Installations nucléaires : situation satisfaisante mais…
Malgré deux incidents de niveau 2 (sur l'échelle INES qui en compte 7) liés à la ''criticité'', dans l'usine Melox à Marcoule le 3 mars et dans l'atelier de technologie du plutonium à Cadarache en juin, l'ASN juge la situation globale des installations nucléaires ''assez satisfaisante''.
Sur les 19 sites gérés par EDF, l'Autorité de sûreté pointe néanmoins dans son rapport quatre mauvais élèves : Saint-Alban (sur l'ensemble des aspects), Chinon et Flamanville (en matière de sûreté nucléaire, notamment de rigueur d'exploitation) et Belleville-sur-Loire (en matière d'environnement). En revanche, cinq sites se distingueraient de manière positive : Golfech, Bugey, Gravelines, Penly et Civaux. Cependant, si des progrès dans la rigueur d'exploitation ont été observés sur certains sites en 2009, l'ASN estime qu'EDF doit améliorer la qualité et la profondeur des analyses de retour d'expérience d'exploitation réalisés. L'Autorité de sûreté épingle notamment l'énergéticien qui ''n'a pas suffisamment anticipé certaines problématiques qui le conduisent aujourd'hui à devoir réaliser des opérations de maintenance corrective délicates et de grande ampleur sur les générateurs de vapeur, afin d'en assurer la sûreté''. Des défauts de qualité ont d'ailleurs été observés sur certaines opérations de maintenance, ''la qualité des analyses de risques réalisées pour préparer les opérations de maintenance et leur appropriation par les intervenants doivent être améliorées''. L'ASN note également ''une dégradation de la surveillance sur le terrain des activités réalisées par des entreprises prestataires et considère que cette surveillance doit être rapidement améliorée et renforcée''.
Enfin, dans le domaine de la protection de l'environnement, la situation en 2009 a ''régressé'', notamment en ce qui concerne les rejets non radioactifs : ''un nombre significativement plus important d'écarts a été constaté par rapport aux années précédentes'', notamment à Tricastin. Jean-Christophe Niel, directeur général de l'ASN, s'est d'ailleurs dit inquiet de la situation de ce site, à la suite du report de certains projets de traitement des effluents et des déchets.
Concernant la prolongation de l'exploitation au-delà de 30 ans des réacteurs, demandée par EDF (34 réacteurs concernés), si l'ASN n'a pas a priori identifié de freins, elle rappelle que l'étude devra se faire au cas par cas, réacteur par réacteur. L'Autorité est beaucoup plus prudente quant à une éventuelle prolongation au-delà de 40 ans également souhaitée par EDF, ''une durée qui va au delà de celle prévue à l'origine pour ces réacteurs'', juge Jean-Rémi Gouze, commissaire de l'ASN, rappelant que la décision sera prise en référence aux exigences de sûreté de l'EPR.
Quant à la construction de l'EPR de Flamanville commencée en septembre 2007, l'Autorité a pointé du doigt la conception du système de contrôle-commande, qui n'est pas parue ''assez sécurisée''. L'ASN a donc demandé à EDF de travailler à sa mise en conformité.
Concernant le projet d'EPR à Penly, l'autorité a souligné l'importance de la gouvernance, rappelant que ''l'opérateur doit disposer des compétences et des moyens financiers propres indispensables à la construction, à l'exploitation et au démantèlement du réacteur''.
Nucléaire de proximité : une situation hétérogène et une pénurie de professionnels
Sur un tout autre aspect, l'Autorité de sûreté nucléaire a mis en garde contre l'augmentation de 57 % en cinq ans des expositions médicales des patients, due à une multiplication des examens et traitements médicaux exposant les patients à des rayonnements et à une augmentation des doses pour les traitements les plus performants. Si Michel Bourguignon, commissaire de l'ASN, juge cette tendance ''inéluctable'', il souligne le risque de cancer notamment chez les plus jeunes et appelle à un ''renforcement de la justification d'examen et à une optimisation de leur réalisation''. Il préconise l'utilisation de techniques non irradiantes lorsque c'est possible et rappelle que le parc des IRM (Images par résonance magnétique) est aujourd'hui insuffisant et qu'il faudrait le doubler.
L'Autorité a rappelé que les centres de radiothérapie sont fragilisés par un manque de physiciens médicaux, une situation pointée du doigt depuis plusieurs années déjà. Près de 30 centres sur 180 ne parviendraient pas à l'objectif de 2 permanents présents sur le site. ''Dans ce contexte de pénurie, l'ASN a été amenée à suspendre provisoirement l'autorisation d'utilisation des accélérateurs dans les centres de radiothérapie de Blois, Gap, Roanne, Croix et Nevers'', rappelle le rapport. Si le nombre de diplômés est passé de 46 en 2008 à 77 en 2009, cela est jugé insuffisant. Rappelant les accidents d'Epinal et de Toulouse, Michel Bourguigon a expliqué que dans de telles conditions la France n'était pas ''à l'abri d'accidents ponctuels''.