Le coût de construction de l'EPR de Flamanville (Manche) est réévalué à 12,4 milliards d'euros, soit une augmentation de 1,5 milliard d'euros par rapport à la précédente évaluation de juillet 2018, annonce EDF ce mercredi 9 octobre. Ce surcoût est dû aux travaux de réparation de certaines soudures du circuit secondaire, et en particulier des huit soudures des traversées d'enceinte. Ces soudures, particulièrement difficiles d'accès, seront réparées par robots, après que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) aura totalement validé la méthode. « C'est un procédé innovant, mais pas de la R&D », précise Xavier Ursat, directeur exécutif en charge de l'ingénierie et des projets « nouveau nucléaire ».
Des opérations de grande précision
La décision a été prise hier en conseil d'administration : le scénario privilégié pour la reprise des huit soudures de traversées est l'utilisation de robots télé-opérés. « Le conseil d'administration n'a pas formellement étudié d'autres alternatives [à la réparation des soudures] », précise Xavier Ursat, expliquant que, compte tenu de l'avancement du chantier, la mise en service de l'EPR « tombait sous le sens ».
Les robots qui seront utilisés ont été « conçus pour mener des opérations de grande précision à l'intérieur des tuyauteries » explique l'entreprise, ajoutant que « cette technologie a été développée pour le parc en exploitation et doit être qualifiée pour la reprise des soudures de traversées ». Ce choix, indique Xavier Ursat, a été fait sur la base de trois critères : la maîtrise des risques industriels, la certitude d'atteindre la qualité de soudure requise et la maîtrise du planning. Au total, quatre robots différents seront utilisés pour chacune des étapes (voir vidéo).
Si l'ASN ne validait pas le scénario d'EDF, l'entreprise devrait alors mettre en œuvre un second scénario, basé sur le retrait des quatre sections traversant la double enceinte du réacteur et leur remise à niveau dans les bâtiments auxiliaires. Le calendrier prendrait alors « probablement » un an de retard supplémentaire et la facture s'alourdirait encore de quelques 400 millions d'euros.
L'ASN a rejeté les scénarios privilégiés par EDF
Pour rappel, en 2018, EDF a signalé avoir constaté des écarts sur environ un tiers des soudures d'une portion du circuit secondaire classée « en exclusion de ruptures », c'est-à-dire une portion pour laquelle la rupture est considérée comme impossible. Rapidement, l'attention se porte sur huit soudures particulièrement difficiles d'accès : deux pour chacune des quatre traversées de l'enceinte de confinement. Une de ces soudures est défectueuse et les sept autres sont non conformes.
Initialement, l'entreprise privilégiait le maintien en l'état des huit soudures, voire une réparation après la mise en service du réacteur, à l'occasion de son premier arrêt. Les premières analyses des scénarios de réparation avaient fait apparaître un risque d'indisponibilité du réacteur sur une longue durée. Ce risque avait conforté EDF dans son choix de maintien en l'état ou de réparation après mise en service. La seconde option devait notamment permettre à l'entreprise de mieux évaluer les risques techniques associés à la réparation et de procéder à des entraînements. Parallèlement, dès fin février, les directions d'EDF et Framatome avaient décidé de rassembler les compétences nécessaires dans une structure ad hoc chargée d'« étudier en détails les risques associés au scenario de remise à niveau des soudures [et] lancer au plus tôt les approvisionnements nécessaires ».
Mais en juin dernier, l'ASN mettait un terme aux espoirs d'EDF. L'Autorité faisait de la réparation avant la mise en service du réacteur la « solution de référence ». En effet, « la rupture ne peut plus être considérée comme hautement improbable », expliquait l'ASN qui s'appuyait sur les avis de l'avis des experts du groupe permanent d'experts pour les équipements sous pression nucléaires (GPESPN) et de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). À l'époque, EDF avait accusé réception de la demande de l'Autorité et indiqué « se donner le temps d'analyser les conséquences de la décision de l'ASN ». L'entreprise devait alors faire « un point précis sur le planning et le coût du projet (…) dans les prochaines semaines ». C'est dorénavant chose faite.