Malgré la diminution des captures licites et illicites de thon rouge depuis 2008, la surpêche et la fraude se poursuivent. Selon un rapport publié mi-octobre par Pew Environnement Group, l'écart entre les quantités commercialisées de thon rouge et les quotas fixés par la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta) atteindrait un niveau record en 2010. En effet, 12.373 tonnes de thon rouge ont été capturées l'année dernière d'après les informations fournies par les Etats pêcheurs pour une quantité commercialisée de 32.564 tonnes.
Afin de calculer la quantité de thon rouge pêchée au-delà des quotas annuels, les chercheurs du Pew Environnement Group ont comparé les données des Etats fournies à la Cicta avec celles commerciales ainsi que douanières des importations et exportations. Cette analyse n'a, par ailleurs, pas pris en compte les thons rouges vendus au marché noir, ni ceux étiquetés sous le nom d'une autre espèce. Des mécanismes qui, s'ils étaient intégrés au calcul, augmenteraient davantage l'écart enregistré…
L'Italie dans le collimateur de l'Union européenne
Le 29 septembre dernier, l'UE a ainsi annoncé une seconde procédure d'infraction à l'encontre de l'Italie qui a deux mois pour prendre des mesures significatives pour démontrer l'implication de son gouvernement dans la lutte contre les filets dérivants. Dans le cas contraire, le pays pourrait se voir infliger une amende allant jusqu'à 120 millions d'euros. Mais, cette procédure ne semble pas satisfaire pleinement le Pew Environnement Group qui a demandé à l'UE et à la Cicta de prendre des dispositions plus strictes. Une d'entre elles consiste "à placer immédiatement sur la liste noire de navires de la Cicta tout opérateur italien réputé avoir pratiqué des activités de pêche au filet dérivant pourtant interdites. Ce faisant, il leur serait interdit de débarquer leurs thons rouges ou espadons et les importateurs et d'autres secteurs seraient découragés d'acheter ces espèces à des navires sur liste noire", met en avant le Pew Environnement Group.
Un système électronique pour limiter la fraude
Malgré la forte réduction des quotas et la mise en place par les membres de la Cicta d'un système de documentation sur papier des captures de thon (BCD), certains facteurs expliqueraient encore cet écart comme la falsification de documents pour la vente et le commerce illicite de thons, notamment vers les marchés locaux de l'Union européenne (UE). La sous-déclaration systématique, voire la non déclaration, de thons rouges capturés et transférés vers des élevages en Méditerranée aggrave également cette situation. Enfin, l'interdiction d'utiliser des filets dérivants ne serait pas respectée dans certains pays côtiers de Méditerranée, en particulier l'Italie.
Pour régler les problèmes de fraude, la Cicta a formé un groupe de travail dont l'objectif est d'élaborer d'ici la saison 2012, un système BCD électronique permettant de déclarer de manière plus précise et avec le moins de retard possible les données de capture. "En novembre 2010, des informations essentielles manquaient encore dans la base de données BCD de l'ICCAT [Cicta] pour 75 % des captures réalisées en 2008 et 2009 par des senneurs", précise ainsi le rapport.
De son côté, le Pew Environnement Group souhaite que l'e-BCD comprenne au minimum une base de données sûre, centralisée et facilement accessible aux utilisateurs autorisés. Il réclame également l'établissement d'un système de code-barres pour assurer le suivi de chaque poisson le long de la chaîne d'approvisionnement.