6 millions de foyers français utilisent le bois comme moyen de chauffage selon une enquête "Chauffage au bois, mars 2012" du Syndicat des énergies renouvelables et "sechaufferaubois.com". Près de 500.000 logements supplémentaires s'équiperaient chaque année. Si ces chiffres laissent envisager un certain dynamisme, la filière bois en France présente cependant de nombreux paradoxes. Une étude du cabinet Alcimed "Le marché actuel des nouveaux produits issus du bois et évolutions à échéance 2020" publiée en février 2012 pointe ainsi une "ressource disponible et croissante mais un potentiel sous-exploité, l'économie correspondante stagnant avec une industrie en souffrance et en déficit commercial".
Sous l'impulsion du Grenelle de l'environnement, la France s'est fixée un objectif de 23% d'énergies renouvelables en 2020 dont 11 Mtep issues de la biomasse. Pour atteindre les objectifs fixés, selon le Ministère de l'Agriculture, il faudrait toutefois augmenter l'exploitation de la ressource forestière de 21 Mm3 supplémentaire par an dont 12 Mm3 de bois énergie. L'une des principales difficultés pour y parvenir sera notamment de résoudre les conflits d'usage entre le bois énergie et le bois industrie. Ces deux filières se partagent en effet les déchets issus de la sylviculture et ceux de scierie.
Des obstacles à dépasser
L'approvisionnement en bois constitue également un obstacle de taille. Le gisement réellement disponible s'avère en effet difficile à estimer. Ainsi en 2009, une étude du Cemagref évalue la disponibilité supplémentaire en bois d'industrie et bois énergie (Bibe) à 28,3 Mm3 et 8,1 Mm3 par an de menus bois. Un document de l'Ademe dans le même temps ne la considère que de 12 Mm3 et 7,2 Mm3 de menus bois. Selon l'étude d'Alcimed, il faudrait prendre en compte dans ces projections la prédisposition des propriétaires à vendre leur bois ainsi que les impacts sur les exportations en direction des autres pays européens.
Les coûts d'exploitations et d'investissements qui provoquent un développement dépendant des aides publiques constituent un autre obstacle. Les chaudières et les centrales de cogénération à bois sont en effet plus onéreuses que leurs équivalents à gaz. Et le prix de ce dernier rend non compétitif le bois sans incitation de l'Etat : crédit d'impôt pour les installations de chaudières à bois ou inserts, appels à projets Biomasse Chaleur Industrie Agriculture et Tertiaire (BCIAT) de l'Ademe ou système d'aide à la production d'électricité à partir de biomasse. Des granulés fabriqués à partir de matières premières renouvelables viennent également concurrencer le bois. Enfin, se pose la question de la pollution atmosphérique, induite par ce procédé.
L'étude Alcimed souligne également l'enjeu pour la filière de développer des biocombustibles qui utilisent une ressource aujourd'hui non valorisée. Le marché des granulés s'est bien développé en France jusqu'à devenir une véritable filière industrielle. La production en 2009 était de 345.000 tonnes pour une consommation annuelle de 305.00 tonnes. La capacité serait six fois plus importante. Le document Alcimed estime toutefois que " si le granulé énergétique se développe en France, son soutien devra être pensé en cohérence avec celui des autres valorisations du bois (…) Il sera nécessaire de hiérarchiser les usages, les natures incitatives devant s'inscrire dans ce cadre, de privilégier de nouvelles formes de concentration énergétique et de soutenir au mieux les initiatives de recyclage et d'utilisation des déchets ou des produits en fin de vie pour la fabrication de biocombustibles solides. (…) les biocombustibles liquides et gazeux devront également être considérés du fait de leur potentiel".
La filière des combustibles solides de récupération (CSR) réalise quant à elle ses premiers pas en France. Meilleure valorisation de la ressource forestière (en bois d'œuvre ou bois d'industrie), développement de filière de recyclage et traitement des déchets de bois (par exemple ceux issus du BTP), l'étude Alcimed considère que les CSR représente l'avenir de la filière bois énergie. Leur essor passera cependant par une réflexion sur les questions de traçabilité des déchets et le traitement des polluants.
Concernant la cogénération, la France est en retard par rapport aux autres pays européens : 3 % de l'électricité est issue de cogénération dont une partie seulement qui provient de la biomasse. En Europe, 11 % de la production électrique sont assurés par la cogénération (avec les pays leader :43% pour le Danemark, 41 % pour la Lettonie, 34% pour la Finlande et 30 % pour les Pays-Bas). De la même manière, la France figure parmi les mauvais élèves pour les réseaux de chaleur : il existe aujourd'hui seulement 149 réseaux équipés d'une chaufferie bois.