Photovoltaïque pour les particuliers : rupture ou assainissement de la filière ?
Alors que toute la filière du photovoltaïque attend le rapport de l'Inspection générale des finances, prévu pour fin juillet, et qui devrait réaliser un diagnostic du secteur et des dispositifs de soutien engagés, le ministère de l'Environnement envisagerait, dans le cadre du plan de réduction des niches fiscales, de diminuer le crédit d'impôt pour l'achat de panneaux photovoltaïques (actuellement de 50 %). Une annonce qui tombe quelques jours après les rumeurs d'une nouvelle baisse de tarifs d'achat. ''Si les deux dispositifs de soutien baissent en même temps, la dynamique de la filière est cassée'', analyse Waël Elamine, en charge du département solaire au SER, qui vient de publier un ensemble de propositions ''pour un développement harmonieux de la filière''.
Du côté du ministère, on justifie, sans les confirmer, ces hypothèses par la ''surchauffe'' que connaît actuellement le secteur : ''l'ensemble des demandes de raccordement nous mettent au résultat de 2020 en termes de puissance installée'', a expliqué Jean-Louis Borloo.
Cette coupe des dispositifs de soutien serait-elle destinée à éviter une bulle spéculative ? A en croire les professionnels, ces mesures toucheraient davantage l'investissement des ménages. ''Ces deux outils conjugués ont permis un développement important du parc résidentiel équipé de panneaux solaires photovoltaïques en seulement cinq ans : de 900 logements en 2004 à près de 36.000 fin 2009, rappelle le SER. Pour Caroline Keller, chargée de mission Energie logement à l'Union française des consommateurs (UFC), la baisse du crédit d'impôt permettrait néanmoins d'éviter certaines dérives : ''la conjugaison tarifs d'achat et crédit d'impôt a créé un effet d'aubaine. Certains installateurs non professionnels en ont profité pour vendre du crédit d'impôt, comme cela a été le cas récemment pour les pompes à chaleur. Finalement, le consommateur était lésé, avec des installations non conformes''. André Joffre, de Tecsol, estime pour sa part ''qu'une installation photovoltaïque épuise souvent à elle seule le potentiel crédit d'impôt des ménages et pénalise par exemple la pose de chauffe-eau solaire''. Cette mesure bénéficierait donc peut être au ''renouveau'' du solaire thermique…
Une certitude face aux nombreuses incertitudes qui pèsent sur le secteur : l'impact sur les emplois. ''Les analystes prévoyaient un doublement de l'activité pour les douze prochains mois. Avec cette annonce, ce sont 15.000 à 20.000 emplois qui sont gelés'', note France Panneaux Solaires dans un communiqué de presse. Premières victimes ? Les petites ou les jeunes entreprises, ''qui n'ont pas la possibilité de s'appuyer sur une autre activité durant cette période troublée'', analyse l'Association des producteurs d'électricité solaire indépendants (APESI). Ce qui favoriserait une reconcentration des activités sur les gros acteurs, davantage en mesure de surmonter cette période de questionnements, si tant est que les investisseurs ne s'enfuient pas entre temps.
Rénovation thermique : coup de frein de l'activité
Le secteur de l'amélioration énergétique des bâtiments souffrirait lui aussi des mesures de rigueur. Selon Caroline Keller, la baisse du crédit d'impôt développement durable et le verdissement de la TVA réduite pénaliseraient les ménages : ''la rénovation nécessite un investissement important avec un retour sur investissement très long. Sans dispositifs de soutien, de nombreux ménages pourraient renoncer à entreprendre ces travaux''.
La Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) dénonce quant à elle ''la complexité administrative qui découlerait du verdissement de la TVA et qui rendrait le dispositif difficilement applicable et contrôlable'' : ''l'élaboration des listes exhaustives des matériaux éligibles devrait être plus qu'épineuse, sans parler du colossal travail d'actualisation qui serait nécessaire pour les maintenir au goût du jour. Une telle mesure prendrait rapidement des allures de casse-tête et serait source d'erreurs, donc de redressements fiscaux, de contestation voire de dérives'', explique Patrick Liébus, président de la CAPEB.
De plus, si le verdissement de la TVA ''paraît séduisante au regard des objectifs du Grenelle de l'environnement, l'impact économique sur l'activité et l'emploi dans le secteur du bâtiment serait désastreux : 2,8 milliards d'euros de perte et 24.000 emplois en moins''.