« Les gens connaissent surtout l'Union internationale de la conservation de la nature (UICN) par la publication, chaque année, de la liste rouge des espèces menacées », expliquait Maud Lelièvre, présidente du comité français de l'ONG, il y a quelques jours à Actu-Environnement. La tenue du congrès mondial de la nature à Marseille a été l'occasion de présenter le 4 septembre une nouvelle actualisation de cette liste créée en 1964.
Risque faible pour le thon rouge de l'Atlantique
Les sept espèces les plus pêchées ont fait l'objet d'une réévaluation qui montre une amélioration pour quatre d'entre elles. Cette embellie résulte des quotas de pêche mis en place dans certaines régions. Ainsi, le thon rouge de l'Atlantique a été déclassé de la catégorie « en danger » à celle de « préoccupation mineure ». C'est-à-dire que le risque d'extinction est maintenant considéré comme faible. De même, le thon blanc et le thon albacore se retrouvent sous ce même statut après avoir été classés « quasi menacés ».
« Ces évaluations de la liste rouge sont la preuve que les approches de pêche durable fonctionnent, avec d'énormes avantages à long terme pour les moyens de subsistance et la biodiversité. Nous devons continuer à appliquer des quotas de pêche durables et à lutter contre la pêche illégale », analyse Bruce B. Collette, président du groupe de spécialistes des thons et espadons à l'UICN.
« Cependant, comme en témoigne la situation précaire de certains stocks, une gestion durable nécessite une meilleure collecte de données, des efforts de déclaration et des technologies de capture plus intelligentes, ainsi que la conception et l'application de réglementations, de quotas et autres politiques efficaces », tempère Beth Polidoro, professeure agrégée à l'université d'État de l'Arizona.
Régressions régionales
D'autres éléments appellent à la prudence. D'une part, la quatrième espèce en amélioration, le thon rouge du Sud, reste « en danger ». D'autre part, les améliorations constatées sont globales et masquent des régressions régionales : baisse de moitié de la population de thon rouge dans l'Atlantique Ouest au cours des quatre dernières années, surexploitation du thon albacore dans l'océan Indien. « Les espèces de thon migrent sur des milliers de kilomètres, et il est donc […] essentiel de coordonner leur gestion à l'échelle mondiale », pointe Bruce Collette.
« Pour le thon blanc, les captures par unité d'effort (CPUE) diminuent depuis des années et une incertitude importante subsiste quant aux impacts des changements climatiques sur cette espèce en particulier, avertit par ailleurs Jack Kitinger, vice-président du Centre pour les océans de l'ONG Conservation International. D'où l'importance de poursuivre les travaux dans une perspective climatique, ainsi que d'appliquer des règles de contrôle des captures à l'échelle régionale. » Quant au thon rouge du Pacifique, l'espèce est proche du seuil de menace et ne représente plus que 5 % de sa biomasse d'origine.
Enfin, les mauvais chiffres concernant les requins et les raies montrent que les pressions sur les espèces marines vont croissant. Une réévaluation les concernant révèle que 37 % d'entre elles sont menacées d'extinction. En cause ? La surpêche, la dégradation des habitats et les changements climatiques.
Aussi, cette communication positive ne doit pas masquer que l'UICN a d'ores et déjà déclaré 902 espèces comme définitivement éteintes dans le monde.