tout d'abord, comme celles liées aux abattements ou à la vitesse du vent, et pour des raisons administratives, par ailleurs, avec la difficulté à présenter l'évaluation des impacts sanitaires dans le dossier d'autorisation.

Une priorité des simplifications réglementaires pour 2015

Les pouvoirs publics semblent toutefois décidés à faire bouger les choses. Le comité stratégique des éco-industries (Cosei), instance de concertation entre les entreprises de l'environnement et les pouvoirs publics, a mentionné le 2 avril la révision des règles de réutilisation des eaux usées après traitement comme l'une des priorités des simplifications réglementaires à mener sur l'année 2015.

L'Union nationale des industries et entreprises de l'eau et de l'environnement (UIE) se félicite de cette annonce, précisant que la réglementation française vient d'être pointée du doigt par un rapport d'évaluation (3) diligenté par la Commission européenne. Et la fédération professionnelle d'annoncer que l'ensemble des professionnels concernés ont élaboré, sous l'égide du Cosei, "une proposition de nouvelle réglementation pour tous les usages des eaux usées traitées (irrigation, nettoyage des voieries, recharge des nappes…), qui concilie sécurité sanitaire et environnementale, acceptabilité économique et faisabilité et technique et administrative".

Le 1er avril, lors du colloque "Les enjeux de l'eau et les changements climatiques" organisé par l'UIE, Virginie Dumoulin-Wieczorkiewicz, sous-directrice de l'action territoriale et de la législation de l'eau et des matières premières au ministère de l'Ecologie, a également annoncé un appel à manifestation d'intérêt relatif aux réseaux intelligents dans lequel la réutilisation des eaux usées pourra faire partie des solutions proposées.

"On veut que ça avance"

"On veut que ça avance", avait assuré Daniel Berthault lors du colloque de l'IFTS, précisant les différents chantiers en cours. En premier lieu, un projet de circulaire d'application de l'arrêté du 2 août 2010, en lien avec le ministère de la Santé, qui devrait permettre de lever plusieurs points de blocage. Parmi ceux-ci, des précisions sur le service instructeur compétent, qui pourrait être la police de l'eau avec un avis de l'agence régionale de santé (ARS), ou sur des éléments techniques comme les distances par rapport aux voies de circulation. Mais les dernières annonces laissent penser que ces points de blocage pourraient être levés par une refonte de l'arrêté plutôt que par une simple circulaire.

D'autres initiatives sont également en cours : la mise en œuvre des actions du troisième Plan national santé environnement (PNSE 3), les travaux de normalisation de l'ISO, ceux de l'Anses (4) sur la réutilisation des eaux grises et des eaux de piscine, ou encore ceux de la Commission européenne pour améliorer les connaissances et ouvrir la réutilisation des eaux à d'autres usages que ceux agricoles.

L'exécutif européen a en effet lancé l'été dernier une consultation sur cette question, qui a recueilli 120 réponses d'origine française. Elle devrait déboucher sur la mise en place d'un groupe de travail de haut niveau, qui pourrait être piloté par le centre de recherche de la Commission (JRC). Ses propositions, qui pourraient prendre la forme d'actions obligatoires ou de simples lignes directrices, sont attendues pour la fin de l'année.

1. matière en suspension2. demande chimique en oxygène3. Télécharger le rapport sur la réutilisation des eaux usées
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-24272-rapport-water-reuse.pdf
4. Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail

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