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Actu-Environnement

Sites pollués : les professionnels très prudents face au dispositif du "tiers demandeur"

Les professionnels restent dans l'expectative par rapport à la possibilité bientôt offerte de transférer la réhabilitation d'un site industriel à un aménageur. La mise en œuvre du dispositif reste encore pleine d'inconnues.

Aménagement  |    |  L. Radisson

Le dispositif de substitution du dernier exploitant par un tiers intéressé dans l'obligation de réhabilitation d'une installation classée (ICPE) en cessation d'activité va bientôt devenir opérationnel. La publication du décret, soumis à la consultation du public en mars dernier, devrait intervenir dans les semaines qui viennent.

Dans cette attente, le Club des avocats environnementalistes et l'Union des professionnels de la dépollution des sols (UPDS) organisaient le 26 juin à Paris un colloque consacré à cette question ainsi qu'aux autres dispositifs de la loi Alur relatifs aux sites pollués, dont les secteurs d'information sur le sols (SIS). Ces professionnels voient dans le décret sur le tiers demandeur (TD) l'opportunité de débloquer la reconversion de nombreux sites industriels, avec tout le potentiel d'activités que cela peut impliquer pour eux. Les principaux intéressés, promoteurs et aménageurs, d'un côté, industriels de l'autre, restent toutefois très prudents sur ce dispositif dont l'efficacité reste encore à prouver sur le terrain.

Gérer en une seule phase la problématique de dépollution

"Le décret sur le tiers demandeur peut présenter une solution pour les promoteurs sur des terrains en situation de blocage", admet Estelle Poutrel, responsable juridique au sein du groupe Eiffage. L'intérêt serait avant tout opérationnel : pouvoir gérer en une seule phase la problématique de la dépollution. Celle-ci se fait actuellement en deux étapes : une réhabilitation "ICPE" permettant un usage du site correspondant à sa dernière exploitation, puis, explique David Hiez, vice-président de l'UPDS, une deuxième phase de dépollution qui fait suite à un diagnostic environnemental en fonction du projet immobilier envisagé.

Le dispositif devrait permettre de supprimer une phase de caractérisation, estime l'ingénieur, mais il demandera plus de travail sur l'évaluation des coûts liés aux travaux. Au-delà de cet intérêt opérationnel, qui reste encore à démontrer pour certains, Estelle Poutrel pointe en revanche les risques pour le promoteur qui va se retrouver seul face à l'Administration et qui peut être confronté à la découverte de pollutions supplémentaires après le transfert de responsabilité. La représentante du groupe de BTP relève également le risque lié à un empilement des garanties exigées par l'Administration ou par les vendeurs. Un arrêté, soumis à la consultation du public en juin dernier, détermine d'ores et déjà les modalités de constitution des garanties financières exigées du tiers demandeur.

En bref, la juriste ne voit un intérêt à faire appel à ce nouveau dispositif que dans le seul cas de sites pollués orphelins, dès lors qu'il y a un impact sur le prix du foncier et une répartition des coûts générés par la dépollution. Ou encore dans le cas de sites moyennement pollués pour lesquels la procédure permettra de gagner du temps. En revanche, si l'exploitant est identifié et présent, "nous allons continuer sur ce qui se fait déjà", indique Estelle Poutrel. C'est-à-dire passer par la voie contractuelle pour fixer une répartition des coûts de traitement des terres polluées entre l'aménageur et l'ancien exploitant, tout en laissant ce dernier… seul responsable de la réhabilitation vis à vis de l'Administration.

Les industriels pas encore convaincus

Le dispositif recueille-t-il plus d'engouement de la part des industriels ? Pas tellement à en croire un représentant de Total Raffinage Chimie qui dit "ne pas être tellement vendeur au niveau du groupe pour l'instant", tout en précisant que la réhabilitation de ses sites n'ira pas au-delà de l'usage de la dernière exploitation. La situation de blocage à laquelle voulait précisément mettre fin le nouveau dispositif.

Un problème de droit se pose pour les exploitants, explique l'avocat Jean-Nicolas Clément : "Que fait-on lorsque les travaux ont commencé et que le tiers-demandeur disparaît, alors que l'usage du terrain retenu par ce dernier n'est pas le même que celui retenu par l'exploitant ?" Le projet de décret prévoit en effet qu'en cas de défaillance du tiers demandeur et d'impossibilité de faire appel aux garanties financières, le dernier exploitant reste redevable de la remise en état, conformément au code de l'environnement.

Finalement, c'est du côté des mandataires de justice, qui deviennent responsables de la remise en état des sites en cas de liquidation judiciaire de la société exploitante, que la possibilité de faire appel à un tiers demandeur reçoit le meilleur accueil. Ainsi Christophe Basse, représentant de cette profession, se dit ravi de la possibilité de "voir venir un tiers-demandeur" intéressé par la reprise d'un terrain. Les mandataires sont en effet confrontés à des dizaines de dossiers de sites pollués inclôturables car recelant encore, malgré tout, des actifs.

"Il y a de très mauvaises opérations sur lesquelles les professionnels n'iront pas", admet M. Basse. "En revanche, d'autres peuvent se révéler très bonnes", ajoute-t-il, citant l'exemple d'un terrain de sept hectares en plein cœur de Lyon.

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