Pourtant, il n'y a pas si longtemps, les objectifs gouvernementaux promettaient de beaux jours au secteur…
Grenelle 2 : le vent tourne pour l'éolien
Novembre 2008. Après le vote à la quasi-unanimité, en première lecture à l'Assemblée nationale, du projet de loi Grenelle 1, Jean-Louis Borloo présente le Plan sur les énergies renouvelables, afin de permettre à la France d'atteindre son objectif de 23 % d'énergies renouvelables d'ici 2020, imposé par Bruxelles. Ce plan envisage de multiplier par 10 le parc d'éoliennes en France, pour parvenir à une puissance installée de 20 à 25 gigawatt (GW) en 2020.
Mars 2010. La France compte 4,8 GW de puissance installée. La mission parlementaire présidée par le député Patrick Ollier rend son rapport sur l'éolien dans une ambiance tendue : Philippe Plisson, le co-rapporteur socialiste, a claqué la porte, jugeant ce rapport à charge contre la filière. Cinq propositions de la mission d'information vont finalement être adoptées début avril par les commissions parlementaires chargées d'examiner le projet de loi Grenelle 2. Ainsi les parcs éoliens, selon les amendements adoptés, seront encadrés par des schémas régionaux, devront respecter un seuil minimum de 15 MW, une distance minimale de 500 mètres avec les zones habitables, être soumis au régime d'autorisation ICPE. Les porteurs de projets auront quant à eux obligation de constituer des provisions pour le démantèlement des installations.
Une dynamique tuée dans l'œuf ?
Selon le SER, la mise en place de schémas régionaux et la soumission au régime ICPE provoquerait ''une rupture de rythme de développement de l'éolien pour atteindre un niveau de 500 à 400 MW par an à terme'', contre 1.000 MW enregistrés en 2008 et 2009.
Le premier amendement donne ainsi compétence aux régions et aux préfets de région pour la définition de schémas éoliens, alors que jusque-là, il revenait aux communes de définir des zones de développement de l'éolien (ZDE). ''La cerise sur le gâteau, analyse André Antolini, c'est que les préfets et les présidents de région doivent élaborer ces plans avant le 31 décembre 2011, dans le cas contraire, le développement de l'éolien sera rendu impossible''. Quant au régime ICPE, ''le ralentissement de l'instruction des dossiers aura un impact certain''.
Autre mesure non négligeable : l'obligation de créer des parcs éoliens avec un seuil minimal de 15 MW, ce qui entraînerait selon le SER ''l'abandon de plus de la moitié des projets en cours de développement''. ''En Bretagne, illustre le président du syndicat, sur 21 projets actuellement dans les cartons, un seul serait maintenu, car supérieur à 15MW''.
Alors que la filière industrielle était en train de se structurer, appuyée par les ministères de l'Ecologie et de l'Industrie 1, les professionnels et les associations voient ces amendements comme une menace.
''Ils vont briser une dynamique alors que l'éolien représente un tissu industriel extrêmement fort d'ici 2020. Les professionnels ont besoin de visibilité à moyen et long terme. Les règles ne peuvent pas changer tous les 2 ou 3 mois'', analyse Nicolas Bouley, de l'Union française de l'électricité (UFE).
Pour Maryse Arditi, du réseau France Nature Environnement, ''ce qui a été inscrit et voté dans le Grenelle 1 doit être maintenu. Il faut un minimum de cohérence. Pour que la France respecte les objectifs du Grenelle et les objectifs européens en matière d'énergies renouvelables, l'éolien est nécessaire''.
Interrogé sur les propos de Jean-Louis Borloo, qui déclarait le 27 avril qu'un durcissement de la réglementation ne constituerait pas forcément un frein, André Antolini se fâche : ''je pense que Jean-Louis Borloo devrait prendre la parole de manière ferme. Je suis déçu de ses dernières déclarations publiques. Nous ne pouvons pas nous contenter de propos qui nous assurent que ce qui va nous tuer peut nous faire du bien''.